Ascenseur émotionnel (graham & maisie)

Graham & Maisie

Ascenseur émotionnel

Soupire à s’en fendre l’âme, la jeune femme traverse la rue en priant pour que la pluie cesse. Elle n’aime pas spécialement la pluie, parce que ca lui rappelle beaucoup trop son pays natal. Beaucoup pourrait dire qu’elle devrait être habitué, que le rappel de son pays devrait la réjouir. Et pourquoi donc ? Si vous êtes Italien, vous vous réjouissez dés que vous passez devant une pizzeria ? C’était des phrases toute faites, très connes, qui ont le dos d’agacer la jeune femme. En même temps elle n’a pas grand monde pour les lui dire, à présent qu’elle était une jeune demoiselle solitaire. Trop solitaire. Par les temps qui courent ce n’est pas la meilleure des stratégies que de rester isoler dans son coin en espérant se faire oublier du monde. On est dans le monde, on vit dans le monde, et elle n’a pas le pouvoir de devenir invisible. Il existait une sorte de tension en ville depuis quelques semaines maintenant, et elle n’y était pas insensible. Elle avait remarqué les regards en biais des gens envers les inconnus, la manière de chuchoter lorsqu’un Punk ou une Gothique passait dans la rue. Les mutants fichés, quelle connerie. Belle manière de faire naître une véritable chasse au psychopathe dans les rues de New-York. Pour sa part, Maisie ne voulait pas jouer à cela. Mais elle ne savait pas non plus comment le gérer, comment faire, est-ce qu’elle devrait bientôt changer ses habitudes ? Perdue, perplexe – surtout – elle avait décidé de réagir. Et comme d’habitude depuis trois ans elle se tourna vers la seule personne qu’elle considère comme un ami.
C’est un pseudo, plus qu’un être humain en réalité. Alors qu’elle a envoyé un mail à Chipset la veille, lui quémandant un entretient, une rencontre, après plusieurs années d’amitié cybernétique, elle sent un trouble étonnant la saisir. Elle ne connaît pas grand chose de ce type. Pas même son prénom, car elle se doute bien que Chipset c’est pas vraiment un pseudonyme normal. Tout comme elle ne pouvait pas s’appeler Imaginarium. Mais il l’a connu en premier lieu comme Maisie. Du reste, si elle a partagé avec lui ses angoisses, son expérience en Ecosse, et sa mutation, il n’a pas vraiment été du genre loquace. Elle ne sait même pas à quoi il ressemble. Si ca se trouve c’est un espèce de vieux barbu, énorme et chauve, qui passe son temps enfermé dans sa cave à regarder des films pornos en jouant à WoW. Ou peut être même est-ce que c’est une femme. Ou un flic. Un putain de flic qui traque les femmes solitaires, les mutants p’têtre bien, pour les kidnapper et les découper pour faire un supra-mutant. Mettant fin à son imagination par un rire sarcastique, elle a finit par trouver le chemin en recevant une réponse positive.

Elle aurait été vexée du contraire. Trois ans à se parler par internet c’était bien assez non ? Toutes ces filles qui rencontraient des mecs différents tous les jours grâce à Tinder elles prenaient bien plus de risque qu’elle. Peut être qu’il était temps qu’elle travaille sur sa confiance, et sa méfiance envers le monde extérieur et qu’elle ose enfin sortir et retrouver le contact avec les êtres humains. Elle avait déjà entamé cette nouvelle vie. Il y a trois jours elle était rentrée de plein fouet dans le torse dur d’Aidan. Son ex. Son premier amour. Son grand amour – remarquez son romantisme affligeant – qui avait tenté de lui voler son iPod. Elle sourit encore en y repensant, combattant la pluie avant d’atteindre un Starbucks. Il y a des Starbuck partout à New-York, c’est un truc qui lui plait. Quant à Aidan, elle gardait pour elle le plaisir de ses retrouvailles, ne sachant encore ce qu’elle pensait de tout cela. C’était si… si inattendu, si déstabilisant. Elle qui tenait à garder le contrôle avait l’impression de tout voir voler en éclats. Autant continuer, elle allait boire un café, un thé ou même un chocolat chaud avec Chipsey. Une idée qui la réjouissait.
Elle entra dans les lieux comme une combattante, une Spartiate trempée avec un air ravi. Elle portait un jean noir, un pull vert aux motifs aztèques, et une grosse doudoune avec une capuche qui couvrait entièrement son visage. Ses cheveux ne ressemblaient plus à rien (pour pas changer) et elle avait des grosses bottines qui la protéger de l’eau. Dans son sac en bandoulière elle avait simplement son paquet de clope, son téléphone, sa tabelle (comme toujours), ses clés, et ses sous. Elle est en avance et espère surtout qu’elle est au bon endroit.

Se rencontrer dans un Starbuck lui semblait être une bonne idée. Dans ce genre d’endroit, une fois qu’on a commandé un truc à manger, on peut se poser dans un coin sans qu’un serveur vienne faire chier toutes les deux minutes pour savoir si tout allait bien . Elle fit la queue, refusant d’attendre Chipset pour se réchauffer (il avait qu’à être en avance) et commanda un thé vert, un muffin, un pancakes, et deux cookies. Elle a faim. Vraiment faim. Avec son plateau elle va trouver une table dans le fond de la salle, et sort son smartphone. Elle envoie un mail à Chipset : Je suis arrivée, fond de la salle, pull aztèque. Il le verra sans doute, ce type devait être encore plus accroc à la technologie qu’elle.
Elle range son portable prend son cookies, et attend qu’il arrive. Elle aimerait s’allumer une clope, mais c’est interdit, et impossible de sortir sous la flotte en laissant ses affaires sur la banquette. Alors elle fumera pas. Tant pis. Elle attend, fixant la porte d’entrée jusqu’à ce que son mystérieux Chipset arrive. Elle grimace en voyant un adolescent de seize ans lui faire des œillades et le salue avec un majeur bien placé qui le fait rougir, et tourner les talons. Chipset peut être un putain de boutonneux. Impossible.

Enfin entra dans les lieux un visage qui ne lui était pas inconnu. Elle fronça les sourcils, et le fixa en se fichant qu’il s’en offusque. Elle connaît ce visage, elle en est sûre. Mais d’où ? Elle grimace, mangeant distraitement son second cookie sans le quitter des yeux. Elle le connaît. Elle en est sûre. Elle se perd dans ses souvenirs, et ses pensés, jusqu’à se rendre compte que le mec en question est devant elle. Elle revient à elle, se lève. Elle le replace pas, putain. « Un problème ? J’attends quelqu’un. » Dit-elle férocement. Avant que… L’idée lui traverse l’esprit et elle sourit de toutes ses dents. « A moins que vous ne soyez un technophile qui se fait appeler Chipset ? » Demanda-t-elle l’air de dire prenez moi pour une folle et je vous frappe.