Hey, what did you expect? [ft. Marian & Ørvind]

 
 

 

Le voyage lui fait un peu peur. Marian est prise d'une légère appréhension au moment où elle glissa sa main dans celle d'Asper pour qu'il téléporte avec elle. La dernière fois qu'elle a fait ce genre de voyage, c'était en présence de Loki et elle a fini par vomir ses tripes dans la salle de bain du Loft. Il faut dire que les circonstances étaient de mises. Le bras qui enroule sa taille à l'avantage de la rassurer et elle ferme les yeux par réflexe, comme quand on s'apprête à sauter dans le vide.
L'arrivée dans la chambre s'accompagne d'une sensation étrange de vertige et alors qu'elle ouvre les paupières, la brune capte que son confrère s'est éloigné d'elle et se soutient le crâne, une expression de douleur sur le visage.

« Asper ! Est-ce que ça va ? » Les mots sont sortit précipitamment de sa bouche alors qu'elle réduit la distance entre eux pour le soutenir. Mais avant qu'elle n'ai put faire quoi que ce soit, Asper lui fait un signe de tête et ouvre la porte de la chambre pour se rendre dans la pièce principale.

Pendant quelques secondes, Marian observe la chambre de l'homme avec un petit sourire amusé de la situation, et se décide à suivre ses pas. Les lieux sont plongés dans la pénombre et elle perçoit le dos d'Asper dans l'encadrement de l'entrée du salon. La brune le rejoint, effleurant brièvement son dos, le regard inquiet et au moment où elle s’apprête à s'adresser à nouveau au mutant, c'est une autre voix qui s'élève dans la pièce.

«  You know friend, this is a god damn bitch of an unsatisfactory situation... »

Marian tourne vivement la tête vers le téléviseur allumé d'où provient la réplique d'un film qu'elle a déjà vu, et son regard glisse alors automatiquement sur le canapé. Canapé où se trouve Ørvind, la main tenant une chips à mi-chemin de sa bouche, comme figé dans le temps, le tout agrémenté d'un regard écarquillé. Il faut un instant de flottement à la jeune femme pour comprendre la stupeur du Norvégien. Ne vient-elle pas de sortir de la chambre d'Asper en compagnie de ce dernier, une chemise à lui sur le dos ? Dans la pénombre, la pièce juste éclairée par la télévision, on ne doit en plus pas discerner que la chemise est tachée de sang, ou que ses yeux sont gonflés d'avoir pleuré.
En temps normal, Marian aurait éclaté de rire devant un tel quiproquo, tout en balançant des piques à l'attention d'Asper. Pas aujourd'hui. Pas maintenant.
La situation a beau être comique, d'autres choses viennent chambouler l'esprit de la jeune femme. Comme par exemple, le fait que cela fasse plus d'un mois qu'elle n'a pas remis les pieds ici, ni revu Ørvind. Elle imagine sans peine la surprise de ce dernier à la voir revenir du jour au lendemain sans prévenir. Enfin si, elle avait dit à Niall qu'elle rentrerait bientôt mais il y avait eu des imprévus plusieurs jours d'affilés, et finalement cet accident de train dans la matinée. Une fraction de seconde, Marian se demande bêtement si son vieil ami va la reconnaître. Cela ne fait qu'un mois qu'elle est partie pour sauver sa peau mais elle a l'impression qu'il s'est écoulé des années depuis la dernière fois qu'ils se sont vu.

Un mouvement d'Asper fait tourner les yeux à la jeune femme et elle le voit tenter de parler avant de s'interrompre. Il ne semble pas savoir comment expliquer les choses, par quoi commencer, et elle ne peut que le comprendre. Pour autant, si elle doit être celle qui raconte les évènements, elle a quelque chose de plus important à faire en priorité. Une main se posant sur le bras d'Asper pour lui intimer de se pousser afin qu'elle passe devant lui, Marian se dirige vers le canapé. Elle s’assoit sur le bord et, comme s'il s'agissait de la chose la plus naturelle du monde, et elle l'est à ses yeux, la brune enlace Ørvind du peu de force qu'il lui reste. Marian a toujours perçu sa relation avec le Norvégien comme exceptionnelle et privilégiée dans sa vie. Contrairement à tous les gens qui entrent et sortent de son existence sans y laisser de traces, Ørvind lui, est depuis leur première rencontre il y a quinze ans, alors qu'elle n'était qu'une gamine, son repère le plus fiable. Et si à ce jour rien, ni les aventures passionnées et la fin de celles-ci, ni les absences et les départ, n'ont put briser cette profonde amitié à son encontre, rien n'en sera jamais capable. Marian n'est pas une femme de certitudes, surtout en ces moments troublés et difficile, mais si elle ne doit en avoir qu'une, c'est belle et bien celle que le Norvégien sera toujours là quoi qu'il arrive.
La brune resserre légèrement son étreinte, qui ne dure finalement que quelques secondes avant qu'elle ne libère son ami non sans l'avoir gratifié d'un baiser sur la joue. Rien d’ambiguë là-dedans, il y avait bien longtemps qu'il n'y avait plus d’ambiguïté entre eux, seulement cette affection désormais presque pure et à l'épreuve de tout. Et si le sourire qu'elle tente d'offrir à Ørvind est quelque peu rouillé, sa voix douce est pleine d'humour alors qu'elle pique dans le paquet de chips.

« Je ne t'ai pas trop manqué j'espère. »

Il ne faut cependant pas se leurrer sur le but de cet humour, destiné à atténuer la gravité des choses qu'elle va sans doute devoir raconter à son ami, qui ne la laissera probablement pas partir se coucher sans savoir ce qu'elle a fait durant tout un mois lâchée dans la nature avec les autorités aux fesses.
Tournant la tête vers Asper pour plonger son regard dans le sien, elle s'adresse cependant à nouveau au Norvégien.

« J'ai appelé ici tout à l'heure et... » Elle esquisse un petit sourire désolé en baissant les yeux. « Asper est venu m'aider. » Tout dans cette phrase doit sonner étrangement étant donné les rapports tendus entre les deux concernés, mais ce n'est que pure vérité.

 
 

 

La brève étreinte partagée avec Ørvind embaume le coeur de la brune qui en est à l'initiative. Quand elle le relâche, le sourire du norvégien semble illuminer les ténèbres qui régissent son existence depuis quelques semaines et Marian doit se faire violence pour ne pas faire l'enfant et se rouler en boule contre lui pour l'éternité. Mais l'intangible semble confus, cherchant ses mots en passant de la brune, à son meilleur ami.

« D'accord... Et, hm, il t'a aidé... dans sa chambre c'est ça ?»

Marian ouvre la bouche en écarquillant les sourcils, prise de court par les sous-entendus de cette question. A moins qu'elle ne les invente..? Elle bégaye, tente d'aligner des mots qui s'entrechoquent dans sa gorge mais de nouveau, la voix de Vind s'élève. Plus inquiète cette fois.

« Par Odin, Marian !» Il tente de bouger sa jambe pour se redresser et finalement, c'est la mutante qui se lève du canapé, toujours légèrement courbé et un sourire gêné sur le visage. « C'est du sang ? Tu vas bien ? Asper, tu vas bien ?! Qu'est ce qui s'est passé ? Et pourquoi vous ne ne m'avez pas appelé sur mon téléphone portable ?»

Les réponses sont simples mais Marian n'arrive pas à les sortir. Pour la simple et bonne raison qu'elle a reportée son attention sur Asper et que ce dernier semble ne pas aller très bien. Elle se mord la lèvre, coupable de lui avoir fait faire de longs trajets dans un si court laps de temps.

« Ca va, t’inquiètes. On était à l’hotel, y’avait un mec, ca s’est pas passé comme prévu, et puis elle était blessée…»

Sa voix chancelle avant de s'éteindre et machinalement, Marian fais un pas dans la direction du physicien. Il vient de prendre appui sur un mur et souffle longuement, visiblement en proie à la même douleur qui s'est imposée à lui dans la chambre. Un pli soucieux entre les sourcils de la brune se creuse.

« Tu ferais mieux de... » La brune ne termine pas sa phrase car à cet instant même, Asper chute en avant sur le sol de l'appartement. « Asper ! » L'exclamation inquiète est un réflexe, comme celui de bondir vers le physicien, face contre le parquet. Marian s'accroupie en le retournant sur le dos, dévoilant son visage fermé dans l'inconscience. Ses prunelles noisettes se lève vers le norvégien qui lui aussi s'est précipité vers son ami en le voyant chuter. « On devrait le porter à son lit... »

Evidemment, le confrériste acquiesce et tant bien que mal, ils soulèvent Asper. Marian aux pieds, Vind la tête. La brune a du mal à cause de son dos, le norvégien.. Titube. Malgré la situation, elle laisse échapper un bref rire. Elle n'avait pas rêvé l'odeur du whisky lorsque ses lèvres se sont posées sur sa joue mal rasée. Après tout, ne venait-elle pas d'en ingurgiter plusieurs gorgées à la chambre d'hôte juste avant ? Difficilement, Marian courbée à cause des entailles dans son dos qui recommencent à imbiber le bandage fait par Asper ainsi que la chemise blanche, entre la première à reculons dans la chambre de ce dernier. Vind ne tarde pas et alors qu'ils pivotent, la tête d'Asper, toujours inconscient, heurte le coin d'un meuble sous le regard mortifié du norvégien face à sa propre maladresse. En dépit de la situation et de son inquiétude, et sans doute à cause des nerfs, la brune laisse à nouveau échapper un rire alors qu'ils finissent par reposer le physicien sur son lit.
Ceci étant fait, elle se rapproche de son vieil ami et pose doucement une main sur son bras, l'autre désignant l'inconscient.

« Reste près de lui, je vais chercher une poche de glaçons pour la future bosse... De son front, la bosse. » Elle ne sait pas pourquoi elle précise et pouffe de rire en quittant la pièce. Marian continue de rire doucement jusqu'à là cuisine.
Mais alors qu'elle farfouille dans les tiroirs de cette cuisine où elle a pendant des semaines préparés les petits déjeuners de son vieil ami et ancien amant, le rire de la brune se transforme petit à petit en sanglots qu'elle étouffe d'une main tremblante.
Revenir ici après ce qui lui semble être des années, étreindre Vind, revoir sa maladresse, son sourire, entendre sa voix et sentir son odeur... Ce sont des choses qu'elle avait préféré condamner dès le début de sa fuite avec Logan. Elle ne pensait pas y avoir à nouveau droit un jour. Le bonheur au bout des doigts. Se retrouver ici, avec son plus vieil ami et sans doute la personne la plus chère à son coeur au fil des années gonfle son coeur à un tel point qu'elle suffoque dans ses larmes. Silencieusement, Marian remercie le ciel pour ce cadeau. Cette trêve. Cette pause dans sa fuite perpétuelle. Car elle sait qu'elle ne restera pas longtemps, comment le pourrait-elle ? Hors de question de mettre qui que ce soit en danger. Encore moins les personnes présentes ce soir.

Après quelques minutes pour se calmer, reprendre une respiration plus calme et essuyer son visage, la brune prend à nouveau la direction de la chambre avec une poche à glaçons dans une main. Avec délicatesse, elle s'approche du lit où Vind surveille toujours un Asper inconscient, et dépose la poche sur le front où se formera malgré tout un bleu pour plusieurs jours. Un bosse s'il est moins chanceux. Un instant, son regard glisse sur le visage d'Asper, la culpabilité pesant sur ses épaules douloureuses. Finissant par se relever pour à nouveau rencontrer le regard du norvégien.

« J'ai besoin d'aller prendre une douche, » souffle-t-elle avec un petit sourire en coin. Frotter pour enlever l'odeur du sang. De la mort. De la culpabilité. « J'ai laissé des affaires quand je suis partie, si elles sont toujours là quelque part tu peux me rapporter de quoi me changer ? Et sinon, si tu as un survêtement qui traîne ça fera l'affaire. » Doucement, elle se met sur la pointe des pieds pour poser un baiser sur sa joue, reconnaissante, et quitte la pièce.

Ce n'est pas la première fois que cette salle de bain accueille une Marian plus ou moins blessée, et elle n'attend pas pour ôter ses vêtements et les foutre dans un coin en attendant de pouvoir les laver. Elle se contorsionne comme elle peut pour remarquer que dans son dos, le bandage est déjà imbibé de sang. Un grognement mécontent lui échappe. Il va falloir recoudre les plaies les plus importantes. Mais pour l'instant, elle découpe les bandes à l'aide du ciseau pris dans la pharmacie, les enfourne dans la poubelle de la salle de bain et entre dans la douche. Si elle pouvait, elle se noierait sous le jet d'eau brûlante qui rougit sa peau. Tête baissée, elle regarde l'eau teintée de pourpre jusqu'à devenir opaque, s'écouler dans le siphon. Elle se demande comment elle va annoncer à Vind et Asper qu'elle compte seulement passer la nuit ici et repartir dès l'aube. Machinalement, nerveusement, l'une de ses mains vient serrer sa nuque, y enfonçant les ongles.