Sujet: I only fear my own reality [Ørvind & Loreine] Mer 30 Nov - 3:02
I only fear my own reality
“Ørvind Sveindsen & Loreine Marchand”
Humain. Il n’y a rien de plus humain que moi. Fragile, changeante, commettant un nombre incalculable d’erreur en permanence. Je ne connais aucune autre réalité que celle-ci. Celle où mon corps ne peut se défendre contre une balle de revolver, s’enfonçant dans mon épaule. Celle où mon esprit est l’hôte de deux indésirables personnalités supplémentaires, incapable d’être en harmonie avec la mienne. Je suis tout ce qu’il y a de plus humain, peu importe ce qu’Anna prétend. Je ne suis pas mutante, ni optimisée. C’est peut-être là mon problème. En possession d’un pouvoir, cette peur, ce sentiment d’impuissant constant, se verrait peut-être absent? Cette idée vogue librement dans ma tête depuis quelques semaines déjà. Après tout ce qui m’est tombé sur la tête depuis mon déménagement de Montréal pour New York, voilà que je remets en question ma propre nature. J’ai été prise au piège dans cet immeuble du centre-ville et Tony m’a sauvé. J’ai été contaminée par le virus X1R1, puis on m’a guérit. J’ai été victime de cet attentat lors de la manifestation anti-mutants, blessée presque mortellement par cet homme complice de l’explosion du siège social du Parti Collectif. Je dois me rendre à l’évidence que j’attire le malheur à moi. Il colle à ma peau et persiste à me faire souffrir. Même avant d’être dans cette ville américaine, ma vie n’était pas sans malchance. En fait, plus j’y réfléchis et plus je déniche des souvenirs en ce sens. Leur accumulation cause en moi un sentiment bien peu agréable. Je me lève le matin sans cesse de mauvaise humeur. Je ne souris plus, évite de parler aux gens autour de moi. Mon esprit est ailleurs, coincé dans des réflexions malsaines. Je songe à ma vie et cela me déprime. Cela me rend également furieuse. Une multitude d’émotions se combinent pour donner un cocktail bouillant. Je ne dirais pas que je suis enragée contre quelqu’un ou quelque chose. S’il y a un coupable dans cette histoire, c’est moi-même. Je me sens seulement à bout de nerfs. J’ai l’impression que mes pensées ne s’accordent plus pour me permettre un raisonnement congruent. Chaque décision que je prends dans mon état actuel ne reflète pas ma personnalité. Une Loreine certes timide, mais qui voit tout de même du positif dans certaines choses et qui est naïve et innocente. Loin me semble être cette personne avec laquelle je me suis pourtant définie toute ma vie. Suis-je perdue? Est-ce ce qui me trouble à ce point depuis la manifestation? Je ne saurais le dire avec certitude. Je sais seulement que mon esprit à déjà commencé à craquer. Je peux en sentir les conséquences un peu plus chaque jour. Dans mon impatience, dans mon apathie, dans ma haine encore plus marquée envers les autres êtres. Humains comme mutants.
Une simple activité comme être à la banque afin de faire une transaction m’exaspère. Je suis la troisième dans la file. Pourtant, même si j’avais été la première à attendre, cela ne m’aurait pas convenu. Le monde ne tourne plus comme je le souhaite. Je me sens décalée de lui et j’ai beau courir pour le rattraper, retomber au même rythme que les autres, je m’époumone en vain. Je dois donc subir cette cadence, croisant les bras sur ma poitrine, évitant de fixer quelque chose en particulier. L’attente n’est pourtant pas longue aujourd’hui. J’ai déjà connu bien pire. Sauf que tout ce que j’ai enduré avant n’a plus la même valeur à présent. En tournant la tête dans une direction quelconque, je remarque plusieurs personnes. Mon œil s’attarde sur deux hommes. Les deux individus sont grands et dégagent quelque chose qui attire mon attention pourtant déficitaire en ce moment. Je suis l’un des deux hommes qui s’avance d’un pas assuré vers les employés de la banque. Il n’est pas très loin de moi lorsqu’il glisse sa main dans son manteau et en ressort une arme. Je n’ai d’abord aucune réaction. Les gens se couchent au sol autour de moi, comme sous un ordre soudain. Je reçois l’aboiement de l’homme armé en décalé, réalisant alors ce qu’il représente vraiment. Mon résonnement n’est pas bon, mon corps ne comprend pas l’ordre simple qu’on lui demande. L’homme se tourne donc vers moi en remarquant ma désobéissance et le canon de son arme suit son mouvement, me menaçant du même coup. Un souvenir remonte à la surface. Celui de moi, à genoux, implorant qu’on m’épargne. Puis la seconde suivante, dans ce même souvenir, la balle se logeait dans ma chair et me causait la plus grande souffrance de mon existence. L’homme s’approche en criant à nouveau. Alors, j’ai enfin une réaction. Je me jette sur lui, mes mains s’abatant sur la première partie de son corps qui m’est accessible. Il reçoit avec violence ma paume dans son œil et la seconde le frappe au niveau du cou. Il semble s’étouffer, ne réagissant pas sous la surprise. Je ne m’arrête pas là. Mes doigts s’enfoncent dans ses vêtements comme les serres d’un rapace et je le pousse à nouveau. Il réalise alors l’agression et me frappe durement à la tempe gauche. Ma tête hurle sa douleur, ma vision se troublant et mes oreilles bourdonnant. Une pression atroce accable le côté meurtrie de mon crâne. Aussi étrange que cela puisse paraître, le coup ne m’arrête pas. Sans trop comprendre comment, je renverse mon adversaire au sol et je me retrouve en possession de l’arme. Elle est dans ma main et je me relève en titubant à cause de l’étourdissement, conséquence du coup à ma tempe. Je manque tomber et je vois dans le brouillard qu’est ma vision le second grand homme. Le canon de l’arme se retrouve à frôler son torse alors qu’il est juste à côté de moi et la détente qui résonne soudainement dans mes oreilles me fait sursauter. Mon doigt s’est refermé instinctivement sur la détente, alors que je cherchais plutôt à m’agripper à quelque chose pour ne pas tomber. La détonation fait écho dans mon crâne alors que ma vision s’éclaircit au moment de voir la balle ressortir du corps de l’homme. J’écarquille les yeux en constatant qu’il n’est pas blessé. Pourtant, il le devrait. La balle à traverser son corps. Où est le sang? Où est la souffrance? Je lâche le revolver qui tombe contre le plancher poli. Dans un ultime étourdissement, je tombe vers l’avant, ma main arrêtant mon geste. Je me retrouve le nez près du trou de balle dans ces vêtements. Il n’y a effectivement aucun signe de dommage à son corps. Alors, je panique. La peur me revient et me serre la gorge, avortant le moindre cri. Je pousse cet homme de mon chemin, manquant tomber sous l’effort. Je me mets à courir hors de la banque. Je ne veux pas affronter un mutant. Je refuse même. Ma tête n’a pas terminé son concert de douleurs. Je dois appliquer une main contre mon côté gauche dans l’espoir vain de calmer un peu cette souffrance. Je sens ma vie en danger, j’ai besoin de fuir très loin. Je ne regarde pas où je vais. Je me rends seulement compte de l’environnement qui m’entour lorsque je me cogne presque contre un cul-de-sac. En me retournant, je perds une fois de plus l’équilibre et cette fois je ne peux prévenir la chute. Je me prends la tête à deux mains et je ferme les yeux. Mon crâne va exploser.