I just need a phone [Peter ♥]

Depuis quand acheter un téléphone portable est devenu si compliqué ? Non, mais c’est vrai quoi. Normalement, il suffit juste de se pointer dans un endroit où ils en vendent, demander gentiment, choisir le modèle, choisir le forfait, payer et basta. Ok, y’a aussi tout le truc avec un numéro. Et puis avec les cartes prépayées, c’est encore plus simple que ça. Alors pourquoi j’ai tellement de mal à trouver un portable ? Bah oui, Valery, c’est parce que t’es perdue et que tu n’as aucune idée d’où pourrait se trouver un endroit où ils en vendent. Et forcément, il fallait que tu te perdes dans le Queens, bien évidemment. Enfin, il vaut mieux dans le Queens que dans Manhattan, sinon tes anciens amis risquent de te reconnaître, ou bien le flic qui a eut la peur de sa vie et que tu as envoyé à l’hosto la semaine dernière.

Et il faut vraiment que j’arrête de me parler. On va croire que je suis folle. Même si après tout ce qui m’est arrivé, je me demande parfois si je ne le suis pas en fin de compte…

Je continue d’errer dans les rues du Queens, la capuche de mon sweat cachant ma tête et surtout ma natte rousse et tellement épaisse qu’à côté Sansa Stark c’est une blague. Je n’ai pas tout compris avec cette histoire de recensement ou quelque chose dans le genre, mais ce que j’ai bien capté, c’est que je fais maintenant partie du SHIELD (après tout, ils sont les seuls à avoir eut les réponses à mes questions et à ne pas m’avoir rejetée ou traitée de monstres… et y’a d’autres Inhumains là-bas). Que le SHIELD est contre le Registration Act. Ah oui et je n’ai pas du pupuce aussi (oui, c’est le petit surnom affectueux que je donne à cet espèce de truc qu’ils t’injectent pour te taguer comme un chien). Et que si les autorités l’apprennent, ça risque de poser problème. Mais le SHIELD n’est pas une prison et j’apprécie le fait qu’ils me laissent sortir (même si ça ne m’étonnerai pas que quelqu’un me suive). Ils ont des téléphones, mais je préfère avoir le mien et ne pas être écoutée quand j’appellerai mes parents pour leur dire que je suis encore en vie. Je ne sais vraiment pas comment cette conversation va tourner et je préfère ne pas y penser, quitte à improviser au moment où je passerais le coup de fil. Si j’arrive à trouver un endroit où je peux acheter un tel.

Fatiguée, je m’arrête devant une boutique, m’appuyant un instant contre la vitre. Ça fait des heures que je n’ai rien bu, mais depuis que je suis Inhumaine, je me méfie de l’eau. Parce que depuis une semaine, je fais exploser mon verre quand j’essaie de boire. Je ne déconne pas. Il a fallut que je me calme et que je boive dans une espèce de gobelet en métal comme lorsque je faisais du camping. Pour l’instant, j’arrive à me contrôler, je n’ai pas encore eut de dérapage aujourd’hui, donc tout va bien. Prête à me remettre en route, mon regard tombe sur la vitrine du magasin et je me rends compte qu’ils y vendent aussi du matos informatique. Donc potentiellement des téléphones. J’entre sans me poser plus de questions, triturant le bas de mon sweat alors que je me dirige vers le premier vendeur que je croise et qui n’a pas l’air trop occupé. J’espère que je ressemble au cliché de l’ado normale avec mon jean et mes converses. J’ai beau être nerveuse, tant que je ne montre pas mes pouvoirs, ça devrait aller. Enfin, j’espère. « Euh, bonjour. Excusez-moi, mais vous vendez des portables ? » je demande au vendeur, un jeune homme plus âgé que moi.

Pendant que je regarde un peu autour, le jeune homme me répond immédiatement et me sourit même. Peter... j'essaie de retenir son nom. Cela me rassure en soit, je n’avais pas spécialement envie d’avoir affaire à quelqu’un de désagréable. Déjà que je ne suis pas à l’aise avec des gens en ce moment, ce qui me frustre comme pas permis puisque je suis très sociale et extravertie d’habitude… Mais ça, c’était avant. Avant ma transformation dont j’ai encore une fois oublié le nom scientifique, avant tout ce bordel, avant que je ne devienne une menace. Puis vient la question fatidique qui demande précision : ordinateur ou téléphone. Je me fais un facepalm mental. J’aurai du y penser ! « Euh, un téléphone portable. Pour appeler les gens et envoyer des textos… majoritairement. » Je ne vais pas non plus demander toutes les options, car malgré ma gourmandise en matière de technologie, je n’ai besoin d’un téléphone que pour appeler. « J’ai un budget relativement limité. » Je retire ma capuche, dévoilant mes cheveux roux et me souvenant soudain de les leçons de savoir-vivre de ma mère : enlève tout ce que tu as sur la tête quand tu entres dans un bâtiment, c’est plus poli. « Dans le genre de trente balles. Vraiment, je n’ai pas besoin d’un Iphone, un modèle pourri me suffirait largement, je n’en aurai besoin que pour appeler et à la limite envoyer des sms… » En vrai, j’espère ne pas avoir à mettre plus de trente dollars dans ce téléphone et une carte prépayée serait aussi préférable à un forfait, vu que ce serait moins contraignant. « Qu’est-ce que vous avez comme modèles ? »

Je le laisse digérer ces informations tout en observant un peu la boutique et attendant de voir les modèles qu’il pourrait me proposer. Le souci avec un forfait, c’est que ça me reviendrait bien trop cher pour ce que je vais faire de ce téléphone et que, de ce que j’ai entendu, certains agents du SHIELD sont parfois envoyés à l’étranger. Bien que cela ne risque pas d’être mon cas pour l’instant, un jour peut-être que je partirais et donc le forfait serait limitant. Mon regard bascule sur les différents accessoires et je tombe sur une paire d’écouteurs pas trop chère et assez jolie tout en restant discrète. Ça pourrait m’intéresser, en plus, j’ai toujours été une grande fan de musique, ça aide pour l’inspiration en dessin, mais comme je n’ai plus d’ordinateur, va trouver un moyen de télécharger sans forfait internet ou sans application faite pour ça. Je relève ensuite la tête en abandonnant cette idée d’écouteurs. Je ne suis pas venue pour ça, il ne faut pas que je claque mes sous sur des objets inutiles et si j’ai besoin d’écouteurs pour une mission, je suis sûre que le SHIELD pourrait me les fournir. J’ai vu qu’ils avaient pas mal de matos. Ou alors je pourrais demander à Daisy. De ce que j’ai compris, elle était hackeuse et elle a l’air d’être parfaitement au courant du matériel à disposition des agents, elle a certainement déjà été de corvée d’inventaire. La voix du jeune homme devant moi me tire pourtant de mes pensées et je m’efforce d’écouter sa réponse pour ne pas avoir à lui demander de répéter. J’ai déjà l’air assez étrange et paumée comme ça…

En toute autre circonstance, je n’aurai jamais été aussi mal à l’aise. D’habitude, je suis extrêmement extravertie, bavarde comme pas possible et surtout très à l’aise avec les gens. Mais depuis ma… transformation, les choses ne sont plus pareilles. Et, aussi difficile que cela puisse être à accepter, j’ai changé. Et j’ai un peu (beaucoup) de mal à m’y faire. Bien entendu, j’ai recommencé à faire des blagues débiles par-ci par-là, j’ai repris la dernière saison de Game of Thrones que j’avais raté avec tout le bordel de ce qui s’est passé à Harlem la semaine dernière et me voilà même dehors, à l’air libre et non pas enroulée dans ma couette au fond de mon lit de fortune au fin fond du trou du *ahem* du SHIELD. Ce n’est pas que je n’apprécie pas ce qu’ils ont fait pour moi. Au contraire même. Ce job d’agent, c’est le premier véritable job à temps plein de ma vie. Yaaay, j’en sautille de joie. Mais ce sont les circonstances qui m’ont amenées à effectuer ce job qui me chagrinent. Et tout le merdier (majoritairement sous la forme d’une montagne de formulaire et de protocoles) qui va avec. Et l’impossibilité de prendre contact avec mes parents me pèse, il faut que je renoue avec la seule famille qu’il me reste, la seule que j’ai vraiment connu. Car mes parents n’ont pas gardés de liens très proches avec leurs frères et sœurs, sans parler de leurs parents. Je sais que ma famille lointaine est loin d’être complète, mais pourtant, si je possède des cousins quelque part, je n’en ai pas la moindre connaissance.

Une fois que Peter fini son monologue, je le regarde un peu perdue, pour la première fois de ma vie à court de mots. C’est un peu une bombe qu’il vient de me poser sur la tête là. Trop d’informations tue l’information. J’essaie donc de ne focaliser à ses premières paroles tout en essayant de ne pas avoir l’air trop perdue pour ne pas l’obliger à répéter. Il a parlé du modèle, oui tout le monde ne possède pas un iPhone. En mentionnant le fait que lui-même n’en a pas, je ne sais pas s’il est sincère, mais il semble l’être en tout cas. Et puis c’est lui qui bosse ici, forcément il s’y connait mieux. « C’est sympa de pas me refourguer le tout dernier iPhone en essayant de me persuader de l’acheter. Merci, c’est cool » je lance avec un faible sourire. Puis vient la question du forfait et, intérieurement, c’est de nouveau la panique. J’imagine déjà plein de mini-moi en train de courir dans ma tête et d’hurler « au secours, on est foutus ! » comme si c’était la panique à bord. Il m’a posé une question, va falloir que je réponde et mon cerveau est particulièrement long à la détente aujourd’hui. À moins que ce ne soit du à la fatigue et à l’entraînement draconien avec mon S.O. au SHIELD. « Euh… une carte prépayée, je préfère. Je ne compte pas passer des heures sur le tel. Et je n’ai pas besoin de télécharger les dernières applis ou bien d’utiliser internet. » Et une carte c’est toujours plus pratique au cas où je sois envoyée en mission dans un autre pays, mais ça, ce n’est vraiment pas prêt d’arriver.

Enfin, il me montre l’appareil en question, un Nokia Lumi… quelque chose. Je me souviens de cette marque. Et la paire d’écouteurs comprise avec, c’est tout simplement la cerise sur le gâteau. « Je peux regarder ? » je demande à Peter. Après tout, mon père m’a toujours dit de tâter la marchandise avant d’acheter quoi que ce soit, même s’il n’avait pas utilisé ces mots-là exactement. Je prends donc le téléphone en main, observant l’écran, les touches, essayant de deviner la rapidité avec laquelle je pourrais taper un message en cas de problème de danger de mort imminente. Non pas que je pense que ça va m’arriver, mais avec tous ces changements récents, on ne sait jamais. Il n’est pas trop large, donc il devrait tenir dans ma poche. Et les écouteurs m’ont l’air décents comme tout. En plus, les couleurs restent basiques, donc je ne vais pas attirer l’attention avec. « Je les prends » et sur ces mots, je repose l'apparteil et sors mes quelques billets, déposant tout pile trente dollars sur le comptoir. « Y’a de la paperasse à faire j’imagine ? »

J’écoute attentivement tout ce que me dit le jeune homme, essayant de tout retenir et surtout de ne pas décrocher en plein milieu d’une phrase. Heureusement, je parviens à suivre tout le discours, hochant la tête au fur-et-à-mesure de son flot, plus pour m’indiquer pour moi-même que j’ai bien compris que pour lui. Les papiers sont rapidement signés, le trouve le numéro de téléphone grâce à ses indications et toute cette histoire semble être sur le point de bien se terminer. Lorsque le ton de la voix du jeune homme monte soudain, je me rends compte qu’il vient de me poser une question. « Je pense que c’est tout bon, merci. Ne me reste plus qu’à l’essayer ! » Comme mon père avait dit sur le fait de tâter la marchandise, il faut que je m’assure qu’elle fonctionne et autant que je le fasse juste dehors, pas loin du magasin au cas où ça foire et je doive revenir. Je regarde l’étiquette sur la veste de mon interlocuteur, puis son visage, histoire de bien tout mémoriser au cas où je doive remettre les pieds ici. Ou même en général, aussi, si jamais je me retrouve un jour en face de lui. Histoire que je me souvienne qu’il a été super sympa avec moi, qu’il m’a sorti d’une mauvaise passe sans vraiment savoir que j’en vivais une et peut-être qu’un jour, je pourrais lui renvoyer l’ascenseur. Non pas que je me sente redevable d’une quelconque manière, mais on a toujours plus de facilité à aider quelqu’un qui nous a rendu service auparavant plutôt qu’un parfait inconnu.

« En tout cas, merci beaucoup. Vous n’imaginez pas à quel point vous venez de me sauver les miches ! » Je le remercie de nouveau, sers sa main et me voilà en dehors du magasin, téléphone déjà en main et paquet sous le bras. Je remets la capuche de mon sweat sur ma tête avant de glisser la carte prépayée et de composer le numéro de service de ma mère que je connais par cœur. Normalement, ce numéro est réservé à des urgences, mais je pense que mon absence inexpliquée durant plus d’une semaine en est une. Surtout que mes amis, enfin, connaissances puisqu’un véritable ami ne te laisse pas dans la merde, n’ont sans doute pas réussi à leur expliqué ce qui s’est passé et ce que je suis devenue depuis ma disparition mystérieuse. Et que les flics de New York ne m’ont toujours pas mis la main dessus, donc ma mère ne peut pas vraiment compter sur le soutien de ses collègues à NY. Une fois le numéro composé, je regarde l’écran, ne réalisant pas que je me trouve toujours devant la boutique, le dos à la porte et accessoirement empêchant celle-ci de se refermer. C’est un monsieur âgé qui me bouscule en sortant, marmonnant quelque chose sous sa moustache à propos de ces gamins de nos jours tandis que je m’écarte précipitamment en m’excusant au moins six fois. Une fois en sécurité sur le côté, là où je sais que je ne dérangerais personne, j’appuie sur la touche d’appel et attend nerveusement que ma mère décroche. Sa voix irritée se fait entendre, je sais qu’elle est méfiante des numéros inconnus appelant son numéro d’urgence. Ses titres alors qu’elle se présente me font sourire. « Maman, c’est Val… »

FIN