A new damaged one to care about | ft. Aidan

« Non Mozart ! Tu peux pas faire ça là ! » Paniqué, j’attrape le petit chiot qui ne m’avait même pas entendu. Essayant de la maintenir le plus loin possible de mon corps, je me précipite vers la terrasse pour essayer d’endiguer un maximum le… problème. Quand enfin je dépose la petite chienne dans la terre de l’une des plantes en pot qui habille la terrasse, le flux est presque tari. Les lèvres pincées, je regarde la petite boule de poils. Aidan va me tuer s’il rentre et que le chiot que je lui ai un peu refilé de force a déjà fait des siennes. « On va essayer d’éviter de se faire transformer en tête de lit par Aidan, toi et moi hein ? » Je la gratouille derrière les oreilles, lui arrachant un léger sursaut alors qu’elle était absorbée par l’observation attentive de la plante qui se déploie tout au-dessus d’elle.

« Graeme, garde un œil dessus. » Je jette un bref regard à mon chien avant de les laisser tous les deux seuls sur la terrasse. Je ne suis pas Gabriel mais je sais me faire comprendre de Graeme. Je galère un moment avant de trouver le matériel qui va me permettre de pouvoir nettoyer le chemin d’urine que m’a laissé le plaisir de tracer là au chiot qui va désormais vivre ici. Je m’active, essayant de passer rapidement le sol à l’eau pour le nettoyer de toute trace de taches. Cependant, pour ça, il faudrait que je sache exactement quel produit je suis sensé utiliser pour le sol. J’observe les récipients avec un air un peu circonspect.

Je finis par en isoler trois qui ont l’air d’être pour le sol. Je finis par en choisir un au hasard, en déversant une bonne partie du contenu dans mon seau pour ensuite aller passer le mop sur le sol de manière un peu anarchique, essayant surtout de faire vite. Les tâches ménagères, c’est pas vraiment mon fort. En même temps, j’ai vécu à la rue si longtemps que j’en avais oublié le concept de devoir laver son lieu de vie. J’entretiens très bien mes affaires mais j’ai encore du mal à prendre automatiquement le pli de nettoyer. Cela dure plus longtemps que je ne l’aurais voulu mais finalement, je peux enfin aller ranger le matériel et rejoindre les chiens qui sont toujours sur la terrasse.

Je suis en train de jouer avec Mozart quand j’entends du bruit à l’intérieur. Le chiot est en train de me mâchouiller gentiment le poignet quand j’aperçois la silhouette d’Aidan à l’intérieur. Il faudra qu’on lui apprenne à ne pas faire ça. Je tape gentiment sur le museau du chiot et je lui fais les gros yeux. Elle finit par me lâcher et pour la féliciter, je la prends dans mes bras. Gabriel est suffisamment inquiet à l’idée de devoir donner les chiots à des connaissances à nous, je vais au moins m’assurer que ceux qui soient proches de moi soit bien éduqués et bien soignés.

Je retourne à l’intérieur, Mozart dans les bras. Joueuse, elle vient me lécher la joue alors que je rejoins Aidan au salon. « Ton colis est arrivé. » Ce genre de scène… Sort totalement de ce à quoi lui et moi sommes habitués. On a notre quotidien mais il est plus rythmé par le sang, l’adrénaline et les engueulades que par l’arrivée d’un chiot à la maison. Je m’approche de lui avec la petite boule de poils dans les bras. Mozart est sans doute le chiot de la portée sur laquelle j’ai eu un coup de cœur. J’aurais eu une situation plus stable que je l’aurais gardée pour moi. Mais au vu de mon budget et de ma vie chaotique, je ne peux pas me permettre de prendre son éducation en charge.

C’est un peu pour ça que j’ai presque supplié Aidan pour qu’il s’occupe d’elle. Comme cela, pour le temps qu’il me reste à squatter ici, je pourrais avoir Mozart pas très loin et la voir grandir. En parlant d’elle, elle s’agite dans mes bras. Alors je la retourne pour la présenter à mon ami d’enfance pour qu’il la prenne à son tour. Je ne peux m’empêcher de sourire presque bêtement alors que je le vois la prendre dans ses bras. « Je m’excuse d’avance, elle n’est pas encore tout à fait propre. Mais ces choses s’apprennent avec un bon dressage. »

Et merde ! Me voilà coincé avec un chiot, et sourd qui plus est. Comment je vais gérer ça ? Et puis, c'est une femelle, il va donc falloir la stériliser si je ne veux pas me retrouver dans la même situation que Niall. Mon portable vibre une dernière fois mais je ne daigne même à le regarder. Si c'est pour voir ce fourbe jubiler de m'avoir fait céder, non merci. Le pire, c'est qu'il savait que j'allais craquer. Utiliser l'argument de la confier à la Princesse Feu au Cul, c'était petit. Très petit. Il va falloir que je lui en touche deux mots quand je rentrerai. Il faut qu'il arrête d'utiliser son pote comme un moyen de pression pour obtenir tout ce qu'il veut.

Je soupire alors que j'arrive devant une animalerie. J'en reviens toujours pas que je me suis fait avoir aussi facilement. Après tout, si son chien a engrossé la chienne de son amant, c'est leur problème. Attendez… Son amant ? Niall ne m'avait pas dit qu'il s'était trouvé quelqu'un… Je suis content pour lui, ça va lui faire du bien de décompresser un peu. Il faudrait que je pense à lui demander de qui il s'agit. Bien sûr, s'il ne veut pas me le dire, tant pis, c'est pas un souci...Tant qu'il ne s'agit pas de Graham. Rien que d'imaginer Niall et cette diva se rouler une pelle, je me sens pas bien. Et puis, sérieusement ? Graham en amant ? Du coup, ça voudrait dire qu'on risquerait de se recroiser… Bon, je pense que Niall m'aurait prévenu s'il s'agissait de Graham… Hein, il l'aurait fait ? Je la porte pas spécialement dans mon cœur la diva alors, ce serait apprécié que Niall ne l'ai pas dans le cul.

Je rentre à l'intérieur de l'animalerie, chassant d'un revers de la main mes inquiétudes sur la vie sexuelle de Niall pour le moment. De toute façon, je suis pas sûr de vouloir savoir avec qui il passe ses nuits. Je fais un peu le tour, marchant au hasard des rayons. Pour Le Chat, je n'avais pas eu besoin d'acheter du matériel spécifique, c'est un chat, ça fait sa vie et c'est tout. Là, ça va être chiant. J'arrive au rayon des laisses et des colliers. Je préviens, même si c'est une femelle, hors de question que je prenne le rose à paillettes. Rouge, c'est bien rouge ? Allez, va pour le rouge. Je parcours le reste du rayon du regard après avoir attrapé le collier en question. Il faut une laisse maintenant. Heureusement, tout est côte à côte et je trouve facilement ce que je veux. Pour l'instant, ce sera bon.

J'ai un peu de mal à retrouver ma voiture. Depuis l'accident au musée, j'ai changé et j'en ai acheté une nouvelle mais j'ai encore un peu de mal à m'y faire. J'aimais bien l'autre mais je ne pouvais pas la garder. Pas après ce qui est arrivé à Niall. Je m'installe derrière le volant et je pose mes achats sur le siège passager. Je démarre avant de jeter un regard compulsif dans le rétroviseur. Depuis cette nuit, c'est devenu un tic, je ne peux pas m'en empêcher. Je m'attends toujours à voir les sièges ensanglantés et mon ami d'enfance agoniser. Je suppose qu'il va me falloir du temps avant que je ne cesse ce manège à chaque fois que je monte dans un véhicule.

J'entre dans l'appartement et je dépose mes achats sur le comptoir. « Ton colis est arrivé. » Je tourne la tête vers Niall pour le voir me rejoindre avec une petite boule de poil dans les bras, suivi de près par Graeme. Mon regard croise celui de mon ami d'enfance. Il est content, hein. Il a réussi à me faire céder et voilà que je me retrouve avec une nouvelle boule de poils à la maison. Mes yeux se posent sur la boule de poils en question. Je dois bien l'avouer, elle est adorable. On dirait une petite peluche. C'est Le Chat qui va faire la gueule. Elle commence à s'agiter et Niall me la tend pour que je la prenne dans mes bras. Elle me léchouille la main. Je me retiens de justesse de tomber complètement gaga devant. Il faut que je me reprenne, je suis pas content de la voir ici. Pas question de montrer à Niall que ça me fait plaisir de l'avoir. Ou du moins, pas tout de suite.

« Je m’excuse d’avance, elle n’est pas encore tout à fait propre. Mais ces choses s’apprennent avec un bon dressage. » J'arque un sourcil. Oui, évidemment, j'avais oublié ce détail. Putain mais dans quoi je me suis embarqué ? « Justement, vu que mademoiselle est sourde, il va falloir qu'on trouve quelque chose » Je repose délicatement le chiot sur le sol. Je me dirige vers le sac et je fouille à l'intérieur pour en sortir le collier. « On peut commencer par ça » Je m'accroupis devant elle pour lui attacher autour du cou. J'ai bien fait de prendre le rouge, ça lui va bien. Je lui papouille la tête. Elle est juste à croquer. « Il faut lui trouver un nom » Je relève la tête vers Niall, je roule des yeux quand je vois le regard qu'il me lance « Promis, je ne l'appelle pas Le Chien » Je ne comptais pas le faire, j'ai l'intention de lui trouver un vrai nom. Je le reprends dans mes bras et je touche sa truffe du bout du doigt « J'ai envie de l'appeler Lullaby, t'en penses quoi ? » Je sors mon portable, j'avais oublié que j'avais demandé à Niall si le chien avait déjà un nom. Mozart ? Hum… Je suis pas convaincu par celui-là. Surtout que le chiot est une femelle. Je remonte un peu la conversation. J'hésite à lui demander, après tout, c'est sa vie privée, ça ne me regarde pas mais la curiosité est trop forte « Alors… Cet amant, comment il s'appelle ? » Pas Graham. Tout ceux que tu veux mais pas lui.

« Justement, vu que mademoiselle est sourde, il va falloir qu'on trouve quelque chose » Une fois le chiot à nouveau sur le sol, elle va tout de suite se réfugier dans le giron de Graeme. Je suppose qu’il va lui falloir un petit temps pour s’adapter à l’appartement et à nous deux. Et au chat aussi… Chat que je n’ai pas vu depuis que je suis arrivé ici avec la petite. Je suppose qu’il va lui falloir un temps d’adaptation. « Je pense qu’il existe des dressages particuliers. Et, après tout, elle n’est pas totalement sourde. Juste partiellement. » « On peut commencer par ça » Je l’observe lui mettre le collier et je retiens une grimace. Je sais que c’est son truc de mettre un collier à ses animaux. Il l’a fait au Chat et maintenant il le fait à elle. Mais c’est un concept que j’ai du mal à saisir. Je n’ai jamais eu besoin de cela avec Graeme. Un chien n’est pas un objet décoratif, c’est un individu qui a droit à sa liberté. Mais je ne dis rien. C’est moi qui ai pratiquement forcé la main d’Aidan pour qu’il la prenne sous son aile, ce n’est pas pour commencer dès le début à critiquer ses choix de dressage.

Cependant, je m’adoucis en voyant une lueur de tendresse dans le regard du mutant. Difficile de résister en effet. Je repense encore à la scène d’adieu déchirante que m’avait fait Gabriel quand je suis parti avec elle un peu plus tôt dans la journée. Il faudra que j’aille le voir pour m’assurer que le départ des chiots ne le déprime pas trop. « Il faut lui trouver un nom. » Et voici une nouvelle information qui me faisait un peu peur. Je lève un sourcil et je pose le regard sur l’écossais. Qu’il essaye seulement de l’appeler ‘le Chien’ et il aura affaire à moi. « Promis, je ne l'appelle pas Le Chien. » Je lève un sourcil. Oh. Vraiment ? Je suis curieux de voir ce qu’il va lui trouver. Lui qui n’a pas été capable de trouver un nom pour trouver un vrai nom à son chat en tout ce temps. « J'ai envie de l'appeler Lullaby, t'en penses quoi ? » J’observe le chiot qui a les quatre pattes en l’air et qui essaye d’attraper la queue de Graeme. « C’est sympa comme choix… »

Je gratouille la tête de Graeme alors que mon ami sort son téléphone pour y faire je ne sais trop quoi. « Alors… Cet amant, comment il s'appelle ? » La question me surprends et pas qu’un peu. Cela m’arrache tout de même un léger sourire un brin moqueur. « Depuis quand les hommes avec qui je couche t’intéressent ? Je ne savais pas que ma vie sexuelle était une curiosité pour toi. » Je vais m’asseoir dans le fauteuil, suivit de près par mon chien qui vient poser sa truffe sur ma cuisse dans l’attente de plus de caresses que je ne rechigne pas à lui donner. « Il s’appelle Gabriel, c’est le vétérinaire qui s’occupe de Graeme depuis que j’ai pu commencer à me le permettre. La première fois, il m’a fait payer en me demandant mon numéro de téléphone. Mais notre relation, c’est plutôt récent. » Je pourrais lui sortir tous le blabla sur sa mutation, sur sa connexion si particulière avec les animaux mais je n’en vois pas l’intérêt. Je suppose qu’en mentionnant son job, Aidan comprendra comme un grand garçon qu’il a intérêt à bien s’occuper de Lullaby.

« D’ailleurs, il a demandé à ce que les chiots soient soignés là où il bosse. Il est du genre à s’attacher très vite aux animaux. Je te dis pas les adieux déchirants auxquels j’ai assisté quand je suis passé chercher Lullaby tout à l’heure. Je t’ai écrit l’adresse et le numéro de téléphone sur un post-it sur le frigo. » Mon regard quitte mon chien et je me penche pendant qu’il s’avachit devant moi, allant lui gratouiller le ventre. « Et toi ? T’essayes de recoller les morceaux avec Mouse ? » J’avais plutôt mal prit leur aventure au début mais, au final… Quand on remet un peu les choses en perspectives, même si ça me bouffe de savoir qu’ils m’ont volontairement caché leur relation, elle aurait pu tomber beaucoup plus mal qu’avec Aidan. C’est pas le mec le plus parfait de la Terre, je m’engueule souvent avec lui pour des conneries mais c’est un gars bien et juste.

Il fait pas toujours les bons choix mais personne ne fait toujours les bons choix. Je doute même que le sacro-saint Capitaine America fasse toujours les bons choix. Alors qui sommes-nous, simples petits mutants que pour prétendre être capable de ne pas se planter ne serait-ce qu’une fois de temps en temps ? On peut dire que, aujourd’hui, j’ai plus ou moins fait la paix avec le fait qu’ils aient été amants il y a de cela plusieurs années. Mais je n’accepterais pas d’être tenu à l’écart une nouvelle fois. « Par contre, si d’aventure tu avais envie d’en apprendre plus sur mon amant… Je te jette par la fenêtre si tu lui dis pour Icare ou pour la Confrérie. Il… C’est un concentré de pureté et de naïveté, ok ? A aucun moment il ne doit savoir ce que je fais vraiment pour vivre. C’est… Il me permet de décrocher de temps en temps de cette vie de fou qu’on mène. Il m’apaise, il me fait du bien. Vient pas tout faire foirer ok ? »

« Depuis quand les hommes avec qui je couche t’intéressent ? Je ne savais pas que ma vie sexuelle était une curiosité pour toi. » Sa réponse ne me surprend pas mais installe un léger malaise. « C'est pas une curiosité… Tu as mentionné un amant alors, je demande, c'est tout. » J'esquisse un léger sourire « Il ne fallait pas préciser si tu ne voulais pas avoir de questions » C'est légèrement intrusif, je sais mais, je suis un peu curieux tout de même. Et puis, je lui aurais demandé d'où venait le chien donc, au final, on en revient au même. Il va s'asseoir sur le fauteuil et je vais de même en m'asseyant sur celui en face de lui. J'installe Lullaby sur mes genoux et elle joue avec ma main.

« Il s’appelle Gabriel, c’est le vétérinaire qui s’occupe de Graeme depuis que j’ai pu commencer à me le permettre. La première fois, il m’a fait payer en me demandant mon numéro de téléphone. Mais notre relation, c’est plutôt récent. » Je lâche un soupir de soulagement malgré moi, c'est pas Graham. Au fond de moi, je savais que ça ne pouvait pas être lui mais avoir la confirmation, ça fait du bien. Et puis, Niall est bien tombé. Ce mec est vétérinaire donc il doit être plutôt stable et je suis content pour lui qu'il ait quelqu'un comme ça dans sa vie.

« D’ailleurs, il a demandé à ce que les chiots soient soignés là où il bosse. Il est du genre à s’attacher très vite aux animaux. Je te dis pas les adieux déchirants auxquels j’ai assisté quand je suis passé chercher Lullaby tout à l’heure. Je t’ai écrit l’adresse et le numéro de téléphone sur un post-it sur le frigo. » Je hoche la tête, l'écoutant à peine, tandis que je joue doucement avec le chiot. Elle finit par s'endormir, fermant ses petits yeux. « Et toi ? T’essayes de recoller les morceaux avec Mouse ? » Je relève la tête d'un coup vers Niall, captant soudain toute mon attention. Je grimace légèrement, le jour où Mouse est revenue dans nos vies, ça s'est très mal passée. J'ai pris des droites, on s'est balancé des horreurs et des choses qui auraient du être avoué en douceur ont été lancées comme des insultes. Bref, c'est pas un bon souvenir. « Je ne pensais pas que tu accepterais notre relation... »

Cependant, j'ai pas envie de laisser tomber Maisie. On s'aime toujours, je le sais, et ça, Niall n'y changera rien. Heureusement, sa question n'insinue rien de tout ça. Au contraire. « Ouais… Disons que c'est un peu compliqué. J'ai envie de reprendre notre relation là où elle s'était arrêtée mais, en même temps, c'est impossible avec Icare. Toujours à courir partout, toujours à surveiller ses arrières et je n'ai pas envie que Maisie côtoie ce milieu » Je marque une pause « Imagine que quelqu'un qu'on a volé la prenne pour cible pour essayer de m'atteindre… S'il lui arrivait quelque chose... » Je ne finis pas ma phrase, on sait tous les deux ce que je veux dire. Voilà pourquoi c'est compliqué. D'un côté, je veux reprendre notre relation et de l'autre, je me refuse à le faire. Niall lui, peut se le permettre, il n'est qu'un rouage dans la grande machine qu'est Icare. Et je suis heureux pour lui, sincèrement. Même s'il y a sûrement un peu de jalousie là-dedans.

« Par contre, si d’aventure tu avais envie d’en apprendre plus sur mon amant… Je te jette par la fenêtre si tu lui dis pour Icare ou pour la Confrérie. Il… C’est un concentré de pureté et de naïveté, ok ? A aucun moment il ne doit savoir ce que je fais vraiment pour vivre. C’est… Il me permet de décrocher de temps en temps de cette vie de fou qu’on mène. Il m’apaise, il me fait du bien. Vient pas tout faire foirer ok ? » « T'inquiètes pas, je n'en avais pas l'intention. C'est bien que tu puisses décompresser un peu, je suis content pour toi » Et puis, si on pouvait éviter le même sketch qu'avec Maisie, ça arrangerait tout le monde. J'entends quelque chose gratter. Je fronce les sourcils et je parcours la pièce des yeux. C'est moi ou.. ? Un miaulement provient de la salle de bains. Je prends Lullaby dans mes bras et je la dépose délicatement sur le sol avant d'aller ouvrir la porte. A peine la porte entrouverte, Le Chat déboule dans le salon avant de s'enfuir à la cuisine à la vue de Lullaby « C'est toi qui avait enfermé Le Chat dans la salle de bains ou ce con s'y est enfermé tout seul ? » Je ris légèrement, heureusement qu'il est mignon hein. Le Chat, pas Niall.

Le temps que je revienne, Lullaby avait déjà tenté de me rejoindre. Je m'arrête et je m'accroupis, totalement fasciné par cette petite boule de poils. « Elle a quel âge, au fait ? Je n'ai pas demandé » Je lui gratouille amoureusement la tête au moment où elle finit par me rejoindre. J'en oublierai presque que je ne voulais pas d'elle ici à la base. En même temps, difficile de résister à cette petite bouille. « Ça te dirait d'aller faire une balade ? » Je m'adresse clairement à Lullaby, l'ayant totalement adoptée, bien malgré moi, même si la question était destiné à Niall. Je finis par détacher mon regard du chiot pour relever la tête vers mon ami d'enfance. « Je sais que ça ne va pas te plaire mais j'ai acheté une laisse pour Lullaby. Je pense qu'au début, c'est mieux pour elle » Pourquoi ce discours sonne étonnamment familier à mes oreilles ? Ah oui, le Registration Act, j'avais presque oublié. Je sais que ce n'est pas pareil, que la situation n'a rien à voir mais ça me gêne quand même. « Le temps de son dressage, ce sera comme ça mais dès qu'elle sera plus grande, j'enlèverai tout ça »

« Je ne pensais pas que tu accepterais notre relation... » J’hausse les épaules. Je ne peux pas le blâmer de penser ainsi. Je ne pensais pas non plus que je finirais par m’y faire. « Quitte à ce qu’elle voit quelqu’un, je préfère que ça soit un gars que je connaisse. Surtout que je sais déjà tout ce qu’il y a à savoir sur toi si tu lui fais du mal et que je dois te botter le cul. Ca a ses avantages. » « Ouais… Disons que c'est un peu compliqué. J'ai envie de reprendre notre relation là où elle s'était arrêtée mais, en même temps, c'est impossible avec Icare. Toujours à courir partout, toujours à surveiller ses arrières et je n'ai pas envie que Maisie côtoie ce milieu. Imagine que quelqu'un qu'on a volé la prenne pour cible pour essayer de m'atteindre… S'il lui arrivait quelque chose... » Je comprends l’inquiétude pour y avoir pensé aussi. A vrai dire, j’y pense souvent. Que ça soit par Icare ou par la Confrérie, dès qu’il s’agit de s’investir dans ce genre de choses, nous mettons nos proches en danger au moins autant que nous. Si pas plus.

Et j’apprécie qu’il prenne le temps de se poser la question de sa sécurité. Cependant, il n’y a pas mille solutions. Je pense sincèrement qu’on devrait proposer à Mouse de prendre des cours d’auto-défense. Je pense que compte tenu de nos vies à nous deux, Aidan et moi, ça ne pourrait pas lui faire de mal. Mais reste à savoir si cette tête de mule va accepter ou pas. Je le mets alors en garde, lui demandant de ne rien révéler sur moi à Gabriel. « T'inquiètes pas, je n'en avais pas l'intention. C'est bien que tu puisses décompresser un peu, je suis content pour toi. » Je m’étire en accueillant la nouvelle. « Je te le fais pas dire… Ce mec est largement trop bien pour moi. » Gabriel et toute sa bonne volonté d’être un citoyen respectueux des lois, d’avoir sa petite vie bien rangée bien calme. Je ne pense pas qu’il prendrait bien le fait que je sois un membre d’Icare ou de la Confrérie. Pas bien du tout même. Cela mettrait même probablement un terme à notre relation en y réfléchissant bien.

Perdu dans mes pensées, je sursaute quand je vois Le Chat courir comme s’il avait la mort aux trousses. Bête animal. « C'est toi qui avait enfermé Le Chat dans la salle de bains ou ce con s'y est enfermé tout seul ? » « J’ai pas vu la couleur du moindre de ses poils depuis que je suis rentré avec Lullaby. Ce génie a dut arriver à cet exploit par lui-même. » Je ne peux m’empêcher de sourire alors que je vois que, déjà, la petite boule de poil suit son nouveau maître. Je n’ai aucun doute sur le fait qu’elle est en de bonnes mains. Ça se voit dans le regard d’Aidan. Il préférerait passer la soirée à bouder plutôt que de me l’avouer, mais il s’est déjà attaché à elle. Ça me rassure. « Elle a quel âge, au fait ? Je n'ai pas demandé » « Elle a un peu plus de trois semaines maintenant. Gabriel voulait attendre plus longtemps avant de commencer à séparer la mère des petits mais avec une portée de 14 chiots, le pauvre ne savait plus où donner de la tête et la mère n’avait plus assez de lait pour tout le monde. Elle n’est pas encore parfaitement familiarisée avec les aliments solides. Plus que les autres mais il faudra peut-être lui donner le biberon une fois où deux. Ne panique pas, j’ai amené le matériel nécessaire, c’est à la cuisine. »

Je laisse Graeme les rejoindre alors que l’écossais commence déjà à gagatiser son chien. C’est mignon de voir cette tête de mule fondre comme de la glace en plein soleil d’été face à un chiot. « Je sais que ça ne va pas te plaire mais j'ai acheté une laisse pour Lullaby. Je pense qu'au début, c'est mieux pour elle. Le temps de son dressage, ce sera comme ça mais dès qu'elle sera plus grande, j'enlèverai tout ça. » Je lève les mains au ciel comme pour me dédouaner de la remarque. « Hey, c’est ton chien, pas le mien. Tu l’éduques comme tu veux, tant qu’elle n’est pas malheureuse et qu’elle est en bonne santé. Graeme n’en a jamais eu besoin mais notre situation était aussi totalement différente. » Peut-être aurait-il porté un collier et une laisse si notre rencontre s’était passé dans d’autres conditions. Mais j’aime ma relation avec mon chien telle qu’elle est. Malgré que nous soyons fort dépendant de la présence de l’autre, c’est un ami fidèle et loyal sur qui je pourrais toujours compter. Et lorsqu’on marche en rue, je n’ai aucun doute sur le fait qu’il est toujours là, à côté de moi. Que je n’ai qu’à baisser les yeux pour voir ma boulle de poil préférée. Celui sans qui j’aurais été incapable de surmonter certaines épreuves. Celui qui m’a sauvé de la solitude, celui que j’ai sauvé de la famine. Je me relève et je vais me tenir près du trio, attendant qu’Aidan mette sa laisse à son chien. Alors que je me dirige vers la porte, je n’ai pas besoin de mot pour que mon chien m’emboite le pas, tel une ombre rassurante.

Une fois dans la rue, je me retourne et je lance un sourire complice à Aidan. « Je te rassure, normalement, elle n’a pas le caractère de peureux de Graeme. » On traverse la rue, se dirigeant naturellement vers Central Parc. Avec un petit sourire, j’observe la première sortie officielle de Lullaby en tant que chien d’Aidan. Sa marche est encore pataude et maladroite, ce qui la rend purement adorable. Comme souvent, les regards se posent sur nous. Deux hommes promenant deux huskies dont un chiot. Mouais… On doit un peu ressembler à un couple tout de même. Mais je n’en ai pas grand-chose à faire de ce que des inconnus pensent de nous. « Je pensais proposer à Mouse de prendre des cours d’auto-défense. Elle… Quoi qu’il se passe elle reste liée à nous deux. Ce qui peut la mettre en danger. Je serais plus rassuré avec une arme chez elle et en sachant qu’elle sait s’en servir. »

« Elle a un peu plus de trois semaines maintenant. Gabriel voulait attendre plus longtemps avant de commencer à séparer la mère des petits mais avec une portée de 14 chiots, le pauvre ne savait plus où donner de la tête et la mère n’avait plus assez de lait pour tout le monde. Elle n’est pas encore parfaitement familiarisée avec les aliments solides. Plus que les autres mais il faudra peut-être lui donner le biberon une fois où deux. Ne panique pas, j’ai amené le matériel nécessaire, c’est à la cuisine. » Je touche du bout du doigt une de ses pattes. Alors comme ça, il va falloir te donner le biberon ? Tu fais jamais rien comme tout le monde, hein ? Je me renfrogne. C'était peut-être un peu tôt pour la séparer de sa mère mais si, en effet, ils ne s'en sortaient pas, je comprends qu'il ait voulu soulager la mère. On verra tout ça en temps voulu, pour le moment, on va aller faire un tour.

« Hey, c’est ton chien, pas le mien. Tu l’éduques comme tu veux, tant qu’elle n’est pas malheureuse et qu’elle est en bonne santé. Graeme n’en a jamais eu besoin mais notre situation était aussi totalement différente. » Je serre les dents au moment de lui mettre la laisse. Je me dit qu'on au début, c'est mieux ainsi, que c'est pour son bien mais ça me fait mal de savoir que mon chien est obligé de porter ces trucs pour le moment. Lullaby n'aurait pas été sourde, je n'en aurais certainement pas utilisé. Puisqu'elle fait désormais partie du club, j'ai envie que ce soit un membre à part entière et pas juste, quelque chose qui est là, attaché et réduit à l'état d'objet. Ce chien, c'est mon chien et elle vivra comme j'ai toujours vécu, libre de faire ce qu'il lui plaît.  Je me relève et je passe derrière Graeme et Niall. Voilà, c'est exactement à ça que je veux arriver avec Lullaby, une confiance aveugle et mutuelle. Je referme la porte derrière moi et je m'élance à la suite de Niall, Lullaby juste à côté de moi.  « Je te rassure, normalement, elle n’a pas le caractère de peureux de Graeme. » Je ris légèrement. C'est vrai que Graeme n'est pas le plus courageux. La première fois que je l'ai vu, il me semble que c'est quand j'ai rencontré Graham pour la première fois, le chien était caché sous son lit.

On traverse la rue. J'observe Lullaby faire ses premiers pas dans la grande ville, sa démarche est encore hésitante et un peu maladroite. Elle ne semble pas déranger le moins du monde par le bruit mais plus par l'agitation autour d'elle. Les voitures, les passants, les poussettes et les autres chiens, c'est tout nouveau pour elle. Elle renifle le moindre nouvel objet qu'elle rencontre. A un arrêt près d'un bouche à incendie, Niall revient sur le sujet Maisie « Je pensais proposer à Mouse de prendre des cours d’auto-défense. Elle… Quoi qu’il se passe elle reste liée à nous deux. Ce qui peut la mettre en danger. Je serais plus rassuré avec une arme chez elle et en sachant qu’elle sait s’en servir. » Je prends quelques secondes pour évaluer la proposition. C'est vrai que je serai plus rassuré en sachant qu'elle a de quoi se défendre mais posséder une arme ne veut pas dire savoir s'en servir et ce n'est pas une ou deux séances au stand de tir qui me rassureront. Dixit le mec qui se balade en permanence avec une arme chargée sur lui mais, passons. Après, on ne peut pas non plus couper les ponts avec elle pour sa sécurité. Déjà parce que si on fait ça, elle nous tue mais aussi, parce que je n'en ai aucune envie. « C'est une bonne idée. Je serai aussi plus rassuré en sachant qu'elle sait se défendre en cas de problème »

On repart enfin vers notre destination, Central Parc. Lullaby marche lentement à mes pieds, sursautant de temps à autre lorsqu'une voiture ou une moto passe à côté de nous. Je m'arrête pour passer doucement ma main sur sa tête, tentant de la rassurer. Une fois remise de ses émotions, on se remet en route. « Je pense que quelques séances au stand de tir ne seraient pas de trop avant de lui confier une arme » C'est une évidence. Même si je serai toujours anxieux de la savoir en possession d'une arme alors qu'elle n'a jamais tiré un seul coup de feu en vrai. Tirer dans un stand est une chose mais tirer sur quelqu'un pour se défendre, ça en est une autre. Certaines personnes n'y arrivent pas « Mais tu penses vraiment que lui donner une arme est la bonne solution ? » En même temps, on n'a pas beaucoup d'autres choix.

On arrive enfin à Central Parc. On avance doucement dans les allées, le parc est bien vide aujourd'hui. C'est étonnant. Niall passe devant avec Graeme et s'assoit sur un banc à l'ombre. Je les rejoins plus lentement, mon allure étant calquée sur celle de Lullaby. Je m'affale à côté de Niall et Lullaby va se blottir près de Graeme. Ils sont adorables tous les deux. Le silence plane quelques minutes, je regarde passer les rares personnes. Certains nous lancent des regards hautains. Je détaille notre petit quatuor. Je soupire en comprenant où ces abrutis veulent en venir. Oui, on a l'air d'un couple. C'est vrai que c'est indécent, rentrons chez nous nous cacher pour pleurer. Bordel, c'est quoi leur problème ? Bande de cons intolérants.

Je reporte mon attention sur mes mains, jouant nerveusement avec mes doigts. Je finis par relever la tête en me raclant la gorge, focalisant mon attention droit devant moi. En parlant de Maisie, il y a certaines choses que je dois lui dire « J'aurais aimé que tu apprennes pour Maisie et moi d'une autre manière » La façon dont Maisie lui a balancé ça au visage, je comprends qu'il ait réagi aussi mal. Je pense que j'aurais fait pareil. Je reporte mon attention sur Lullaby en train de jouer avec la queue de Graeme « Tu sais… Si je ne suis pas venu te voir en cure de désintox, ce n'est pas parce que je n'en avais pas envie, au contraire, c'est juste que... J'avais peur qu'on ne me laisse pas repartir » C'était stupide mais cette peur sans fondement m'empêchait de lui rendre visite. A l'époque, je devais être aussi défoncé que lui et je pensais qu'en voyant ça, ils me forceraient à décrocher, avec bien sûr, l'approbation des parents qui seraient ravis de voir enfin leur fils décrocher de la drogue. C'était complètement con. Je devais lui dire, c'était important pour moi qu'il sache que je ne l'avais pas abandonné par choix, mais plus par lâcheté.

« C'est une bonne idée. Je serai aussi plus rassuré en sachant qu'elle sait se défendre en cas de problème. Je pense que quelques séances au stand de tir ne seraient pas de trop avant de lui confier une arme. Mais tu penses vraiment que lui donner une arme est la bonne solution ? » Je hausse les épaules. Bien sûr, il est hors de question de lui donner une arme alors qu’elle ne sait pas tiré. Elle pourrait faire plus de dégâts qu’autre chose avec ça entre les mains si elle ne sait pas s’en servir. Et il est hors de question de prendre la responsabilité de mettre une arme à feu dans les mains d’une néophyte complète. Plusieurs séances de tirs s’imposeront pour être sûr qu’elle sache au moins visé. Tirer sur une personne est différent de tirer sur une cible. Si au moins elle sait viser, c’est déjà un grand plus. Mais je refuse de la laisser sans défense par les temps qui courent. « Une bonne solution, je ne pense pas non. Mais je pense que c’est la meilleure solution qu’on ait. Je peux déjà t’assurer qu’elle va rechigner à apprendre à tirer. Lui apprendre un autre moyen de défense serait trop long et moins sécuritaire. Tout le monde hésite devant une arme à feu. »

On pénètre dans le par cet je me sors une clope pour m’en griller une tant qu’on est en dehors de la zone anti-tabac que représente l’appartement d’Aidan. Je lui tends mon paquet, lui en proposant une. J’allume la mienne avant de lui lancer mon briquet pour qu’il puisse s’occuper de sa propre cigarette. Pendant qu’il fait ça, je prends de l’avance avec Graeme. Je m’assis sur l’un des bancs que je connais le mieux du parc pour y avoir pas mal traîné par le passé. Mon chien vient s’allonger à mes pieds comme à son habitude, regardant d’un œil suspicieux les coureurs et les passants suivre leur route dans le parc. Je l’ai toujours connu sur ses gardes de la sorte… Je me demande bien ce que ses premiers propriétaires ont bien pu lui faire pour qu’il finisse par réagir de la sorte.

Aidan s’assit à côté de moi et je ne peux retenir mon sourire quand je vois Lullaby s’installer dans le giron de son père. Je suis content d’avoir pu, indirectement, prendre l’un des chiots de la portée chez moi. Le silence se pose entre nous. On fume nos cigarettes à notre rythme en regardant les passants tailler leur route, se prenant quelques regards bourré d’un jugement que je ne connais que trop bien. C’est le même genre de regard que je perçois lorsque je suis avec Gabriel. Les gens sont des cons. Des cons intolérants. Et après on se demande pourquoi les choses finissent toujours en guerre ouverte… « J'aurais aimé que tu apprennes pour Maisie et moi d'une autre manière. » L’information tombe de nulle part et je grimace sous le coup. Pourtant, ma réponse vient au tac-au-tac. « J’aurais aimé que vous m’en parliez à l’époque… Et que vous épargniez mon lit, ça c’est vraiment pas terrible. Je crois que je vais inviter Gab un jour. Juste pour te rentre la pareille. » Même si je commence à me faire à l’idée, ça me reste toujours en travers de la gorge. Et j’ai bien vu la manière dont il la regarde, dont il se comporte avec elle. Quelque part, je suis un peu jaloux. C’est idiot mais personne ne m’a jamais regardé avec ces yeux là… Même si mon histoire avec Gab commence à devenir plus qu’un plan cul… Personne n’a jamais eu de réels sentiments pour moi. Et pour une raison obscure, je ne peux m’empêcher de jalouser le fait que ma sœur ait réussi à obtenir cela d’Aidan.

« Tu sais… Si je ne suis pas venu te voir en cure de désintox, ce n'est pas parce que je n'en avais pas envie, au contraire, c'est juste que... J'avais peur qu'on ne me laisse pas repartir. » Comme quoi les surprises s’enchainent… Comme pour chasser le mauvais souvenir, je jette ma cigarette à moitié entamée par terre. Je déloge l’un de mes pieds de sous Graeme pour aller écraser le mégot du bout de la semelle avec énergie. « J’ai pas envie de parler de ça. » Ma voix sort plus sèche que je ne le voudrais mais le centre a été l’un des pires moments de ma vie. Et rien que pour ne plus avoir à passer au-dessus d’une dépendance, rien que pour ne plus jamais avoir à sentir mon corps entier trembler de toute part, avoir la sensation d’avoir le bout des doigts constamment écrasés, pour ne plus revivre le déplaisir de rendre le moindre de mes repas en sentant ma peau couvertes de transpirations alors que je suis incapable d’attraper un peu de papier toilette pour m’essuyer la bouche… Et il y avait aussi les séances de psychanalyse de groupe… Je détestais ça… Ça avait été mieux une fois que le plus dur avait été fait, qu’on se contentait de me garder pour s’assurer que je ne replongerais une fois sortit, que mon corps avait bel et bien été lavé de toutes ces drogues que j’avais pu prendre. J’avais été plus bas que terre. Cela n’équivaut pas le traumatisme d’une mort ou cette fameuse soirée à l’Institut mais ma vie était encore normale à l’époque. Cela m’avait marqué, était resté gravé dans ma mémoire au fer rouge.

Le silence s’est à nouveau installé entre nous. C’est pour cela que je n’aime pas trop parler du passé avec lui. Au-delà de tous ces bons moments qu’on a passés ensemble, de tous ces rires, de toutes ces fois où on s’est soutenu l’un l’autre face à l’adversité, au-delà de notre complicité, il y a eu cette grosse déception. Cette grosse tâche qui me laisse un gout amer en plus. Goût amer qui s’est fait plus présent quand j’ai appris que, en plus, il se tapait ma sœur pendant ce temps… Dans mon lit. « J’avais juste besoin de ton soutiens, Aidan. » Cela sonne comme un reproche… Mais un reproche difficile à formuler. Le genre de reproches que l’on ne fait que lorsque l’on a vraiment été blessé mais que l’on ne veut pas trop en faire toute une histoire. Et c’est parfaitement le cas. A l’époque, j’ai été déçu, je n’ai pas compris. Je me suis senti abandonné comme la dernière des merdes. Et apprendre qu’il a déménagé entre temps à ma sortie… Cela n’avait pas aidé à apaiser ce sentiment.

Mais ce n’est pas ce que je veux retenir de lui. Je ne suis pas du genre à donner de secondes chances mais, avec Aidan… C’est différent… On a été tellement proche. C’est cela qui a rendu l’abandon si douloureux mais c’est aussi cela qui veut me le faire oublier. J’ai l’impression d’être un crétin qui va se faire avoir une deuxième fois. C’est contre ma nature mais… C’est d’Aidan que l’on parle. Mon frère de cœur. Je ne peux pas juste lui tourner le dos… Pas alors que je ne pensais plus jamais le revoir. « Bref… Ne parlons plus de cela. Ca appartient au passé et on ne peut plus changer les choses… » Comme pour clore la discussion, je me rallume une clope. Je tire doucement dessus, laissant mes penser vagabonder ailleurs, loin de ce centre que j’ai toujours détesté de tout mon cœur. Loin de la déception… Non, pas si loin que cela en fin de compte… « Donc, c’est sérieux… ? Ce que tu ressens pour Mouse… »

« J’aurais aimé que vous m’en parliez à l’époque… Et que vous épargniez mon lit, ça c’est vraiment pas terrible. Je crois que je vais inviter Gab un jour. Juste pour te rentre la pareille. » J'esquisse une petite moue dégoûtée, yuk, pas dans mon lit. T'en as un dans la chambre d'ami, c'est pas juste pour meubler une pièce vide. « On voulait pas t'imposer ça en plus de tout le reste. On savait pas trop comment tu allais le prendre » Ok, j'ai peut-être un peu menti. On savait exactement comment il allait le prendre et c'est pour cela qu'on n'a rien dit. Pour ce qui est du lit, à la base c'était pas prévu mais… Disons que ça a dérapé. Mais c'était pas prévu et ça, je trouve que c'est important de le préciser. Sinon, on pourrait presque croire que je l'ai fait exprès alors que, non, pas du tout. Et puis, il y a plus glam que la chambre de son meilleur pote pour ce genre de choses.

Je tire une taffe sur ma cigarette après lui avoir avoué les raisons de pourquoi je ne suis jamais venu le voir en cure de désintox. J'aurais bien voulu mais c'était au-dessus de mes forces. Je ne voulais pas le voir dans cet état. Je sais, c'est purement égoïste car il avait besoin de moi. J'étais son meilleur ami, c'était mon rôle de le soutenir. De plus, c'était la peur d'être prisonnier là-bas avec lui qui acheva de me persuader de ne surtout pas y mettre les pieds. « J’ai pas envie de parler de ça. » Sa voix est sèche et coupe court à toute objection ou tentative de s'expliquer. Je sais exactement ce qu'il a vécu, je l'ai vécu aussi. Le sevrage, c'est vraiment ce qu'il y a de pire. Je ne pense pas avoir déjà été aussi mal dans ma vie. Je pose mon regard sur Lullaby en train de jouer, préférant me taire pour une fois plutôt que d'empirer encore plus la situation. Je suis devenu un spécialiste dans ce genre de choses. Déclencher la guerre froide par de simples paroles, l'URSS et les États-Unis auraient été ravis de mes compétences en la matière.

« J’avais juste besoin de ton soutien, Aidan. » Ce reproche claque à mes oreilles, et touche en plein dans le mille. « Je sais... » J'ai rien trouvé de mieux à dire, je n'ai aucune excuse. Et puis, qu'est-ce que je pourrais bien inventer ? J'ai juste jouer au connard égoïste comme je l'ai toujours fait, pourquoi ça changerait ? Il avait besoin de moi et j'ai totalement disparu de la circulation. Je dois me l'avouer, je l'ai évité. Je me disais que si je restais loin de lui, je pourrais continuer de me droguer tranquillement sans qu'on vienne me dire quoi que ce soit. Je pensais que cette situation durerait le temps qu'il revienne et le jour de sa sortie, j'aurais été là et je l'aurais refait plonger avec moi, au mépris des efforts qu'il a fait pour s'en sortir, heureux de le retrouver et de reprendre nos vieilles habitudes. Sauf qu'entre-temps, on a déménagé aux États-Unis. Résultat, il a gardé de moi l'image d'un pote absent au moment le plus difficile de sa vie et qui en a profité pour sortir avec sa sœur. Incroyable cette image, très flatteur. En même temps, c'est comme cela que ça s'est passé et je n'ai rien fait pour arranger les choses. Trop défoncé pour me rendre compte de tout le mal que j'ai causé, sûrement...

« Bref… Ne parlons plus de cela. Ca appartient au passé et on ne peut plus changer les choses… » Je hoche vaguement la tête, c'est ça, changeons de sujet et enterrons tout ça loin, très loin « Donc, c’est sérieux… ? Ce que tu ressens pour Mouse… » Arg, pas si enterré que ça, hein ? Je me racle la gorge, je devais m'attendre à cette question, en même temps, je l'ai cherché « Oui, plutôt, oui… Depuis tout ce temps, ça n'a pas changé… Tu sais, je l'aime vraiment. Elle n'est pas comme toutes ces filles… Ou celles avec qui j'ai flirté mais c'était uniquement dans le cadre professionnel. Maisie, c'est différent. Elle est spéciale donc oui, c'est du sérieux et je viens de me rendre compte que tout ce que je dis sonne comme un gros cliché de films romantiques et ça commence à devenir gênant » Ça me fait bizarre de parler de ça avec lui, surtout en sachant qu'on parle de sa petite sœur. J'avoue ne pas trop savoir ce que ça fait mais je suppose que ça doit être un sentiment pas très agréable. Quelque chose qui se rapproche de la jalousie, peut-être ? De voir quelqu'un qu'on aime partir loin de vous avec un autre. Je pense que ça se rapproche de ça. Donc, j'essaye d'être très délicat dans mes paroles, j'ai pas spécialement envie de me reprendre une droite. J'ai encore les marques de la dernières sur mon arcades, merci bien, mais je passe pour cette fois. « Et toi, avec ton amant… Gab, c'est ça ? Ça devient quoi ? »

« Oui, plutôt, oui… Depuis tout ce temps, ça n'a pas changé… Tu sais, je l'aime vraiment. Elle n'est pas comme toutes ces filles… Ou celles avec qui j'ai flirté mais c'était uniquement dans le cadre professionnel. Maisie, c'est différent. Elle est spéciale donc oui, c'est du sérieux et je viens de me rendre compte que tout ce que je dis sonne comme un gros cliché de films romantiques et ça commence à devenir gênant » Je ne sais pas pourquoi, mais j’ai du mal à avaler cette déclaration. C’est sans doute parce que, effectivement, c’est totalement mièvre et que ça dégouline de bons sentiments. Ca… Ca ne ressemble pas vraiment à Aidan. Et, quelque part, cela me rassure… Un peu… Parce qu’il a beau être l’une des personnes pour qui je donnerais ma vie sans hésitation, il n’en reste pas moins quelqu’un d’un peu lâche et ne s’inquiétant pas des choses tant qu’elles ne le touchent pas.

Et c’est ça qui me fait surtout peur pour Mouse. Cette capacité qu’il peut avoir à disparaitre dans les moments où on a besoin de lui, cette capacité qu’il a d’ignorer les problèmes tant qu’ils ne sont pas devenus assez gros que pour attirer son attention. Le tout est maintenant de savoir s’il est sincère ou non dans ce qu’il vient de me dire. Si oui, je serais heureux de m’effacer et de les laisser vivre leur histoire. Même si cela me ferait un peu grincer des dents. Après tout, je ne veux que le bonheur de Mouse. Et elle est devenue assez grande que pour se passer de mon avis d’ainé. Mais s’il ne s’agit là que d’un mensonge, de la poudre aux yeux pour me faire lâcher prise, un discourt creux, il est hors de question que je le laisse approcher de ma sœur. Parce que c’est plus fort que moi. Parce qu’alors même que nos retrouvailles m’ont prouvées qu’au jeu de la vie, elle m’est passée devant, acquérant de l’expérience et de la maturité alors que je me contentais de lutter pour trouver de quoi bouffer et ne pas crever de froid, je ne peux m’empêcher de vouloir la protégée. C’est plus fort que moi, c’est un besoin viscéral que de m’assurer qu’elle est heureuse. Je ne me souvenais plus bien de la force de ce sentiment avant qu’elle ne revienne dans ma vie. Je ne me souvenais plus bien de la naïveté innocente que dégage son sourire, de l’envie pressante de la préserver des enfoirés qui remplissent la ville. Mouse mérite le bonheur, elle mérite ce qu’il y a de mieux.

« Et toi, avec ton amant… Gab, c'est ça ? Ça devient quoi ? » Je ne réponds pas tout de suite à la question. A la place, je me penche à côté du banc pour y ramasser une petite branche d’arbre. Après tout, on est sorti pour les chiens. Un husky, ça a besoin de courir et de se dépenser. J’agite la branche devant Graeme qui ne tarde pas à y montrer un grand intérêt. Je la lance et il se précipite à sa suite pour l’attraper. « C’est… particulier. Ca faisait longtemps que je n’avais pas eu quelqu’un tu sais… Au début, je voyais ça comme un plan cul. Un moyen de relâcher la pression de temps en temps en bonne compagnie quoi. » J’observe au loin Graeme qui joue avec sa branche, la mordant sous différents angles avant de se relever pour me la ramener en trottinant fièrement, juste content de jouer un peu. « Enfin, ça c’était au début… » Je me penche pour récupérer la branche entre les crocs de mon chien mais il décide qu’il a envie de jouer au tir à la corde, gardant la branche bien serrée entre ses dents alors que j’essaye de la récupérer. Je finis par lâcher, m’avouant vaincu et observant avec un demi sourire Graeme sautiller devant moi, devenu totalement jouette. Il lâche la branche, tout content d’avoir gagné son duel et je la récupère pour la lui lancer à nouveau.

« C’est devenu plus compliqué par la suite. On s’est tous les deux attachés je crois. Il… Il ne sait rien de moi à part mon passé à la rue et mes origines écossaises. En même temps, faudrait être sourd pour ne pas s’en rendre compte à mon accent. Je… Je suis pas sûr de vouloir construire cette relation sur un mensonge mais être avec quelqu’un qui ne sait rien de ma vie, un honnête citoyen qui pense que j’en suis moi aussi un… C’est… C’est rafraichissant. Je touche du doigt une routine qui ne sera jamais la mienne et à petite dose, j’aime vraiment ça. Je pourrais pas vivre comme ça mais franchement, ça me fait du bien de prendre un peu de distance avec toutes ces merdes qui font ma vie. Penser un peu à autre chose quoi. » Graeme revient et on recommence le même cinéma. Sauf que cette fois ci, j’arrive à récupérer moi-même le bâton, souriant de toutes mes dents alors que mon chien aboie en signe de protestation. La branche s’envole à nouveau dans l’air, Graeme courant à nouveau après. « Enfin bref. Ca n’aboutira jamais à rien de sérieux et j’aurais préféré ne pas m’attacher du tout. Ça aurait sans doute été moins douloureux dans le fond. »

Je me penche en avant, appuyant mes bras sur mes genoux. Mon menton vient trouver refuge au creux de ma paume et je lance un regard à Aidan, lui souriant d’un sourire rendu tendre par le souvenir que je m’apprête à évoquer. « Il m’a attendu en plein cœur de central park en kilt pour mon anniversaire. C’était juste tellement adorable de sa part. C’est… Ca faisait plus de dix ans que personne n’avait fêté mon anniversaire. Ça m’a un peu bousculé. C’est homme est trop bien pour moi je crois. » Ma tête retombe entre mes épaules et je passe une mais dans mes cheveux. Graeme revient, désireux de continuer à jouer mais je ne lui renvois pas son bâton. A la place je prends une profonde inspiration et je me redresse lançant un sourire que je sais sonner faux à Aidan. « Mais bon… J’ai toujours eu la poisse avec les hommes. Ça me fait bizarre de m’être trouvé un mec bien pour une fois. »

« C’est… particulier. Ca faisait longtemps que je n’avais pas eu quelqu’un tu sais… Au début, je voyais ça comme un plan cul. Un moyen de relâcher la pression de temps en temps en bonne compagnie quoi. » Oui, je vois le genre. Sa déclaration me fait doucement sourire. Lui qui est le premier à me traiter d'égoïste, il ne vaut pas mieux. Prendre un plan cul uniquement pour se relaxer et prendre du bon temps en ne s'intéressant pas à la personne. Monsieur l'altruiste n'est donc pas parfait. « Enfin, ça c’était au début… C’est devenu plus compliqué par la suite. On s’est tous les deux attachés je crois. Il… Il ne sait rien de moi à part mon passé à la rue et mes origines écossaises. En même temps, faudrait être sourd pour ne pas s’en rendre compte à mon accent. Je… Je suis pas sûr de vouloir construire cette relation sur un mensonge mais être avec quelqu’un qui ne sait rien de ma vie, un honnête citoyen qui pense que j’en suis moi aussi un… C’est… C’est rafraîchissant. Je touche du doigt une routine qui ne sera jamais la mienne et à petite dose, j’aime vraiment ça. Je pourrais pas vivre comme ça mais franchement, ça me fait du bien de prendre un peu de distance avec toutes ces merdes qui font ma vie. Penser un peu à autre chose quoi. » Qu'est-ce que je disais ? D'un autre côté, le fait qu'il soit heureux avec ce mode de vie me convainc de la fermer. Après tout, être un peu égoïste n'a jamais fait de mal à qui que ce soit… Sauf peut-être à son plan cul, Gabriel. Aucune idée et franchement, c'est pas mes affaires. « Enfin bref. Ca n’aboutira jamais à rien de sérieux et j’aurais préféré ne pas m’attacher du tout. Ça aurait sans doute été moins douloureux dans le fond. » Sa remarque m'arrache une sourire. Comme s'il aurait pu contrôler ça. Les gens s'attachent, c'est normal, c'est humain, c'est pas quelque chose sur lequel on peut influer, ou même choisir. J'aurais préféré ne pas m'attacher autant à Maisie. C'était une amourette d'adolescent, ça ne devait pas durer. Au final, des années plus tard, on est toujours accro. Je le suis toujours et je sais que Maisie aussi, même si elle n'aime pas le dire et préfère détourner le sujet.

« Il m’a attendu en plein cœur de central park en kilt pour mon anniversaire. C’était juste tellement adorable de sa part. C’est… Ca faisait plus de dix ans que personne n’avait fêté mon anniversaire. Ça m’a un peu bousculé. C’est homme est trop bien pour moi je crois. Mais bon… J’ai toujours eu la poisse avec les hommes. Ça me fait bizarre de m’être trouvé un mec bien pour une fois. » C'est bizarre. Il est passé d'un sourire tendre à un sourire tellement faux. J'ai un petit pincement au cœur en pensant qu'il a du subir deux ou trois déceptions amoureuses qui l'ont marqué. Ce genre de choses arrivent mais, c'est la vie et il faut faire avec. « Je suis content pour toi, mec. J'espère que cette fois, ce sera la bonne » Je dépose mon regard sur Lullaby qui semble toute joyeuse. Elle a envie de jouer comme Graeme. Je ramasse un bâton un peu plus petit et je commence à jouer avec elle. Elle attrape l'autre bout du morceau de bois et essaye de tirer de toutes ses forces. La voir jouer comme ça la rend juste adorable.

« Bon, on devrait me décerner la palme du pire meilleur ami pour avoir oublié ton anniversaire. Enfin, plutôt pour ne pas avoir suffisamment insisté pendant que tu faisais le mort. Donc, je te propose d'aller boire un verre. Il y a un bar en ville, The Piano Bar, je connais bien le gérant, il nous laissera rentrer avec les chiens » Sans même attendre sa réponse, je me lève et Lullaby est instantanément sur mes talons. Je commence à avancer mais Niall semble rechigner à me suivre « Allez, cet anniversaire ne va pas se fêter en retard tout seul et puis, si on se dépêche, on arrivera pile pour l'Happy Hour » Sans plus attendre, je remets la laisse à Lullaby et je pars devant, bientôt suivi par Niall qui a enfin décidé de se bouger. Il tire toujours la tronche, je pousse un petit soupir exagéré. « Si tu continues de faire cette tête, dans deux ans, tu seras aussi ridé que la mamie chaudasse qui habite au troisième » Je lâche un rire franc en imaginant la tête de Niall avec les rides de la vieille dame. J'ai rien contre elle personnellement, mais plutôt contre ses activités nocturnes qui réveillent tout l'immeuble. Je devrais penser à faire isoler phoniquement l'appartement parce que bon, on n'est pas tous à la retraite et le sommeil, c'est incompatible avec le boucan qu'elle fait.

On arrive enfin au bar, après avoir marché pendant un moment. Le gérant vient vers nous et après avoir légèrement grimacé en voyant les deux boules de poils derrière nous, il nous sourit et nous demande ce qu'on veut « Deux Whiskys » Il y a une table de libre et on s'y installe le temps qu'il prépare tout ça et nous l'apporte. J'observe vaguement l'endroit. Je viens souvent ici, je le connais presque par cœur. C'est même ici que j'ai donné rendez-vous à Maisie la dernière fois pour nos retrouvailles. Je lève mon verre pour trinquer « Allez, pas de Confrérie, ni d'Icare, ni de conneries du Parti Collectif ou quoi que ce soit qui plomberait l'ambiance, ce soir, c'est juste une sortie entre amis, comme au bon vieux temps. Bon anniversaire, mec ! »

« Je suis content pour toi, mec. J'espère que cette fois, ce sera la bonne » mes lèvres se pincent légèrement, finissant de rendre mon faux sourire totalement non crédible. A vrai dire, je ne sais plus du tout où j’en suis dans toute cette histoire… Je ne sais plus trop quoi faire avec Gab… Quelque part, ce n’est pas très juste pour lui de continuer à le garder loin de tout cela… D’un autre, je sais qu’il ne comprendrait pas, qu’il me quitterait plutôt que de savoir que je vol pour vivre ou encore que je suis un militant de la cause mutant. Un militant non pacifiste. L’inaction est un peu le choix de la facilité mais je n’ai pas non plus envie de mettre fin à mon histoire avec le vétérinaire. « Bon, on devrait me décerner la palme du pire meilleur ami pour avoir oublié ton anniversaire. Enfin, plutôt pour ne pas avoir suffisamment insisté pendant que tu faisais le mort. Donc, je te propose d'aller boire un verre. Il y a un bar en ville, The Piano Bar, je connais bien le gérant, il nous laissera rentrer avec les chiens. » Je suis secoué d’un léger rire nerveux. Ce n’est pas comme si je lui avais rendu la tâche facile en même temps. J’ai tout fait pour que personne ne sache ou ne s’en souvienne. Et le soir même, j’ai coupé mon téléphone et j’ai disparu dans un bar d’expatrier écossais pour me laisser aller à ma nostalgie. Pourquoi ? J’en sais rien. Sans doute par habitude. Sans doute parce que je ne voulais peut-être pas être entouré pour ce jour-là, sans doute parce qu’il a pris une consonance tellement négative à mes oreilles que j’ai juste pas envie d’en parler. Cependant, après l’intervention de Gabriel, je dois bien avouer que je me sens plus prompt à laisser quelqu’un me souhaiter un bon anniversaire. Il n’y a pas à dire, cet homme est vraiment trop bien pour moi. En silence, j’observe Aidan s’éloigner. Graeme reste à mes pieds, les observant, lui et Lullaby faire quelques pas. « Allez, cet anniversaire ne va pas se fêter en retard tout seul et puis, si on se dépêche, on arrivera pile pour l'Happy Hour » Je lève les yeux au ciel avec un demi-sourire. Ce qu’il ne me fera pas faire lui. Il faudrait peut-être qu’à un moment où un autre, je lui dise que je ne compte plus vraiment sur le fait de fêter mon anniversaire. « Si tu continues de faire cette tête, dans deux ans, tu seras aussi ridé que la mamie chaudasse qui habite au troisième » Je fourre mes mains dans mes poches sans répondre, me contentant de le suivre en silence, essayant de trouver une manière de formuler cette vérité sans choquer mon ami d’enfance. J’ai cru remarqué qu’en général, quand on dit à quelqu’un qu’on ne souhaite pas fêter son anniversaire, on se retrouve plus face à de l’incompréhension qu’autre chose.

Quand on arrive, le silence s’est bien installé entre nous deux. Le barman ne dit rien en nous voyant entrer avec nos chiens. Les établissements qui laissent encore les chiens entrer commencent à se faire un peu rare… Peut-être qu’il faudrait que je note cette adresse. Juste au cas où… Je laisse Aidan gérer la commande. Si cela lui fait plaisir, après tout… Je peux bien faire un petit effort et le laisser m’offrir un verre. On va s’installer et on ne tarde pas trop à se faire servir. Je demande une gamelle d’eau pour les chiens et on m’assure qu’on va leur chercher ça. Je me penche pour caresser ma boule de poils préférée quand Aidan reprends enfin la parole. « Allez, pas de Confrérie, ni d'Icare, ni de conneries du Parti Collectif ou quoi que ce soit qui plomberait l'ambiance, ce soir, c'est juste une sortie entre amis, comme au bon vieux temps. Bon anniversaire, mec ! » Je me redresse, la bouche un peu ouverte par l’hésitation. Lui en parler ou pas ? Je vais vraiment finir par avoir l’air d’un putain de rabat-joie à ce rythme… Mais tant pis… Si on est amené à rester en contact plusieurs années, ce sur quoi je compte bien, il devrait peut-être être au courant de cette nouvelle petite particularité. « Merci mais il y a une raison pour laquelle j’ai fait le mort il y a quelques mois… Je ne compte plus fêter mon anniversaire dans le futur. C’est… » J’attrape mon verre et je rigole légèrement à ma propre connerie. « C’est con mais depuis mon arrivée ici, ce jour en particulier à finit par ne plus gouter que le regret et la nostalgie. C’est en gros plus devenu un jour de deuil que de fête. Je sais, c’est bizarre mais, au fond… Un anniversaire c’est pas si extraordinaire que ça n’est-ce pas ? » Un léger rire nerveux me secoue encore à nouveau. Difficile d’expliquer réellement la manière dont je le vis, dont je le ressens. « Gab a été mis au courant de la date de mon anniversaire sans que je le veuille ou ne le sache. Il m’a fait la surprise… C’était un peu gênant… C’était touchant de sa part mais… je sais pas… Peut-être que j’ai peur d’oublier les épreuves par lesquelles je suis passé toutes ces années en recommençant à fêter ce jour. » Je lève mon verre avant de boire un peu du liquide ambré. Le gout fumé de l’alcool remplit ma bouche. Pas mauvais. Ça ne vaut pas certains whiskies écossais mais on ne peut pas tout avoir. « Donc, te sens pas coupable d’avoir laissé passer la date. J’ai tout fait pour. Même si j’avoue que le jour même, ça a été imprévu sur imprévu. » Ca, c’est peu de le dire. « Pour faire court… Je crois que j’avais jamais eu des hallucinations aussi flippantes de toute ma vie. Rassures-toi, je me suis pas drogué en connaissance de cause, quelqu’un a juste foutu un truc dans ma boisson sans que je le vois. J’sais toujours pas ce que c’était du coup, mais putain… J’avais jamais fait un bad aussi délirant… Et pourtant, tu le sais, j’en ai déjà fait des sales, des bads… »

« Merci mais il y a une raison pour laquelle j’ai fait le mort il y a quelques mois… Je ne compte plus fêter mon anniversaire dans le futur. C’est… » Rah non, mec, on a beaucoup de moments biens dans nos vies alors si tu supprimes les anniversaires, ça va être la déprime. « C’est con mais depuis mon arrivée ici, ce jour en particulier à finit par ne plus gouter que le regret et la nostalgie. C’est en gros plus devenu un jour de deuil que de fête. Je sais, c’est bizarre mais, au fond… Un anniversaire c’est pas si extraordinaire que ça n’est-ce pas ? » Qu'est-ce qu'il me sort ? Dans mes souvenirs, on fêtait toujours les anniversaires et on les fêtait bien… Peut-être un peu trop des fois, mais c'est un autre débat.

« Gab a été mis au courant de la date de mon anniversaire sans que je le veuille ou ne le sache. Il m’a fait la surprise… C’était un peu gênant… C’était touchant de sa part mais… je sais pas… Peut-être que j’ai peur d’oublier les épreuves par lesquelles je suis passé toutes ces années en recommençant à fêter ce jour. » Je l'imite et je bois une gorgée de Whisky. Il aurait pu nous mettre de l'écossais quand même, je suis sûr qu'il en garde une bouteille en plus. Je repose mon verre sur la table et je reporte mon attention sur les paroles de Niall. C'est moche ce qu'il dit. Je sais qu'il a vécu des trucs pas cools mais de là à oublier, je trouve ça un peu extrême. On peut très bien continuer à vivre sans oublier ce qu'il s'est passé, c'est ce que la majorité des gens font.

« Donc, te sens pas coupable d’avoir laissé passer la date. J’ai tout fait pour. Même si j’avoue que le jour même, ça a été imprévu sur imprévu. Pour faire court… Je crois que j’avais jamais eu des hallucinations aussi flippantes de toute ma vie. Rassures-toi, je me suis pas drogué en connaissance de cause, quelqu’un a juste foutu un truc dans ma boisson sans que je le vois. J’sais toujours pas ce que c’était du coup, mais putain… J’avais jamais fait un bad aussi délirant… Et pourtant, tu le sais, j’en ai déjà fait des sales, des bads…  » « Et c'est seulement maintenant que tu me le dis ?! Mec, c'est quand même une info super importante que t'as oublié de me donner là. T'imagines si t'avais eu un retour d'acide en pleine mission ? Comment tu veux qu'on puisse travailler au mieux si tu me caches ce genre d'informations ? C'était putain d'irresponsable de ta part » J'en reviens pas qu'il a été aussi con. Ok, apparemment c'était pas sa faute mais la moindre des choses, ça aurait été de me prévenir. « Rassure-moi, t'y as pas retouché depuis ? » Parce que je sais très bien ce que c'est. La tentation constante. Il a retouché du doigt ce qu'on a pourtant juré de ne plus jamais touché. Même si ça a l'air de l'avoir un peu traumatisé, il pourrait être tenté de replonger et ni lui ni moi ne voulons ça. Je ne pense pas qu'il en a repris mais, avec lui, je me méfie. Il a toujours quelque chose à avouer.

Je sors une cigarette et je tends le paquet à Niall. Je pensais en avoir fini avec la drogue mais non, ça me poursuit toujours. Je m'en débarrasserai jamais, hein ? J'accroche le regard de Niall, j'ai peut-être été un peu dur. C'était pas sa faute et en plus, son passif avec la drogue est plus violent que le mien. Je pense pas qu'il ait fait la connerie d'y retoucher intentionnellement « Désolé, mec, je me suis emporté mais tu aurais du me prévenir. C'est pas le genre de choses qu'on cache quand on fait un métier aussi dangereux » Je tire un coup sur ma cigarette « C'est juste que… J'ai simplement peur que ce qu'il s'est passé la dernière fois se reproduise... »

« Et c'est seulement maintenant que tu me le dis ?! Mec, c'est quand même une info super importante que t'as oublié de me donner là. T'imagines si t'avais eu un retour d'acide en pleine mission ? Comment tu veux qu'on puisse travailler au mieux si tu me caches ce genre d'informations ? C'était putain d'irresponsable de ta part » Je grimace alors que j’encaisse la remarque. Il a raison, j’aurais peut-être dû lui en parler… Mais les choses étaient déjà bien assez complexes à l’époque et j’admets ne pas du tout avoir pensé à la probabilité d’un retour d’acide. Il faut dire, c’est plus proche de la légende urbaine qu’autre chose. Mais je me voyais mal agité ma prise de drogue sous le nez d’Aidan à l’époque. J’ai déjà eu du mal à m’empêcher de replonger, j’allais pas le fragiliser en même temps que moi pour ce coup-là. « Rassure-moi, t'y as pas retouché depuis ? » Je fronce les sourcils, presque vexé par cette question. « Non. Bien sûr que non. J’ai assez galéré pour en sortir que pour ne pas céder à la tentation. Et cette soirée a été bien assez horrible comme ça. Quant à un retour d’acide, tu sais bien que les probabilités que ça arrive sont très faibles. Pas de quoi fouetter un chat non plus. » Je joue les outrés mais la tentation a vraiment été grande. Je me souviens avoir écumé les rues de la ville en pleine nuit. J’avais même trouvé un plan pas trop cher qui ne m’avait pas l’air trop foireux. Et au moment d’acheter, je me suis dégonflé en me rendant compte que le mec qui vendait cette merde devait avoir l’âge que j’avais lorsque j’ai été placé en désintox. Ça m’avait refroidit direct. J’étais pas rentré chez Aidan ce soir-là. Non, j’avais préféré trouvé refuge dans les bras de mon amant. Ça avait d’ailleurs été une nuit on ne peut plus intéressante mais là n’est pas la question… « Désolé, mec, je me suis emporté mais tu aurais dû me prévenir. C'est pas le genre de choses qu'on cache quand on fait un métier aussi dangereux. C'est juste que… J'ai simplement peur que ce qu'il s'est passé la dernière fois se reproduise... » J’imite mon ami, sortant une cigarette à mon tour. Je la fait tourner entre mes doigts, savourant l’irrégularité du cylindre. Je la tapote un peu sur la table alors que je rassemble mes esprits et que j’essaye de me forcer à regarder Aidan dans les yeux. J’allume ma clope, profitant du fait qu’on nous apporte une gamelle d’eau pour les chiens pour marquer une pause dans la conversation. Je tire sur le bâtonnet de nicotine, fermant les yeux pour accueillir la fumée qui remplit mes poumons. Je la relâche lentement, rouvrant les yeux. « Tu parles de quelle dernière fois ? De la fois où j’ai fait une overdose quand on était gamin ou de la fois où j’ai pris une balle pour toi ? »

Je bois une gorgée de whisky, aspirant un peu d’air les dents serrées alors que le liquide ambré est toujours dans ma bouche. Je ferme brièvement les yeux pour avaler alors que les vapeurs d’alcool me montent légèrement à la tête. « Faut que tu te décharge de cette culpabilité, Aidan. J’suis un grand garçon maintenant. C’est peut-être difficile à croire mais je sais prendre soin de moi. J’apprécie que tu t’inquiètes mais te laisse pas bouffer par ça. J’veux pas que tu passes ta vie à t’inquiéter pour moi. » Je tapote ma cigarette sur le cendrier présent à table, observant les cendres alors que je reprends la parole. « Ça serait te mentir que de dire que j’ai jamais été tenté d’y retourner… De gouter à nouveau au moins une fois cette sensation de force et de liberté. Mais ça, c’est le lot de tous les anciens toxicos. Je pense pas me tromper en affirmant que toi aussi, t’y repense parfois. C’est normal après tout. Tout était tellement plus simple en ce temps là pour toi comme pour moi. On se posait moins de question, on n’avait pas vraiment de responsabilité, on n’avait de comptes à rendre à personne. La nostalgie sera toujours là d’une manière ou d’une autre. Mais j’ai tout juste assez d’estime de moi que pour ne pas replonger… Pas après l’enfer de la cure de désintox. Rien qu’y penser suffit à me ramener les pieds sur terre. Donc, pas de panique, je replongerais pas. » Je lui fais un clin d’œil et je tire à nouveau sur ma cigarette. Un léger blanc s’installe entre nous. Je me laisse aller au fond de mon siège et je souffle la fumée hors de mes poumons. « Tiens, je t’ai jamais demandé comment allaient tes parents ? Ils roulent toujours leur bosse ou pas ? »

« Tu parles de quelle dernière fois ? De la fois où j’ai fait une overdose quand on était gamin ou de la fois où j’ai pris une balle pour toi ? Faut que tu te décharge de cette culpabilité, Aidan. J’suis un grand garçon maintenant. C’est peut-être difficile à croire mais je sais prendre soin de moi. J’apprécie que tu t’inquiètes mais te laisse pas bouffer par ça. J’veux pas que tu passes ta vie à t’inquiéter pour moi.  » Les deux ? Pour l'overdose, on était gamin et j'étais complètement défoncé donc ce n'est pas une réelle culpabilité que je porte. Déjà, parce que c'est arrivé il y a longtemps et que je m'en souviens que vaguement mais aussi parce qu'une plus grosse culpabilité pèse sur mes épaules et efface les moins importantes. Cette fois où Niall s'est pris une balle, c'était ma faute. Je le sais, il le sait et tout ce qu'il dira n'y changera rien. J'ai merdé et il en est mort. Le pire, c'est que j'aurais pu faire quelque chose, j'aurais pu réagir comme il fallait, j'aurais pu le sauver si… Si ma mutation n'avait pas disjoncté. Tu parles d'une fierté d'être un mutant. Ah ! Si je ne suis même pas capable de sauver un ami, ça sert à rien, c'est juste un fardeau de plus.

« Comment tu veux que je me décharge de ça ? Tu t'es vidé de ton sang dans ma voiture et t'es mort sous mes yeux par ma faute. J'ai merdé et c'est toi qui a prit. Tu peux dire tout ce que tu veux mais c'est ma faute. Cette culpabilité, je l'ai mérité et t'as pas fini de m'avoir sur ton dos à m'inquiéter pour toi » Plus jamais ça n'arrivera. Plus jamais je veux me retrouver avec le sang de Niall sur les mains.

« Ça serait te mentir que de dire que j’ai jamais été tenté d’y retourner… De gouter à nouveau au moins une fois cette sensation de force et de liberté. Mais ça, c’est le lot de tous les anciens toxicos. Je pense pas me tromper en affirmant que toi aussi, t’y repense parfois. C’est normal après tout. Tout était tellement plus simple en ce temps là pour toi comme pour moi. On se posait moins de question, on n’avait pas vraiment de responsabilité, on n’avait de comptes à rendre à personne. La nostalgie sera toujours là d’une manière ou d’une autre. Mais j’ai tout juste assez d’estime de moi que pour ne pas replonger… Pas après l’enfer de la cure de désintox. Rien qu’y penser suffit à me ramener les pieds sur terre. Donc, pas de panique, je replongerais pas. » Je hoche distraitement la tête. De belles paroles tout ça. Peut-être qu'il aurait la force de résister, peut-être mais si elle se trouvait juste sous son nez, à portée de main, est-ce qu'il continuerait de détourner la tête ? Aucune idée, je l'espère, j'ai envie de le croire quand il dit qu'il ne replongerait pas.

Un silence s'installe et je continue doucement de fumer ma cigarette, entrecoupé de gorgées de Whisky. « Tiens, je t’ai jamais demandé comment allaient tes parents ? Ils roulent toujours leur bosse ou pas ? » Je lâche une exclamation sarcastique. Les parents hein ? « Aucune idée et je m'en fous royalement ! Après le coup qu'ils m'ont fait, la dernière chose dont j'ai envie, c'est de reprendre contact avec eux et de leur demander des nouvelles. » Ils m'ont foutu à la porte alors que je venais à peine d'avoir mon diplôme. J'étais encore un toxico à l'époque et je me suis retrouvé à la rue, à devoir me débrouiller tout seul alors que je savais pas me gérer. J'ai trouvé un appart minable, je vivais en volant les gens. Ils auraient été fiers ! « Je suppose qu'ils vont très bien, avec une bouche inutile en moins à nourrir, ils doivent filer le parfait amour dans leur maison de campagne. J'en sais rien. Ma mère a peut-être enfin réussi à vendre ses peintures, mon père est peut-être devenu encore plus cons qu'avant, peut-être même qu'ils sont retournés en Écosse, aucune idée ! » Parler d'eux m'énerve au plus haut point. Ce qu'ils ont fait est dégueulasse et ce serait peut-être pas autant le bordel aujourd'hui s'ils n'avaient pas merdé leur job de parents. « Parlons d'autre chose ! » Actuellement, je n'ai aucun sujet de conversation qui me vient. On a dit qu'on évitait les sujets qui fâchent mais du coup, ça réduit énormément le champs des possibles. Un silence commence à s'installer et un malaise se fait sentir. Tant pis, au risque de s'engueuler, encore, il faut que je brise ce silence « Et sinon, à la Confrérie, tout se passe bien ? Oui, je sais, on n'a dit qu'on en parlait pas mais bon, on va pas rester assis là en silence comme un vieux couple de septuagénaires »

« Comment tu veux que je me décharge de ça ? Tu t'es vidé de ton sang dans ma voiture et t'es mort sous mes yeux par ma faute. J'ai merdé et c'est toi qui as pris. Tu peux dire tout ce que tu veux mais c'est ma faute. Cette culpabilité, je l'ai mérité et t'as pas fini de m'avoir sur ton dos à m'inquiéter pour toi. » Je secoue légèrement la tête. Je suis fatigué d’argumenter à ce propos. « C’était un concours de circonstance avant tout, Aidan. Personne n’aurait pu prévoir que ce mec reviendrait sur son lieu de travail en dehors de ses horaires. Je connais cette culpabilité que tu portes, je sais à quel point ça peut nous bouffer de l’intérieur. Un ami à moi serait mort par ma faute si ça avait été sans l’intervention d’un autre dieu nordique. Mais s’inquiéter à outrance, ça sert à rien. Je connais les risques de mes deux jobs et je les accepte. Ce genre de choses, c’est pas une surprise pour moi. Ce sont des choses qui arrivent et on ne peut rien y faire parce que je ne compte pas lâcher le moindre de ces jobs. » Revient ensuite la question de la drogue… Cette foutue drogue… Parfois, je me demande à quoi aurait ressemblé ma vie si on n’avait pas plongé là-dedans, lui et moi. Aurais-je été aussi surprotecteur et violent dans cette démarche vis-à-vis de Mouse ? Aurais-je aussi été foutu à la porte de chez moi avec juste une valise de fringues ? J’en sais trop rien. Je sais juste que les choses n’ont pas suivi cette direction. Et qu’aujourd’hui, on en est là. Je ne sais pas si j’ai réussi à convaincre Aidan mais moi, je le suis. Je suis intimement convaincu que je ne replongerais pas. Il y a trop de choses importantes dans lesquelles je suis impliqué que pour me risquer là-dedans. Surtout que les risques d’overdose sont plus grand chez les ancien toxico. Du coup, je change de sujet, peu désireux de m’épancher plus que nécessaire sur ce sujet délicat. Je choisis celui me semblant déjà moins délicat de ses parents. De mon souvenir, c’était un peu monsieur et madame tout le monde mais on passait assez peu de temps l’un chez l’autre à l’époque. On connaissait vaguement la famille de l’autre mais on passait le plus clair de notre temps à parcourir les rues de la ville, plus précisément celles de la vieille ville. « Aucune idée et je m'en fous royalement ! Après le coup qu'ils m'ont fait, la dernière chose dont j'ai envie, c'est de reprendre contact avec eux et de leur demander des nouvelles. »

Oups, terrain miné visiblement. Comme quoi, la vie nous en a bien fait baver à tous les deux. Je tire sur ma cigarette en levant un sourcil interrogateur, curieux d’en apprendre plus sur ce qui a pu créer une telle colère chez mon ami. « Je suppose qu'ils vont très bien, avec une bouche inutile en moins à nourrir, ils doivent filer le parfait amour dans leur maison de campagne. J'en sais rien. Ma mère a peut-être enfin réussi à vendre ses peintures, mon père est peut-être devenu encore plus cons qu'avant, peut-être même qu'ils sont retournés en Écosse, aucune idée ! Parlons d'autre chose ! » Je retiens une grimace. Je note. Les parents, sujet sensible. A ne pas aborder à moins qu’il soit calme. Même si j’admets qu’il a piqué ma curiosité. Dans mon souvenir, il n’allait qu’assez peu contre l’autorité parentale, préférant se plier à leur plus grosses demandes, ne les envoyant se faire voir que lorsque je l’y poussais. J’ai eu une influence dégueulasse sur lui quand on était gamin en fait… Je m’en rends compte maintenant. Peut-être que s’il n’avait pas croisé ma route, les choses auraient été très différentes pour lui. Je bois une gorgée d’alcool, essayant d’étouffer ma curiosité qui me pousserait à lui demander toute l’histoire. « Comme tu veux. Mais si t’as envie d’en parler, n’hésite pas. Je serais là pour écouter. » C’est amusant, soudainement, j’ai un peu la sensation d’être à l’une de ces soirées avec Leonard. Ça fait longtemps que je ne l’ai plus vu d’ailleurs… Je devrais peut-être penser à essayer de reprendre contact avec lui. « Et sinon, à la Confrérie, tout se passe bien ? Oui, je sais, on n'a dit qu'on en parlait pas mais bon, on va pas rester assis là en silence comme un vieux couple de septuagénaires » Je grimace légèrement. Sans un mot, je me tourne sur ma chaise pour qu’il puisse voir mon dos et je tire sur l’écharpe qui ne quitte presque plus mon cou, dévoilant la petite cicatrice si caractéristique. Je remets ensuite le tout en place pour lui faire face. « T’as du voir l’info dans les journaux quand ça s’est passé. C’était… J’sais pas comment des mutants peuvent faire ça volontairement. »

Je tire un peu trop fort sur ma cigarette alors que je repense au centre de recensement, à la main de Klaus dans celle de Maverick. Je relâche la fumée en un soupire. « C’était pas drôle à vivre. Si j’avais pas eu de partenaire avec moi, j’aurais probablement pété les plombs avant la fin de la procédure. Fin bref… C’est finit maintenant et Chipset est en train de bosser sur les puces donc tout est bien qui finit bien. » Je soulève mon verre, l’apportant à mes lèvres. La culpabilité est toujours présente et j’admets avoir besoin d’en parler à quelqu’un. « Mêmesil’amantdeGrahametmoions’estenvoyéenl’airlejouroùonnousaposécettemerdedanslanuque. » Je bois ensuite une grande gorgée d’alcool, comme pour désinfectée la plaie maintenant que le sparadrap a été arraché. « Je t’en parle mais garde ça pour toi, ok ? Je sais que Graham et toi vous vous entendez pas du tout mais vient pas agiter ça sous son nez par plaisir sadique. Ce qu’on a fait, son amant et moi, c’était une connerie. On avait bu, on était perdu, on avait besoin de réconfort et on pouvait pas aller voir nos proches parce qu’on était tracé par gps. Lui et moi, on est d’accord là-dessus, on est juste ami et rien de plus. » Nouvelle gorgée de whisky pour apaiser la culpabilité.

Je regrette presque immédiatement d'avoir demandé pour la Confrérie. Je vois déjà l'engueulade venir de loin. Sur ce sujet, on n'est clairement pas d'accord et il sait à quel point j'ai désapprouvé son plan de se faire recenser. J'ai des hauts-le-coeur rien qu'à l'imaginer pucé comme un chien. Je pensais que la Confrérie protégeait leurs semblables et au lieu de ça, ils en envoient deux à l'abattoir. Bien joué les gars, vous inspirez vraiment la confiance. Ce grand Magneto n'a même pas les couilles de se charger de ça lui-même, il préfère sacrifier ses précieuses petites troupes en missions suicides inutiles. Tss, tu parles d'un leader !

Je prends une grande inspiration, restons calme, rien n'a encore été dit. C'est pas la peine que je m'épuise à m'énerver tout seul, autant attendre d'avoir une raison de le faire. Wow, je deviens raisonnable, c'est donc ça, les dégâts de la vieillesse. « T’as du voir l’info dans les journaux quand ça s’est passé. C’était… J’sais pas comment des mutants peuvent faire ça volontairement. » Je grimace à la vue de la cicatrice. J'ai du mal à imaginer la torture que ça doit être. De sentir l'aiguille se reprocher doucement de sa nuque et de sentir sa liberté fondre comme neige au soleil, comme si elle n'avait jamais vraiment existé. Je sais pas si je supporterais une telle chose, de perdre ce que j'ai toujours chérit, de devoir rentrer dans le rang, de respecter les règles. Je pense que le pire, ce serait de devoir dire adieu à ce métier. Eh oui, données GPS et activité criminelle ne font jamais bon ménage. Devoir dire au revoir à Icare, je doute de pouvoir le supporter. C'est le travail de toute une vie, j'ai tout investi dans cette organisation. Si je venais à perdre Icare, je perdrais tout.

« C’était pas drôle à vivre. Si j’avais pas eu de partenaire avec moi, j’aurais probablement pété les plombs avant la fin de la procédure. Fin bref… C’est finit maintenant et Chipset est en train de bosser sur les puces donc tout est bien qui finit bien. » J'esquisse un demi-sourire. ''Tout est bien qui finit bien'' C'est presque cynique quand on y pense. ''Je suis pas mort du cancer mais maintenant, j'ai le SIDA''. Je porte mon verre à mes lèvres. Je suis aigri aujourd'hui, je ne devrais pas être aigri pour fêter l'anniversaire de Niall « Mêmesil’amantdeGrahametmoions’estenvoyéenl’airlejouroùonnousaposécettemerdedanslanuque. » Je m'étrangle littéralement. « Vous avez fait quoi ?! » Je m'attendais à tout, mais alors, ça. Je vois déjà la tête de Graham le jour où il va l'apprendre. Ça va lui briser son petit cœur. « Je t’en parle mais garde ça pour toi, ok ? Je sais que Graham et toi vous vous entendez pas du tout mais vient pas agiter ça sous son nez par plaisir sadique. Ce qu’on a fait, son amant et moi, c’était une connerie. On avait bu, on était perdu, on avait besoin de réconfort et on pouvait pas aller voir nos proches parce qu’on était tracé par gps. Lui et moi, on est d’accord là-dessus, on est juste ami et rien de plus. » Bien sûr. Juste ''amis''. « Je suis déçu que tu penses que je vais aller lui raconter par pur plaisir sadique. C'est clairement pas mon genre » Je finis mon verre et j'en commande deux autres.

Je porte à mes lèvres le nouveau verre de Whisky quand d'un coup, la musique et les lumières s'éteignent. Je repose le verre et je dévisage Niall « Ça arrive souvent en ce moment » Je laisse ma phrase en suspens. Peut-être qu'il possède des informations sur ces coupures d'électricité, grâce à la Confrérie, notamment. Il serait temps qu'elle serve à quelque chose. On pourrait s'attendre à un quelconque affolement de la part des gens mais ils se contentent d'attendre en bavardant, à croire qu'ils se sont habitués à ces coupures intempestives. Finalement, quelques-uns se lèvent, payent leurs consommations et se décident à partir. Je vois d'ici la mine déconfite du barman qui sait qu'il va perdre un paquet d'argent ce soir à cause de cet incident. J'avale une gorgée et je repose bruyamment mon verre « Bon, on en était où ? Ah oui, aux révélations ! Pendant que tu étais en vadrouille pour ta mission, Lux et moi avons eu un accident de voiture. Elle s'est cassé le fémur, c'est pour ça que c'est silence radio de son côté en ce moment. Je lui ai dis de se reposer avec interdiction de bouger. Même si bon, la connaissant, elle va pas rester bien longtemps en place » Je lâche un rire léger pour ponctuer ma phrase. Je serais même étonné de la savoir affalée dans son canapé à regarder la télé toute la journée. Si elle n'est pas sur le terrain, elle doit sûrement être en train de faire des recherches sur internet ou de couvrir certains de nos membres. Icare serait pas pareil, sans elle.

« En parlant d'Icare, j'ai un projet. Un gros projet... Tu vois qui c'est, Milo Stevenson ? » J'esquisse un large sourire d'excitation, j'ai l'air d'un gamin à Noël. « Ça fait des semaines que je travaille dessus. Je connais chaque recoin de la maison et je connais même les moindres déplacements de son chien de garde personnel. Avec ce projet, ça va donner un sacré coup dans les burnes du Parti Collectif, en plus de nous faire gagner un paquet d'argent »

Les lumières s’éteignent et cela suffit à peine à arriver à me faire lever mon nez de mon verre. Je tire sur ma cigarette. « Ça arrive souvent en ce moment » Les paroles d’Aidan font écho à mes pensées. Il doit forcément être en train de se tramer quelque chose qui nous échappe tous… On essaye de nous faire croire dans les infos qu’il s’agit de problèmes à la centrale électrique du coin, le temps qu’ils fassent des travaux mais je n’y crois pas. Il est en train de se passer quelque chose qui nous dépasse tous de loin. Ou de moins loin mais je ne pense pas que ce soit quelque chose que l’on puisse deviner de nous-même. Cela mériterait qu’on porte un peu plus d’attention à ces phénomènes. Déjà, des clients se lèvent pour quitter le bar. Je les regarde du coin de l’œil alors que j’écrase ma cigarette dans le cendrier de notre table. Je laisse mon regard curieux se balader sur les clients ayant décidés qu’ils n’étaient pas venu pour boire dans le noir. Le bruit du verre d’Aidan claquant sur la table me fait sursauter. « Bon, on en était où ? Ah oui, aux révélations ! Pendant que tu étais en vadrouille pour ta mission, Lux et moi avons eu un accident de voiture. Elle s'est cassé le fémur, c'est pour ça que c'est silence radio de son côté en ce moment. Je lui ai dit de se reposer avec interdiction de bouger. Même si bon, la connaissant, elle va pas rester bien longtemps en place » Je grimace sous la nouvelle. J’en avais pas eu la moindre putain d’idée. Cela a dû arriver pendant que j’étais coincé avec ma puce dans la nuque. « Merde. Ça craint. » Je ne lui ferais pas l’affront de lui demander comment c’est arrivé. Je suis déjà un ami suffisamment absent comme cela que pour ne pas le lui faire remarquer davantage. Pourtant ma curiosité se pique… Peut-être que je passerais voir Lux pour lui demander comment s’est arrivé. « Je passerais lui amener un whisky, ça l’aidera à attendre d’être rétablie. » Je sais parfaitement à quel point cela peut être insupportable d’être alité alors que l’on ne veut que se rendre utile et aider.

« En parlant d'Icare, j'ai un projet. Un gros projet... Tu vois qui c'est, Milo Stevenson ? » Je grimace alors que j’entends ce nom aux sonorités si familières. « Comment ne pas le connaître ? Toute la ville sait qui c’est. » Pourtant, ce n’est pas le dégout que je m’attendais à voir sur le visage d’Aidan que je perçois. Qu’est-ce que cette tête de nœud a encore prévu ? « Ça fait des semaines que je travaille dessus. Je connais chaque recoin de la maison et je connais même les moindres déplacements de son chien de garde personnel. Avec ce projet, ça va donner un sacré coup dans les burnes du Parti Collectif, en plus de nous faire gagner un paquet d'argent » Je manque m’étouffer dans mon verre. Je tousse un long moment, essayant de récupérer une respiration normale. « Tu vas quoi ?! » Je me racle la gorge, baissant d’un ton pour essayer de me faire un chouïa plus discret. Ce qui n’est pas difficile compte tenu que sous la surprise, ma voix s’est un peu emballée. « Mais t’es dingue ma parole ? T’en as pas eu assez avec le scandale qu’a fait son kidnapping ? Le Parti Collectif à gagnés pas mal de partisans avec histoire et tu voudrais continuer de victimiser ce mec ? Tu veux en faire un martyr ou quoi ?! » Bien qu’un vol semble tout de suite moins ciblé qu’un kidnapping pro-mutants, il faut tout de même savoir choisir ses cibles… Et agir quand cela a du sens, quand cela peut réellement débloquer les choses. Voler le vice-président du parti collectif, certainement, l’idée est belle et alléchante. Ça serait effectivement un beau doigt à faire à ce parti de pourris… Cependant… Il ne faut pas perdre de vue les conséquences que cela peut avoir. « Imagine, tu te fais choper ? Sans puce ni quoi que ce soit… Si la presse s’empare de l’affaire, tu fais leur pub. T’as intérêt à avoir un plan en acier si tu ne veux pas lui offrir gracieusement ton cul. »

Rendu un peu nerveux par les propos de mon ami, je me rallume une clope presque fébrilement. Je tire un coup dessus et je soupire, recrachant la fumée. « Je… Désolé… C’est toi le boss et tu sais ce que tu fais. Mais… Stevenson… C’est un putain de gros morceau… Tu vas mettre qui dans ton équipe sur ce coup ? Sa résidence est plus sous surveillance ? Je pensais que c’était le cas depuis qu’il a été kidnappé. » Je tire à nouveau sur ma clope  et je me passe une main dans les cheveux. Je sais que je ne devrais pas mais… « Ça m’inquiète de savoir que tu te lances dans un coup pareil… Surtout, fais pas le con… »

Ça va aller, Niall, reprends ton souffle, j’ai encore rien dit. Tu ne sais même pas encore ce que j’ai prévu de faire, même si, soyons sérieux, les possibilités ne sont pas nombreuses. Je ne vais pas me rendre chez ce mec pour prendre un verre avec lui et discuter calmement de nos points de vue. Non, c’est bel et bien un vol que je vais commettre. Et un gros. Non seulement je vais ramener un paquet d’argent à Icare mais en plus, le Parti Collectif va se retrouver aussi chamboulé que son vice-président. Il ne manquera plus qu’à lui donner une petite pichenette et tout s’effondrera. C’est pas beau ? « Tu vas quoi ?! » Je lève les bras, vas-y parle plus fort, je crois que tout le monde ne nous écoute pas encore.

« Mais t’es dingue ma parole ? T’en as pas eu assez avec le scandale qu’a fait son kidnapping ? Le Parti Collectif a gagné pas mal de partisans avec cette histoire et tu voudrais continuer de victimiser ce mec ? Tu veux en faire un martyr ou quoi ?!
- Ça va, le traite pas comme si c’était une princesse. C’est un grand garçon, il pourra supporter une crasse de plus. »

Bien que la vision d’un vice-président en train de prendre pied me fait doucement plaisir. Plus il prendra de coup, moins il sera concentré sur son travail et ça laisse le champs libre à beaucoup de monde. Ce qui compte, c’est les retombées publiques. Certes, le cambriolage passera dans le Times mais ce qui va surtout intéresser ces rapaces de journalistes, c’est la manière dont Stevenson va encaisser ça. De toute façon, c’est décidé. Rien de ce que Niall dira ne me fera changer d’avis, je bosse depuis longtemps sur ce projet, c’est pas ses inquiétudes qui me feront renoncer. Je tenais simplement à le mettre au courant.

« Imagine, tu te fais choper ? Sans puce ni quoi que ce soit… Si la presse s’empare de l’affaire, tu fais leur pub. T’as intérêt à avoir un plan en acier si tu ne veux pas lui offrir gracieusement ton cul. Je… Désolé… C’est toi le boss et tu sais ce que tu fais. Mais… Stevenson… C’est un putain de gros morceau… Tu vas mettre qui dans ton équipe sur ce coup ? Sa résidence est plus sous surveillance ? Je pensais que c’était le cas depuis qu’il a été kidnappé. Ça m’inquiète de savoir que tu te lances dans un coup pareil… Surtout, fais pas le con…
- Mec, calme-toi, je sais ce que je fais, ok ? C’est mon job, je te rappelle. »

Je tire sur ma cigarette, en attendant qu’il se calme, je m’attendais à cette réaction de sa part. Il est beaucoup trop surprotecteur. Il ne sait encore rien sur ce projet et il s’inquiète déjà. Depuis le temps que je fais ce boulot, je sais ce que je fais, je ne suis pas un amateur. Ça m’énerve qu’il me traite encore comme si j’étais toujours ce gamin d’Edimbourg. Je n’ai pas besoin de son inquiètude ni de ses doutes. Je suis un professionnel, un des meilleurs. Je ne cours pas après une étoile inateignable, je sais ce que je fais et je sais ce que ce projet va être un succès. Cependant, je n’aurais pas la paix tant qu’il ne sera pas rassuré. Très bien. « Stevenson est à genou depuis son enlèvement, s’il tombe, le Parti va prendre un sacré coup. Et puis, il est plein aux as, c’est tout bénef pour nous… Ou pour la Confrérie, Stevenson sera tout retourné de s’être fait cambrioler, ce sera le moment de frapper » J’écrase ma cigarette dans le cendrier. « Et puis, si jamais je me fais choper, le pire que je risque, c’est un allé simple pour la prison. Stevenson n’a certainement pas de détecteur de mutants chez lui et de toute façon, c’est pas comme si ma mutation était quelque chose de visible et d’impressionnant. Il pensera simplement que je suis un humain un peu trop ambitieux et c’est tout. De toute façon, je n’ai pas prévu de me faire prendre… Ni d’échouer »

L’agacement d’Aidan se peint sur son visage. Ça me fait chier mais je comprends. J’aime pas non plus quand il critique mes choix de missions pour la Confrérie. Mais merde… Comment comptait-il que je prenne l’information ? Voler un putain de riche, une toile importante ou quoi que ce soit du genre, ouais, pourquoi pas. Ça fera la une des journaux et puis c’est tout. Là on parle de s’en prendre à une putain de figure politique. Qu’il réussisse ou qu’il se plante, son action aura des répercussions sur le climat politique de la ville, si pas de l’Etat. On va en parler et personne ne peut prédire la direction que va prendre les choses. Je comprends son désir de la foutre bien profonde au Parti Collectif. Je ne peux que l’appuyer dans ce sens. Mais s’il est bon dans son domaine, j’ai appris pas mal en manipulation politique depuis que je suis à la Confrérie. Et bordel, je vois tellement de possibilités pour qu’une idée pareille se finisse mal. « Stevenson est à genou depuis son enlèvement, s’il tombe, le Parti va prendre un sacré coup. Et puis, il est plein aux as, c’est tout bénef pour nous… Ou pour la Confrérie, Stevenson sera tout retourné de s’être fait cambrioler, ce sera le moment de frapper » Stevenson fait partie du potentiel aimable du PC. Dans le sens où il a le profil pour plaire, le profil qui inspire confiance. Et bordel, j’ai eu beau essayer de fouiner, je n’ai pas trouvé la moindre casserole dans son parcourt. Le seul défaut chez ce mec, ça a l’air d’être ça trop grande putain de gentillesse. A ce demander comment un mec comme lui a pu finir dans un parti pareil. Il ne colle tellement pas au profil… « Et puis, si jamais je me fais choper, le pire que je risque, c’est un allé simple pour la prison. Stevenson n’a certainement pas de détecteur de mutants chez lui et de toute façon, c’est pas comme si ma mutation était quelque chose de visible et d’impressionnant. Il pensera simplement que je suis un humain un peu trop ambitieux et c’est tout. De toute façon, je n’ai pas prévu de me faire prendre… Ni d’échouer »

Je passe une main sur ma nuque en laissant s’échapper un petit bruit frustré. Je sais comment Aidan fonctionne. Il est au moins tout aussi têtu que moi. Je n’arriverais jamais à lui faire entendre raison. Plutôt essayer d’abattre un mur avec une cuillère, j’aurais plus de chances. « Je me doute bien que ce n’est pas prévu au programme… Seulement… Fais attention à toi, ok ? Si la Confrérie m’a bien apprit quelque chose, c’est qu’on ne contrôle pas du tout la cascade d’évènements que peuvent engendrer une action. Stevenson est acculé pour le moment. C’est au moment où une bête est blessée qu’elle est la plus dangereuse. Bosse bien ton coup. Si tu te fais choper, je viens personnellement te chercher par la peau du cul pour t’en coller une que t’oublieras pas, ok ? Parce qu’une attaque sur le vice-président du Parti Collectif, quelques mois après son kidnapping par une optimisée, clairement, ils vont faire des vérifications sanguines s’ils te chopent. Enfin bref… Sois juste prudent, ok ? » Mon regard se plante dans le sien, essayant de lui faire passer mon inquiétude de manière sincère. J’en ai marre de m’engueuler avec lui. Depuis l’incident du musée, on n’arrête pas. Tout semble être une bonne raison pour se gueuler dessus. Parfois je me dis que j’ai plus brisé ce qu’on avait que je ne l’ai sauvé ce soir-là. Et à chaque fois, ça me laisse cette sensation de pincement désagréable dans la poitrine. Je suis fatigué de me battre contre lui. « On ferait mieux de rentrer… Lullaby a l’air épuisée par la balade. » Sans un mot de plus, je me lève et je me dirige au comptoir pour payer la note. Je n’ai pas envie de prolonger cette conversation et je n’ai pas envie de m’inquiéter outre mesure pour lui. Alors, pourquoi l’angoisse me tords les tripes quand je tends l’argent au barman ?