It's a Match ! - Ft Jean-Akira

Pas le temps de se doucher. Elle était en retard, levée à 18h30, la blonde était encore en descente de drogue. MDMA pour plus de précision, ce qui rendait ses muscles plus mous que du chewing-gum, quant à ses pensées ? Vagues. Pas possible de se bouger. Pourtant elle avait un rendez-vous. Ils avaient matché quand elle prenait une pause pipi en pleine soirée la veille, en équilibre pour ne pas toucher la cuvette probablement porteuse d'un combo de maladies vénériennes dont elle n'avait pas besoin.

Valentina poussa du pied un désert eagle qui bloquait l'ouverture de la porte de son dressing. Une pièce de 10 mètres carrés dédiée à ses fringues. Elle n'en portait qu'une sur dix, le reste étant la résultante d'un caprice de riche. Un regard en coin vers le miroir immense, son maquillage avait coulé puisqu'elle n'avait pas pensé à l'enlever en arrivant dans la matinée de son after. Elle jeta un bon nombre de vêtements au sol, fouillant comme une furieuse. On mettait quoi, à un premier rendez-vous tinder ? Cette robe noire au décolleté affolant ? Non, pas envie d'y passer dans les cinq premières minutes. Des baskets ? un peu trop relax.

Un jean, une chemise et sa montre cartier. Puis elle sauta sur le déodorant et le shampoing sec, deux de ses meilleurs amis depuis le début de sa période de franche perdition. La brosse à dents, aussi. Elle cracha dans l'évier en marbre et s'empara de sa trousse à maquillage. Nettoyer le massacre, et se refaire une beauté. Ou du moins essayer. Heureusement, le matériel hors de prix qu'elle avait les moyens de s'offrir réussirent à camoufler une partie de ses cernes. Pas qu'elle était en quête de l'amour, ni d'un plan d'un soir. Juste envie de changer de décor, de façon de rencontrer, tout simplement fuir l'ennui qui paralysait ses membres depuis la mort d'Elektra.

Elle avait donc activement swippé la moitié la soirée avant de trouver un homme au physique de vieux beau et à la conversation originale. Elle attacha finalement sa crinière en queue de cheval et observa le reflet dans le miroir. Elle n'était pas au mieux. Mais pas dans le pire de sa condition. Il fallait ne pas s'attacher à son air fatigué, ses quelques cheveux fous et c'était bon. Par chance, elle n'était pas laide. Son père était charismatique, riche, et donc par conséquent avant épousé une femme sublime qui avait transmis une partie de son patrimoine génétique à la grande bringue qu'elle était.

Une paire d'escarpins aux pieds et un pistolet de taille moyenne glissé dans le sac plus tard, elle dévalait les marches de l'appartement familial qu'elle squattait de nouveau depuis quelques mois. Smartphone, Uber, et un airways dans le bec. Il avait proposé un restaurant de gastronomie chinoise. Gastronomie ? A Chinatown ? Et puis pourquoi pas. Ca la changerait du Four seasons. Elle se jeta dans le véhicule et soupira lourdement, évidemment déjà en retard de plus d'un quart d'heure. Les hommes aimaient attendre, tant pis. Elle s'excusa brièvement en passant par l'application, prétextant un traffic affreux.

Bien sur, le trajet s'allongea encore mais elle arriva sur place relativement rapidement. Il était déjà là, et paraissait ... Que dire. Il était bien plus agé que sa photo ne le laissait présager. Elle eut un mouvement de recul et hésita à retourner dans le uber. Mais pour faire quoi ? S'ennuyer, tourner en rond chez elle. Non. Un pas décidé, puis l'autre. Elle finit par arriver à la hauteur du seul européen de la zone.

" Euh Jean. C'est ça ? Désolée du retard. " s'excusa t-elle en rangeant son iPhone dans sa poche arrière. Qu'allait-elle pouvoir bien lui dire? Ils avaient parlé de choses plus stupides les unes que les autres en l'espace de deux heures, la veille. Elle se souvenait avoir été défoncée tout du long et avoir évoqué la télé-réalité, Donald Trump, et le fait que la nourriture mexicaine n'était pas une bonne idée pour un premier rendez-vous. Quant au reste de sa conversation, il n'avait pas eu énormément de sens.

Lorsque l'on emménage dans un autre pays, voir même dans une autre ville, il y a forcément un temps d'adaptation. Rien qu'au niveau social, nécessité de rencontrer de nouvelles personnes. De remplacer les anciens amis maintenant obsolètes. Quand on déménage de planète, le même processus prend place. Ainsi Jean-Akira a du se créer de nouvelles relations. Ce qui ne fut pas une réussite exemplaire, ses seuls potes étant des membres d'HYDRA ou du SHIELD. Des tueurs dégénérés ou des aspirants héros. Et si ça les rend tous extrêmement intéressants, notre protagoniste aimerait rencontrer des terriens un peu plus lambdas. Vivre avec le peuple. S'intégrer à la population humaine un minimum.

Au départ Ivankov essaya de se faire des amis en abordant les gens dans la rue. Une tactique louable, admettons, mais aux résultats plutôt négatifs. Il a découvert que les terriens se méfient des hommes souriants demandant aux inconnus de devenir ses amis. Voir simplement de passer du temps ensembles pour développer une relation agréable. Ils se content d'ignorer notre héros en quittant la queue du stand de hot-dog. Ou du cinéma. Ou des toilettes. L'alien essaie partout où il peut. C'est un éternel optimiste, abandonner malgré quelques échecs serait contre-nature.

Puis, finalement, il y a quelques jours, une solution lui apparue sous la forme d'un sous-fifre d'HYDRA. Entre deux Hail et levers de bras, activité principale de tous les membres de l'organisation voulant monter en grade, le jeune homme regardait son smartphone. Apparemment son combat incessant contre les capitalistes américains s'arrêtait à Apple. Jean-Akira fut immédiatement intéressé, n'en ayant jamais utilisé lui-même, dans le groupuscule on préfère les talkies-walkies et oreillettes. Parlons rapidement de la réputation de l'extraterrestre au sein de l'association nazie. Il est plus connu pour sa tendance à encastrer par erreur des sous-fifres dans les murs lors de séances d'entraînement que pour son amour envers la chantilly. C'est en connaissant la première rumeur que le jeune homme donna tout de suite son smartphone à l'agent, en espérant que ça lui éviterait une conversation avec. Ou plutôt ce qui vient après la conversation. Le mur.

Passons les longues scènes de compréhension, d'apprentissage de l’ustensile, pour en arriver à l'app qui nous intéresse. Promettant des rencontres, même au pire des losers, ça semblait pouvoir régler tous les problèmes du Héraut. Les matchs fusèrent, les conversations aussi. En général c'est à partir des conversations que les gens commençaient à disparaître. A ne soudainement plus répondre, réalisant rapidement qu'il y avait quelque chose de définitivement bizarre chez le vieux trentenaire. Sauf une. Elle ne semblait pas réaliser du tout.

Ainsi nous retrouvons l'alien dans un restaurant de Chinatown. Depuis sa découverte du quartier il y passait de plus en plus de temps, appréciant les espèces de longues tiges nommées nouilles. Sans avoir vraiment réussi à comprendre ce qu'elles étaient.

- Et donc ça pousse dans les camps... Mais pourtant y a pas de liquide, c'est tout terreux les camps, dans vos bols là, y a plein de liquide Argumentait-il face à un serveur regrettant d'avoir choisi cette table. Un homme attendant seul, il avait pris pitié. Était venu lui proposer un apéritif typique. Grave erreur. Faut pas adresser la parole à Jean-Akira, il risque de vous répondre. Heureusement pour le pauvre employé, Valentina choisi ce moment pour entrer.
" Euh Jean. C'est ça ? Désolée du retard. "
- Jean-Akira ! C'est composé, je crois que c'est français, c'est un petit pays dans l'Euro. Répondit aussitôt le Héraut, fier de pouvoir partager son savoir. Toi c'est Valentina, plutôt cool aussi, ça sonne bien. C'est toi qui l'a choisi ? Moi au début à H, au boulot hésita-t-il une seconde avant de se souvenir qu'il n'est pas censé parler d'HYDRA ils voulaient me nommer Steve Smith, mais j'ai dis non, je préférais mon premier.

Les cheveux poivre et sel, l’air un peu dans la lune, il bavardait avec le serveur quand Valentina posa son regard sur lui pour la première fois. Une lueur étrange dans le regard, il avait l’air déconnecté du monde qui l’entourait. Mais aussi joueur, presque naïf. C’était exactement le genre de regard qu’elle avait imaginé, vautrée sur le bar la veille. Le nez dans un douzième shot de rhum, la jeune femme s’était imaginé la photo bouger, dans ces portraits dans Harry Potter. La voix allait être suave, et l’homme gentleman.

Gentleman. Bon. Pourquoi pas, il était au moins habillé, si c’était ce qu’il fallait dire de son look. Pas vraiment à la pointe, pas vraiment en Westwood, on ne devinait pas l’ombre de la main d’un tailleur expert londonien mais plutôt celle d’une petite cambodgienne sous payé par Gap. Et ce n’était ni sa barbe de deux jours – Ou un et demi, pas sûr – ni ses chaussures couvertes de la poussière de la journée qui allaient lui infirmer la nouvelle : Il était pauvre. Ou plutôt, il n’était pas riche. Il n’avait pas donc pas eu pour lubie d’aller « voir du pays à Chinatown, dans ce petit restaurant typique où la gérante ne parle pas un mot d’anglais. ».

C’était plutôt le type qui avait choisi soit son boui-boui habituel, soit quelque chose au hasard. Rafraichissant. Rafraichissant après Edward Van Strifenberg et ses invitations dans les terrasses éphémères New-Yorkaises tenues par de grands chefs français. Ce con avait toujours eu le goût de venir aux tables des plus grands pour commander des fruits de mer stupides, qui ne nécessitaient donc aucune espèce de préparation. Bravo, le veau.

Adieu les cocktails avec 2militres d’alcool et plus de fruits exotiques qu’en Guadeloupe, Adieu le vin hors de prix mais absolument dégueulasse et sucré qu’elle ne supportait pas, Adieu la caille rôtie glacée aux marrons qu’elle avait eu le malheur d’appeler pigeon en riant grassement. Et aussi Adieu le dessert trop bon mais aux proportions pour enfant de 3 mois. Là on était chez Bao-Zhu qui attendait visiblement son heure pour envoyer tout ce qu’elle avait à ses clients dans ses plus beaux couverts en céramique peinte en bleu.

Contournant un chat d’un mètre cinquante en plastique doté d’une super animation qui lui faisait secouer la patte, elle s’échoua face à son rendez-vous alors que le serveur partait finalement avec plus de rapidité qu’elle ne l’aurait pensé. « Hein quoi ? Français ? Ouais je conna… » Elle voulut commencer à lui répondre mais il avait embrayé comme un furieux, animé par la conversation des prénoms qu’il avait lancé comme un pavé dans la mare. Drôle. Plus drôle que les risques et conséquences du marché financier le mardi 12 décembre. Elle le laissa continuer à babiller en hochant la tête, encore tenue par une gueule de bois qui se mua en nausée au moment où un plat passa au niveau de son nez.

Déjà, la gueule du truc. Ensuite l’odeur. La blonde posa sa main devant le son nez en tentant de se donner un air digne qui ne trompait personne. « Steve Smith ? C’est bien a chier ça fait SS. C’est un peu … » elle fit le signe de la moustache et leva le bras droit sans trop de pression au milieu du restaurant avant de se recaler sur sa chaise. « Non moi j’ai pas choisi on m’a appelée comme ça. Comme cette fête pour abrutis finis. » Roulant des yeux, elle jeta un regard interessé au verre de Jean-Akira ( c’était moche . ) avant de se décider pour un plus simple martini blanc. Soigner le mal par le mal. Puis un rendez-vous ne pouvait que mieux se passer un coup dans le nez. C’était une pré-vaseline relationnelle fort efficace en cas de blanc dans la conversation. « Tu fais quoi comme taf au fait je crois que j’ai mal saisi ? » Elle attrapa une chips à la crevette aussi grasse que croustillante et passa commande au serveur revenu sur la pointe des pieds. Elle le trouva un peu étrange avec sa façon de regarder partout sauf Jean-Akira. « Ben du moment que c’est mort » Elle haussa les épaules en rendant la carte au jeune asiatique excédé. « Et que c’est pas trop domestique.Ou pas trop mignon. » Nouveau roulement des yeux. Elle commençait à l’énerver singulièrement et en profitait largement. « Partons sur un bon gros truc à base de poulet » Trancha Valentina avant de se retourner vers Jean-Akira « Ou si tu as une suggestion particulière pour moi je te suis. Après tout t’as choisi, tu portes tes responsabilités. » La séduction et elle…

Il y a deux types de personnes dans le monde. Oh putain, quelle introduction pourrie, oubliez, je vais recommencer. Y'a pleins de types de personnes dans le monde, vous êtes tous uniques, de véritables flocons de neige, possédant chacun sa propre destiné, son âme et son esprit. Parmi eux, il y en a qui font des imitations de Hitler lors d'un premier rendez-vous. Je ne sais pas exactement quelle type de conclusion ça nous permet de faire sur ces personnes, mais une chose est sûre, elles appartiennent à leur propre catégorie bien à part. Et quand la destiné, rameutée dans la narration un peu plus tôt, se met en place, la personne se trouvant en face appartient à une seconde catégorie de gens. Celle de ceux qui rigolent beaucoup trop en voyant des imitations de Hitler. Au premier rendez-vous ou non, c'est plus flexible. Comme vous l'avez deviné, Jean-Akira Ivankov appartient à cette dernière. A la seconde catégorie, pas à la flexibilité. Ça il ne l'est pas top. Malgré sa capacité de voler, un avantage conséquent par rapport au reste de la planète, il reste d'une souplesse mineure, ne maîtrisant pas encore l'art ancestral qu'est l'aérobie. Pourtant il regarde régulièrement les émissions le dimanche matin.

Dans tous les cas, après la blague SS, notre héros manqua de s'étouffer dans son verre. Avalant difficilement sa gorgée. Pour ensuite ajouter
- Tu l'imites drôlement bien ! Pour le boulot on m'a fait regarder pleins de vidéos de lui L'alien se contenta de dire "lui", en remarquant qu'il avait oublié le nom du type en question. Hilta ? Fliter ? Crotte, si les boss de HYDRA lui passent un quizz, ça ne sera pas glorieux. Mes patrons ils préfèrent l'autre avec son crâne bizarre, mais lui aussi ils en parlent beaucoup. Permettez moi d'être impressionné pendant un instant. Je le narre depuis un moment l'extraterrestre, et c'est rare qu'il réussisse à ne pas avouer directement travailler pour des nazis. Bon, il est pas ultra subtil là, mais c'est déjà un sacré bond en avant.
« Comme cette fête pour abrutis finis. » Le Héraut, n'ayant pas remarqué qu'elle était passé à autre chose, la discussion sur les noms, mis de côté cette information. Prêt à chercher des informations sur une fête nazie quand il rentrerait chez lui. Ils auraient bien besoin de se lâcher un peu à HYDRA, arrêter d'être aussi sérieux cinq minutes.

Puis vint une question plus fâcheuse. Celle que notre protagoniste redoute lors de toute interaction sociale. Valentina en demandait plus sur sa profession. Effectivement, l'agent avait découvert que répondre "je suis un tueur pour HYDRA et infiltré au SHIELD" lui amenait un peu trop de problèmes. Alors il se pencha sur une solution. Trouver quelque chose qui passerait mieux, qui ferait moins lever les sourcils. Ce qu'il ne trouva pas évidemment, c'est un couillon. A la place, il se contente de répondre
- Je suis un... genre de gros-bras avec un grand sourire. Fier d'utiliser une expression terrienne. On m'envoie taper des gens et tout, parfois en protéger d'autres. C'est marrant comme job ! Comme moyen de s'en sortir, Jean-Akira avait développé cette réponse. Pas entièrement du mensonge, pas complètement la vérité. C'était déjà mieux que de devoir improviser une explication à un métier inventé, comme il faisait autrefois.

Une fois le serveur arrivé, l'entité cosmique laissa d'abord la jeune femme parler. Malgré son intérêt soudain pour les restaurants chinois, il n'y connaissait pas grand chose. Et préférait l'entendre commander, avec l'éventualité d'ajouter une remarque à la fin, pour faire semblant de s'y connaître. Le poulet... Une rapide réflexion donna deux résultats : un type de caillou utilisé comme arme par les aborigènes envahisseurs dans un lointaine galaxie, que Jean-Akira s'était pris dans la tronche de nombreuse fois. Ou l'animal terrestre ressemblant à tous les autres oiseaux terriens. Ils sont pas très originaux niveau faune et flore, avait remarqué l'alien.
« Ou si tu as une suggestion particulière pour moi je te suis. Après tout t’as choisi, tu portes tes responsabilités. »
- Le poulet c'est bien ! Une fois répondu, l'agent réalisé que c'était un peu faible comme "remarque pour faire semblant de s'y connaître". Et un peu d'alcool avec peut-être ? T'as quoi ? Le Héraut pensait à une bouteille pour la table, en ignorant les verres que les deux buvaient déjà. Le serveur de son côté, mis du temps à s’apercevoir que le "T'as quoi ?", s'adressait à lui. Il se lança ensuite, sans doute par vengeance, dans une énumération ultra-rapide de tous les alcools disponibles. Bien embêté, mais ne voulant pas révéler qu'il n'y connaissait en réalité rien, Jean-Akira demanda à son éventuelle future amie
- On fait quoi, on prend une bouteille de chaque ?

Une bouteille de chaque. Bah oui bien sur après la nuit qu'elle venait de passer, c'était comme décider de se faire une traversée de l'Atlantique à la nage le lendemain du marathon de Boston. Elle réprima un petit hoquet parfaitement incontrôlable et noya son avis dans les chips à la crevette, qui tombèrent plus en miettes sur son chemisier qu'autre chose.

La décoration était à chier. Mais part à chier, Valentina songeait même que c'était volontaire. Un repoussoir à Babtous et autres ethnies, pour ne garder que les purs, les durs. Les habitués des bouddhas flippants, des chats gigantesques et des aquariums si troubles qu'on se demandait si ils n'étaient pas là avant même l'ouverture du restaurant. D'ici quelques temps les poissons eux aussi évolueraient en mutants pour sortir lentement de leur cage de verre leurs yeux globuleux révulsés.

Ou peut-être pas. Donc Jean-Akira était un genre de gorille, à la différence que son sens de l'éthique se rapprochait plus du néant que de la protection rapprochée. En fait c'était carrément l'inverse, c'était l'attaque rapprochée. Etait-elle a même de juger ? " ... le mec avec un crâne chauv... attends tu bosses pour une milice nazie ou j'ai mal interprété?" elle haussa un sourcil jusqu'au ciel. Du moins il lui sembla que ce dernier s'envolait joyeusement vers les étoiles.

" J'ai du mal à te suivre, et si c'est pour le côté mystérieux ... je préfère autant pas qu'on discute trop longtemps d'un type qui s'est amusé à nous détruire l'histoire contemporaine, hein. Contentons nous du poulet." brut de décoffrage, et plutôt directe. Elle attendit que le serveur reparte pour aviser la carte une nouvelle fois. Sans alcool ... non quand même pas.

" Allez on prends du saké" décida t elle en passant commande le bras levé. Pas très discrète; mais vu comme ça gueulait déjà depuis les cuisines elle ne faisait pas tâche dans ce paysage... Nature. Oui Nature voilà .

" Moi j'ai pas besoin de travailler . " Ce qui n'était pas faux vu l'état de ses comptes en banque. Rentière, et encore. Enfin, la rente d'armes à feux. En bref, elle ne se mêlait pas trop des affaires de papa pour l'instant. " Je ne pensais pas que tu faisais ce métier t'as pas l'air de botter des cul de prime abord, mais on peut se tromper."

Le serveur revint des cuisines avec deux sortes de bouillons. Du poulet semblait se battre en duel avec des légumes, des nouilles et quelques herbes difficilement identifiables. Etais-ce une patte de poulet qui flottait là ? Pourquoi savoir. Elle prit sa cuillère et se pencha. D'abord le saké, après la bouffe. Une fois servis, la bouteille posée sur la table, Valentina se recula un peu dans son siège. " Tu cherches l'amour via Tinder alors, et tu ... Je veux dire pourquoi moi ? Je suis pas trop jeune pour toi ? "

Le fait est que les nazis ne sont pas très bien vus en société. Peu importe la société en question d'ailleurs. Et si vous vous retrouvez dans une qui au contraire les apprécie, vous avez certainement fait de mauvais choix au cours de votre vie et je vous invite à les remettre en question. Alors les groupuscules qui supportent l'idéologie ont tendance à en pas le dire haut et fort. Ou du moins pas explicitement. C'est, étonnement, le cas du nouvel HYDRA. Si l'organisation a définitivement été formée par des nazis, et en comporte toujours en son sein, ils ne proclament plus l'être. Au contraire disent que le groupe a changé, comme le reste du monde, au fil des années et qu'il a aujourd'hui aussi peu de lien avec le nazisme que Greenpeace. Bien sûr tout cela est bien trop compliqué à retenir pour notre héros. Ainsi Jean-Akira, connaissant le passé de ses employeurs, a tendance à faire des amalgames. Oublier que le nazisme, c'est justement du passé. Aujourd'hui ils se content de vouloir régner sur le monde en tuant tous les ennemis. Rien de bien méchant, donc.

Cependant, même Ivankov est capable de réaliser quand il dit une connerie. Enfin pas toujours, ne le surestimons pas. Ça lui arrive on va dire. Alors, dans ces moments, ne sachant pas toujours ce qui est la connerie dans ce qu'il a raconté, il s'efforce de changer de sujet. Ou plutôt, de parler de pleins de trucs pour que son interlocuteur soit perdu et finisse par passer à autre chose.
- Non, non, ils sont pas nazis. C'est mon patron qui adore les vieux trucs, il a plein d'affiches de propragande, c'est comme ça qu'on appelle les posters avec des types moustachus, des vieilles voitures et tout. Moi ça m'intéresse pas des masses les vieux machins, j'préfère le nouveau, sur Terre c'est souvent plus rigolo.

Le Héraut s'impressionna lui-même dans sa capacité à improviser. Il avait vu un documentaire sur les dictatures il y a peu, et s'efforça de l'utiliser. Baser son blabla sur du réaliste, en voilà une sacré techniques d'espion ! Comme quoi il apprend un minimum. Alors que Valentina changeait de sujet, notre protagoniste se contenta d'écouter. Pour une fois. Depuis qu'elle s'était assis il n'avait pas arrêté, faut faire des pauses parfois. Jusqu'à ce qu'elle commande à boire et continu sur le sujet du travail.

Pas besoin de travailler, en voilà une bonne invention terrienne. Dans l'espace, tout le monde est toujours occupé. Quand on est pauvre on bosse, quand on est riche, ça veut généralement dire qu'on gouverne. Pas de temps à prendre à ne rien faire. Si l'alien apprécie son boulot, essentiellement se battre et tuer des gens énervants, il se verrait bien aussi glander. Peut-être sur une plage, comme ils le font dans les magazines américains. Lorsque la jeune femme fait remarquer à l'extraterrestre qu'il n'a "pas l'air de botter des culs" ce dernier rigole rapidement. C'est pas faux en même temps, physiquement il n'a rien d'impressionnant. Ce qui importe c'est l'intérieur. Surtout quand l'intérieur est composé de pouvoirs cosmiques.
- Ahah, pourtant j'suis super fort ! Etre payé pour botter des culs, c'est top. En plus c'est cool l'Amérique parce que y'a pleins d'autres gens vachement forts, on s'y amuse plus que dans les autres pays. T'aimes bien ça toi, te battre ? C'pas mon truc préféré, hein, mais de temps en temps c'est sympa, avec les bons gens.

Puis vint finalement la nourriture -et plus d'alcool-. Essayant de paraître bien élevé, l'entité cosmique copia la façon de faire de son rendez-vous. En pensant qu'elle l'est, elle, bien élevée. Donc il commença par le saké. Jusqu'à ce que Valentina lance le sujet de l'amour. Encore un truc très terrien ça. Sur sa planète d'origine, on se mariait plus pour le principe qu'autre chose. Jean-Akira lui-même avait perdu sa femme lors de la destruction de la planète en question par son ancien boss.
- Ouais l'amour, ça a l'air sympa, alors je me suis dis pourquoi pas... Et toi, t'étais plus cool que les autres gens avec qui je parlais, ils étaient tous un peu cons les autres... J'crois pas qu'on ai une grande différence d'l'âge, moi j'dois avoir Une pause pour calculer. Comprenez le, obligé d'apprendre le fonctionnement des années terrestres et leur équivalent depuis sa galaxie natale ... 32 ans ? On doit être assez proches !

Une conversation pour le moins gênante se terminé dans une grand diatribe de Jean-Akira qui finit par avoir l'amabilité de la fermer pour écouter Valentina. Cette dernière, au fond, se foutait des sujets amenés sur la table. Elle n'était pas la dernière a pratiquer l'humour noir, en revanche elle était un peu septique quand à la carrière professionnelle de notre alien. Ca faisait un peu rétro, tout ça. Peu importait.

Saké. Amen. Grande gorgée et remontées de la soirée de la veille. Avait-elle vraiment fourré sa culotte dans la bouche d'un serveur mal avisé de lui dire de descendre de la table d'où elle dansait ? Hum. Sans doute, mais au fond, c'était bien mérité, il avait même parlé d'un ton presque hautain. Et Valentina n'aimait pas les personnes hautaines, bien qu'elle le soit parfois, à l'occasion. Lorsqu'elle n'était pas d'une vulgarité que seuls les puissants pouvaient se permettent pour qu'on en rie et non qu'onces juge comme des raclures de bidets. Un fils de pute sonnait mieux dans une bouche aux bagues en or que dans celle d'un pauvre, le monde était ainsi fait.

" Me battre ? Je sais pas." elle haussa les épaules, pas la peine de lui avouer qu'elle cassait des culs à l'occasion pour retrouver sa belle. Sa belle, c'était Elektra, son âme soeur. Ame et soeur. Ame car elle portait en elle le même manque de décence et de conscience que la blonde, soeur pour des raisons plus qu'évidentes. Puis arrivèrent les réponses sur l'amour. Ah oui merde l'amour c'était ce qui les avaient réunis dans cette pièce surchauffée aux relents de viandes marinées. Assis sur ces banquettes qui avaient trop vus d'obèses et dans laquelle s'enfonçait la mince Valentina, gênée de ce contact trop intime avec le bois du plateau de la chaise. Ca faisait mal. Elle oublia rapidement la sensation avec une autre gorgée, sans même goûter son poulet. Commet toutes les mondaines, elle ne mangeait pas au restaurant ce qu'on lui proposait mais s'enfilait un Mac Donald's a des heures improbables en ajoutant un supplément mayonnaise. C'était assez fantastique d'avoir vu tant de fois son père soupirer devant sa femme et sa fille dont les assiettes hors de prix retournaient en cuisine finir leurs jours dans la poubelle.

Puis arrivée à la maison la petite se jetait sur un paquet de princes en se vautrant devant leur télévision immense. Un classique, un "je sais emmerder le monde". Puis elle ne savait pas bien d'où pouvait venir cette volaille, ni ce qui avait été ajouté par la suite. S'il y avait une vérité universelle c'était bien qu'on avait plus de chances en plus de faire une indigestion dans un traiteur chinois que dans un étoilé. Heureusement, après les restaurants chinois, japonais, vietnamiens et Thaïlandais, les chinois n'avaient jamais eu la bonne idée de se mettre à ouvrir des mexicains. Valentina pensait sincèrement que l'alliance du mal se solderait par une tourista générale.

" 32 ans ca va. J'ai des amis russes qui sortent avec des filles de l'âge de leurs petites-filles alors..." Elle songea aux quelques magnats qui trainaient en ville, et à la horde d'enfants qui leur collaient aux basques en piaillant en slave, cigarettes à la bouche et vodka dans la main. Belle patrie.

"En général je vais pas sur les applications a part si j'ai vraiment très faim, un soir." Allait-il comprendre? Allait-il saisir la subtilité de son propos, ce vieux très terre à terre. " Enfin je voulais dire que... ouais je sais pas trop. Tu vois moi aussi j'ai jamais été très prise par les torrents de l'amour pourtant j'en ai vu qui se prenaient vraiment la tête. Puis l'application me faisait marrer on dirait un supermarché de gens. Et t'es drôle. " A tes dépens avait-elle envie d'ajouter, mais une belle gorgée d'alcool fit redescendre la remarque au fond de son gosier. " C'est vraiment dégueulasse ce plat..."

Jean-Akira appréciait de plus en plus son interlocutrice. Elle avait des amis, apparemment. Russes ou non, c'était un avantage certain pour quelqu'un d'aussi social que notre héros. Ayant du mal à s'en faire seul, profiter de ceux des autres était une solution remarquable. Se créer un lien en travaillant à fond, puis l'utiliser comme moyen de s'intégrer subtilement sans que personne ne remarque. Une technique un peu trop fourbe pour que notre protagoniste y pense, évidemment, mais qui s'installait tout de même dans son subconscient. Ainsi il notait "a des amis", inconsciemment, comme un bon point. En plus les amis en question semblaient avoir eux-mêmes des connaissances, sous la forme de "filles de l'âge de leurs petites-filles". Parfait, tout un tas de potentiels futurs potes. L'alien ratait évidemment l'aspect négatif de la remarque, ignorant la partie où des vieux se taper des jeunes, pour se concentrer sur ce qui l'intéresse. Une capacité particulièrement utile, permettant de rester optimiste en toute situation.

Puisque nous parlons des choses qui passèrent au dessus de la tête de l'extraterrestre, abordons la réplique suivante de Valentina. Croire qu'il serait capable de comprendre une métaphore était surestimer l'entité cosmique. Elle se contenta de sourire naturellement en terminant son verre. Ivankov ne savait pas qu'on pouvait commander de la nourriture sur l'application, mais retenait. Toujours pratique, la flemme de cuisiner étant un statu touchant tous les humanoïdes. La suite fut heureusement plus compréhensible pour notre pauvre abruti. Il comprenait plutôt bien sa partenaire, l'amour le laissant dubitatif depuis toujours. Sans doute à cause de l'aspect "enfoiré d'égocentrique notoire", particulièrement important dans sa personnalité. Découvrir une application dédiée au sentiment avait gagné sa curiosité, mais rien de plus.

"Puis l'application me faisait marrer on dirait un supermarché de gens. Et t'es drôle." Jean-Akira rigola d'abord face à la comparaison, impressionnant tous les lecteurs en l'ayant comprise.
- Trop, sauf qu'on peut pas les entasser dans un caddie et partir sans payer. Une réponse étrange, accompagnée par une soudaine réalisation. L'alien, lors de ses voyages spatiaux, visita une planète dotée de supermarchés "de gens". Installés dans les rayons, les extraterrestres accompagnés de leur prix, composition, prix pour le kilo inscrits sur un écriteau, se faisaient acheter par des ménagères. La plupart traînant leurs gamins chiants d'une main et conduisant le caddie de l'autre. J'ai déjà visité un en fait ! Dans, heu, un autre pays, un supermarché où ils vendaient des types et tout... Jugeant qu'après les remarques sur le nazisme, ajouter un peu d'héroïsme serait une bonne idée, l'agent continua On l'a fait fermer par le Gal... Ractus, une association de là bas, c'était fou, y'avait même des caisses automatiques.

Une fois ses paroles terminées, notre héros profita du moment pour commencer le plat. Une nouvelle parenthèse cosmique est maintenant nécessaire. La capacité d'utiliser la puissance de l'univers permet à un être de survivre dans la plupart des conditions. Sous l'eau, sous la lave, voir dans le vide intersidéral. La nécessité de se nourrir et de boire disparaît aussi, la force cosmique étant bien assez pour faire tenir n'importe qui. Donc lorsque les utilisateurs décident de manger, c'est essentiellement pour le plaisir. Ce dernier peut être légèrement entaché quand ce qu'on leur sert est immonde.
"C'est vraiment dégueulasse ce plat..."
- Ouais, c'est méga-crado, on dirait même pas de la nourriture. On se casse ? Notre héros continua avec des gestes, sortant d'une de ses poches un sac en plastique rempli de pièces, qu'il déposa sur la table. En préparation à la soirée, le Héraut décida d'ouvrir une machine à café publique, pensant qu'il s'agissait d'un distributeur de billet. Et que l'on se servait dans les distributeurs en tirant simplement sur la serrure pour ramasser de l'argent. C'est donc avec une quarantaine d'euros en petites monnaies que notre protagoniste paya pour le repas. Avant de se lever et de demander Tu veux aller où ?