The Fox and The Giant : perfect fairy tale. || Zach.

Il faisait nuit. Cela était préférable. Je préférais sortir lorsque l'ombre me permettait de m'y cacher, de toute façon. J'avais la désagréable impression d'être un dangereux criminel, en agissant de la sorte, en me dissimulant, en esquivant. Les anciennes habitudes avaient rapidement repris le dessus, mine de rien, et je fuyais comme un vulgaire assassin. Assassin que j'étais, étant donné toutes les victimes que Hulk avait pu faire au cours de son existence, et de la mienne. Stark avait tenté de m'habituer à cette condition, et j'y avais cru. Pauvre fou. J'avais cru que Hulk pouvait être utilisé pour le bien. Et puis j'avais fuis. Comme toujours ; l'esquive inévitable.
Au cours de ce jeu de cache cache au sein des campagnes Canadiennes, j'avais compris quelque chose d'important, une chose que, jusqu'alors, n'avait jamais été claire : Hulk n'était pas MON ennemi. Je devais cesser de me battre contre lui, et me mettre à agir avec lui. Ou du moins, accepter sa présence et la supporter. C'est dans cet état d'esprit que j'étais revenu en ville. Dangereux, et stressant. Pas très recommandé pour un homme en proie à de gros soucis caractériels. Mais pourtant, c'était la meilleure solution, et la meilleure idée que je n'avais jamais eu, peut-être.

En revenant à New-York, donc, je comptais me rendre utile. J'avais longuement pesé le pour et le contre, suite au Register Act. Beaucoup de mutants, d'inhumains, ou d'optimisés allaient se croire anormaux, pourchassés, et je savais que le gouvernement ne faisait pas ça qu'en vu d'un bien commun et durable. Il y avait toujours quelque chose d'autre. Quelque chose d'enfoui, de caché, de malsain. Cela faisait maintenant quelques mois que je me cachais par-ci, par-là. Je me faisais parfois logé (on ne me connaissait pas publiquement, je n'avais jamais dévoilé qui se cachait réellement derrière le Hulk. Seuls mes anciens coéquipiers et quelques personnes éparses savaient que le Dr. Banner avait un alter ego des plus colérique), parfois la belle étoile me tendait les bras. Dangereux de dormir sous un carton dans cette ville, il y avait de gros risques d'agression. Mais qui pouvais-je craindre ? Le danger était plus dirigé vers autrui, après tout.
J'avais réellement élu mes « quartiers » dans un petit bâtiment désaffecté pour y stocker du matériel. Un laboratoire de fortune où mon petit ordinateur et des tubes à essai étaient constamment branchés et remplis. J'aidais les gens comme je le pouvais, désormais, retrouvant la trace de certains mutants, ou autres. Quelques uns avaient eu vent de ce que je faisais et étaient eux-mêmes venus me trouver pour avoir des conseils, de l'aide, mais cela restait discret. Si l'on me trouvait, moi qui n'avait pas signé les accords, moi qui ne faisais même plus partie des Avengers au final, je serais pourchassé comme autrefois. Je me tenais déjà sur le fil du rasoir, autant ne pas en ajouter en faisant parler de moi.

Être invisible, ça me connaissait.

Ce soir, j'avais besoin d'air. Je me laissai tomber sur un banc, au hasard, et regardai le ciel. Des années plus tôt, lorsque l'on m'avait délogé du Mexique et ramené dans la civilisation pour que j'aide le SHIELD, des ennemis d'une autre galaxie étaient descendus nous attaquer. Le monde était vaste. Je me demandais si, quelque part, il n'y aurait pas, un jour, une place pour Hulk. Peut-être. Mais, en tout cas, pas sur cette planète. Malgré les capacités de mon alter ego, moi, je vieillissais. J'étais immunisé contre les maladies et les blessures grâce à lui (car quand cela m'arrivait, il prenait ma place, et ses capacités me guérissaient tout autant, bien qu'elles me laissaient lessivé et faible durant des jours, voire des semaines), mais un jour, j'allais fatalement mourir. Que deviendrait-il alors ? Mourrait-il avec moi ? Ou prendrait-il définitivement ma place ?
Je poussai un léger soupir et posai mon menton dans le creux de ma main. Je connaissais les rayons gamma, et Hulk par cœur, mais des questions resteraient à jamais inaccessibles, aucune réponse tangible. En tout cas, je ne pourrais mourir que de vieillesse ; jusqu'ici, je n'avais jamais rien eu à craindre. C'était frustrant, de ne pas avoir le contrôle de sa propre vie, mais aussi paradoxalement rassurant.

Alors que ces pensées tournaient dans ma tête, m'empêchant de fermer l'oeil (d'où ma tardive sortie), je sentis des regards se poser sur moi. Je tournai la tête et aperçus un petit renard des neiges, qui, la tête penchée, m'observait. Je haussai les sourcils. Voilà qui était peu commun. Un animal de cette espèce en plein Brooklyn... Je laissai échapper un rire, entre amusement et curiosité. J'avais peut-être des hallucinations, à force de ressasser, seul, des pensées et des souvenirs. Je glissai lentement sur le sol, à genoux, et tirai de ma poche une barre de céréales au chocolat. Je me doutais qu'un renard ne se laisserai pas vraiment séduire par une telle friandise, il me semblait que ces choses-là étaient plutôt carnivores, mais je n'avais rien d'autre et, surtout, rien à perdre. Je la déballai et, d'une voix ridiculement trop douce, lui murmurai d'approcher.
Me sentais-je si seul que ça, pour rechercher la compagnie d'un renard qui s'enfuirait au moindre mouvement brusque de ma part ? Visiblement, oui. J'aimais la solitude, mais elle me pesait un peu, parfois. (Seulement parfois...) Et dans ces moments-là, je parlais aux renards dans l'espoir de m'en faire un ami. Ou quelque chose comme ça...

« Viens, n'ai pas peur. Je m'appelle Bruce. » dis-je en posant une main sur ma poitrine. Il ne me comprenait certainement pas, mais parler à quelqu'un – enfin, quelque chose – me faisait du bien. J'entendais au moins le son de ma propre voix, et c'était plutôt bien, je ne devais pas devenir fou, enfermé dans mon esprit avec mes propres pensées parfois mélangées à celles de Hulk (car oui, il lui arrivait de penser...). « Je suis seul, comme toi, visiblement. » Je posai la barre de céréales devant moi et soupirai légèrement. « J'aime bien la solitude, normalement, mais pas ce soir, donc si jamais tu veux rester me tenir compagnie pour regarder des étoiles, d'autres planètes, et ne penser à rien... » un rire nerveux s'échappa de mes lèvres. « Voilà que tu parles à un renard, Banner, tu es quand même tombé bien bas. »

Je soupirai et laissai ma barre sur le sol. De toute façon, je ne l'aurais jamais mangé. Je me rassis sur le banc, oubliant le renard (qui n'existait peut-être que dans mon esprit, d'ailleurs), et levai la tête vers le ciel, plongé dans mes pensées, une fois encore, me demandant à quel point l'univers pouvait être vaste.

Mon regard fut attiré par la petite créature qui, à ma grande surprise, s'avançait en direction de la barre que j'avais laissé sur le sol... Qu'il se mit à dévorer. Surpris, je haussai les sourcils et enlevai mes lunettes. Je devais vraiment être fatigué. Je passai une main sur mon visage et frottais mes yeux, las. Le renard me regardait à nouveau, puis il monta sur le banc, à mes côtés. Je n'osais plus bougé, presque fasciné par l'animal. Je n'avais jamais eu de « feeling » particulier avec les animaux... Je n'avais jamais croisé par hasard un renard des neiges en ville, je devais l'admettre, mais il y avait de quoi être étonné. Sans mot, même. Je laissai échapper un vague soupir inaudible, venant du fond du cœur, mais ne pus m'empêcher de sourire lorsque la langue râpeuse de l'animal vint toucher ma joue à plusieurs reprises. Comme s'il me remerciait de quelque chose. Je tournai la tête vers lui, et souris de nouveau. J'hésitai, n'osant poser ma main sur lui par peur de le faire fuir à toute vitesse. Sa compagnie n'était peut-être pas grand chose, mais elle réchauffait déjà mon cœur.

Mon regard se dirigea à nouveau vers le ciel. Les étoiles s'accrochaient à un ciel nocturne à peine voilé. Souvent, on ne pouvait en apercevoir la vraie profondeur, à cause de la pollution commune à chaque grande ville. Mais ce soir, dans ce parc, la vue était surprenante. L'astronomie ne m'avait jamais fasciné avant l'attaque de New-York, et ces créatures descendues du ciel, comme dans les films de science fiction les plus sordides. Je m'étais penché sur plusieurs questions au sujet des astres, des planètes, de leur fonctionnement, de leur diversité. Chaque étoile représentait une forme de vie, ou presque. De milliards … Et de milliards... De quoi faire tourner plus d'une tête. La Terre n'était rien de plus qu'une étoile parmi tous les autres, aux yeux de la galaxie.
Machinalement, ma main vint se poser sur la tête du renard, attentif à ne pas faire le moindre geste brusque. Je ne souhaitais pas l'effrayer. Je me remis alors à parler à mon compagnon de fortune :

« Les étoiles que tu peux voir ici, et là bas forment des constellations. Il y en a tellement qu'on ne peut pas réellement toutes les connaître, je pense, beaucoup de combinaisons sont possibles. La plus connue reste la grande ourse, c'est celle qui ressemble à une casserole. La plupart de ces constellations ont une signification ; la grande ourse, par exemple, est la nymphe Callisto dont Zeus tomba amoureux. Elle fut changée en grande ourse par la jalouse Héra, et son fils devint lui aussi la petite ourse. »

Je m'arrêtai dans mon récit, me rendant compte que je parlais encore une fois tout seul. Pire ! A un renard. Un renard qui ne pouvait pas comprendre ce que je pouvais bien lui raconter. « La galaxie est vaste, et on ne pourra jamais en maîtriser toutes les connaissances. » continuais-je malgré tout.

« Cela m'a effrayé, à une époque. L'inconnu n'est jamais agréable, j'ai fait des recherches, tenté de maîtriser chaque élément que je rencontrai, et puis j'ai laissé tomber. Il y a des choses plus importantes que de tout connaître d'un univers bien trop vaste pour une vie entière. La place de l'Autre gars n'est pas sur Terre... » soufflais-je.

Mes pensées se matérialisaient désormais à voix haute. Le silence retomba pendant de longues minutes. J'avais du mal à arrêter de réfléchir. Réfléchir me permettait de ne pas penser à autre chose. Et ne pas penser à autre chose me permettait de garder un contrôle assuré sur la situation. Mais parfois, trop réfléchir amenait aussi à l'inquiétude et la nervosité. Heureusement, j'avais appris à faire face à ces problèmes longtemps auparavant.

« Tu as de la chance d'être un renard, l'être humain est d'un compliqué... Et la grande majorité ne veut que maîtriser, maîtriser, maîtriser, jusqu'à... Eh bien jusqu'à ce que tout foute le camp... »

Ça avait été le cas lorsque Tony et moi avions crée Ultron. Nous cherchions à maîtriser le futur, et la protection de l'humanité, au lieu de quoi nous l'avions presque détruite (tué, et blessé énormément de personnes aussi, accessoirement …). Et c'est ce que faisaient les gouvernements, les militaires avec leurs armes, leurs gadgets... Leur « J'en ai une plus grosse que la vôtre. » Cela me fatiguait, et me rendait de plus en plus aigri avec le temps. C'est pour cela que je tenais absolument à aider ceux qui en avaient besoin. Ceux qui n'avaient rien demandé, et n'avaient pas besoin de se retrouver enfermé, ou gardé comme des cobayes, épée de Damoclès au-dessus de leur tête.