Didn't I tell you I suddenly agree with you? ♐ Tony & Stephen

Si on lui avait dit qu'il allait faire ça un jour, il ne l'aurait pas cru. Stephen Strange s'était toujours considéré comme un homme qui se tenait à ses opinions, merci bien pour lui. Il n'était pas du genre à retourner sa veste d'un coup et jouer de belles paroles pour faire croire qu'il avait toujours été de cet avis, loin de là. Au contraire il se tenait à ses paroles et s'il n'avait pas le droit de les exprimer très clairement à cause de son statut, il s'accrochait à ses convictions et tentait de rester l'homme intègre qu'il était. Mais les choses avaient changé.
Strange n'avait pas été d'accord avec le Registraction Act dès l'apparition du projet de loi. Mais à partir du moment où elle était passée, il n'avait eu d'autre choix que de s'y plier. Il était Suprême avant homme, c'était la règle. Il n'était pas censé agir contre ce que les humains décidaient. Lui, c'était sur la magie qu'il avait autorité, et encore n'était-il que le shérif qui faisait appliquer les lois de celles-ci. Il n'était clairement pas décisionnaire, si encore il y en avait un.

En voyant les nouvelles, pourtant, l'homme qui ne devait pas intervenir avait fait un bond de surprise. Une équipe avait été mise sur pied afin de prévenir de toute intervention trop musclée pour les forces de l'ordre. Ca avait l'air noble sur le papier, après tout on ne voulait pas faire de mal à un pauvre citoyen comme les autres alors qu'on allait affronter des gens qui pouvaient soulever des montagnes. Mais le premier de ces membres était Venom. Un super-vilain d'ordinaire, c'était assez connu. Le voilà du bon côté de la loi à traquer les super-héros. Cela n'avait purement aucun sens, on marchait sur la tête. Comment Tony, à la tête d'ARES, avait-il pu laisser faire ça. Stephen appréciait grandement le milliardaire, mais là il lui semblait qu'il dépassait les bornes. Mais il savait aussi qu'il était têtu, il le connaissait assez pour ça. Alors Stephen avait pris sa décision. Si Tony laissait faire comme ça, ce serait lui qui plierai ses convictions. Il avait dit de ne pas agir. Mais que voulez-vous, il restait un homme. Alors il agissait.

Voilà pourquoi il venait de se téléporter au pied de la tour Stark. Il avait décidé de rejoindre ARES et venait faire part de sa décision à son ami. Awesome facial hair bros, les avait surnommés le génie, en raison de leurs barbes souvent taillées de façon similaire. Stephen n'avait pas trop aimé l'appellation au départ, mais il avait fini par s'y faire et l'adopter. Le Sorcier ne visitait pas souvent son ami à sa tour, aussi n'était-il pas sûr d'être immédiatement reconnu par les employés de l'endroit. Voilà pourquoi il était arrivé dans le bâtiment sans se téléporter directement à l'étage. Il avait passé les contrôles comme une personne banale et avait décliner son identité, s'était présenté comme un ami du boss. Il avait préciser la raison exacte de sa venue. Finalement, après vérification auprès de l'IA/assistante personnelle de Stark, il avait été autorisé à monter.

Lorsque l'ascenseur s'ouvrit, il ne fut pas surpris de la déco. Non seulement l'avait-il déjà vu une fois ou deux, mais en plus elle correspondait totalement au style de son propriétaire. Stephen se permit d'avancer jusqu'à l'un des canapés, il savait que Tony pouvait parfois mettre du temps à arriver. Ca ne le gênait pas, il avait le temps. Enfin, il aimerai quand même être rentré pour pouvoir promener Gatsby au lieu de laisser ça à Wong, mais ce n'était pas plus urgent que ce qu'il avait à faire ici. Bien au contraire, il valait mieux s'occuper de ça avant.

Enfin, il sentit l'aura de son hôte qui approchait. Il avait fait plus vite que ce à quoi Stephen aurait pu s'attendre finalement, à croire qu'il prenait à coeur le fait que Stephen veuille lui parler d'ARES. C'est ce qu'il avait annoncé en bas, après tout.

— Tony. J'espère que je ne te dérange pas, mais je dois t'avouer que ces derniers temps, on ne sait plus trop quand tu es occupé et quand tu ne l'es pas.

Stephen s'avance pour lui serrer la main. Il tente d’être ferme, pas la poignée de main d'une amie mais la poignée de main qu'une personne cherchant un emploi donnerait à son recruteur. C'est ce qu'ils étaient à ce moment-là, même si Tony ne le savait pas encore. Stephen espérait juste que ses foutues mains ne trembleraient pas trop. Ça leur arrivait encore, les blessures n'avaient jamais proprement guéri après tout. Il savait qu'il fallait être en forme pour entrer dans ARES. Il espérait juste que sa magie et son titre reconnu suffiront à compenser la fragilité de ses mains.

— Je ne te fais pas attendre dans le suspense plus longtemps, ce n'est pas mon genre. (Oh si ça l'était, mais aujourd'hui il n'était pas question de ça.) Je souhaite rejoindre ARES.

 

Tony ne tarde pas vraiment à venir, ce qui étonne un peu Stephen. Le jeune Stark est connu pour ne pas être un modèle de ponctualité, se montrant au contraire en retard, souvent en le faisait exprès d'ailleurs. Il ne donnait même pas toujours d'excuse, il n'était pas exactement connu pour être un lèche-botte. Au contraire, Stephen connaissait de Tony une réputation d'homme franc, parfois un peu trop, qui se s'emprisonnait pas dans des excuses pour se faire bien voir. Oh bien sûr il l'avait quand même fait poireauté quelques minutes, rien d'inhabituel. Mais Stephen a déjà attendu plus que ça après l'ingénieur. Une demi-heure un fois, il avait cru devenir fou.

— Je suis toujours occupé. Mais j’ai toujours du temps à débloquer pour mon Facial Hair Bros. Jolie coupe de cheveux, elle me rappelle quelqu’un.

Stephen passa machinalement une main dans ses cheveux. Ouais, lui et Tony se ressemblaient pas mal quand il s'agissait de pilosité. Les mêmes cheveux, les mêmes barbes… Ils n'avaient même pas fait exprès. Stephen en avait eu marre de sa pauvre moustache des années 70, il avait décidé de faire autre chose. Tony et lui avaient tout simplement eu la même idée au même moment. Leurs couples de cheveux aussi étaient similaires, même si ceux de Stephen avaient cette continuelle habitude de boucler quand on en avait le moins envie. Stephen ne prêta pas plus attention que ça au surnom, il avait fini par s'y habituer et même à l'utiliser lui-même. Il était débile, mais après tout Tony et lui pouvaient être les plus gros imbéciles de cette dimension, alors…

— Woh. Je n’aurais pas mieux fait en matière de recrutement. Normalement, je devrais te demander poliment si tu veux te joindre à moi… C’est ce qu’il se passe en général… Mais. Je ne vais pas m’en plaindre.

Ainsi Tony avait songé à le recruter ? Cela n'étonnait pas Stephen, il savait que les Avengers qui soutenaient Tony étaient peu. Ça l'inquiétait un peu à vrai dire. Il n'était pas pour la loi et comprenait les décisions du camps adverse, mais il savait aussi que le milliardaire avait besoin de soutien. Est-ce qu'il le recevait ? Est-ce que Rhodes ou Pepper se rendait compte des fardeaux que Tony portait ? Stephen les voyait, lui. Véritablement, il voyait les créatures accrochées à Tony, manifestation de ses soucis et de ses douleurs. Il n'y en avait pas qu'une. Il savait que son ami avait eu des soucis psychologiques et il n'était pas expert dans le domaine mais il se demandait constamment si ses TSPT avaient été correctement prises en charge. Le fait qu'il ai créé Ultron sans que personne n'y trouve réellement à redire l'incitait à penser que non.

— Un verre ?
— Seulement s'il n'y a pas d'alcool. Je tiens à mon jeton de 50 ans de sobriété, ils ont dû le faire faire juste à mon intention et je ne voudrais pas que ça ai été en vain.

Stephen sourit un peu. Il avait commencé à aller aux alcooliques anonymes en 1996, juste après le départ de Cléa. Il n'avait pas encore bu une goutte mais il sentait l'envie qui montait au fur et à mesure qu'il n'avait plus de nouvelles de sa femme. Il avait été à sa première réunion pour trouver la force de ne pas s'y remettre. La tête des gens quand ce gars de pas quarante ans avait dit être à sa trente-et-unième année de sobriété !

— À défaut de te proposer de rejoindre ARES, je peux au moins savoir pourquoi ? Parce que bon… Je te croyais plutôt du genre médiateur… A essayer de donner des conseils, tout ça…  Tu sais, je n’ai jamais bien compris ton rôle de Suprême. Ne m’en veux pas trop. La magie, j’essaye d’éviter…

Tony eut un petit sourire. Oui, le sentiment était partagé. Lui-même n'aimait pas trop la technologie, il s'y était accommodé dans sa vie de tous les jours bien sûr, mais lorsqu'il s'agissait d'agir contre, il n'y arrivait pas vraiment. La magie et la technologie ne se comprenaient pas et se détraquaient l'un l'autre. Un robot frappait facilement un magicien et un magicien mettaient facilement le bazar dans les circuits d'un robot. Et toujours sans savoir quel effet les attaques de chacun auraient. C'était le hasard, la roulette russe.

— Je dois m'occuper de l'équilibre magique. Veiller à ce qu'elle soit bien utilisée, punir si on l'utilise pour faire le mal, empêcher des autres dimensions de nous envahir… Guérir les hommes aussi, mais ça c'est ma quête personnelle. Je ne suis pas censé intervenir dans les lois humaines. Le RA est passé, je ne l'approuvais pas mais désormais c'est une loi et il faut faire avec. (Il désigné sa nuque, là où se trouvait la puce qu'on lui avait implanté. On lui avait dit qu'il ne la sentirait plus après un moment. C'était faux, en tout cas pour lui. Il sentait l'intrusion technologique, qui se battait constamment contre le reste de son corps. Il avait peur, souvent, que sa magie ne lui fasse faire un rejet.) C'est pour ça que j'ai accepté de mettre cette puce malgré mes convictions. Malgré le fait que putain, j'ai l'impression de revivre les années quarante. On a plus des étoiles de David sur le torse, on a des traceurs sous la peau. On en a pas assez conscience ici parce qu'on est américains. Mais y a soixante-dix ans, en Europe, c'est comme ça que ça a commencé.

Stephen secoue la tête. C'est pas ce qu'il était censé dire mais il peut pas s'en empêcher. Parce qu'il était là, parce qu'il l'a vu, parce que même s'il ne l'a pas vécu, son père s'est battu là-bas et il a entendu toutes les histoires, il a appris toutes ces choses, il sait. Il comprend que Cap plus que personne d'autre soit contre. Parce que merde, lui aussi il l'a vu et vécu, de plus près encore. Mais c'est pas ça les raisons de Stephen. Pas seulement.

— Mais comme j'ai dit, c'est une loi désormais et je n'ai pas le droit d'aller contre. C'est pas mon boulot à moi, y a d'autres personnes pour ça. Ce contre quoi je peux me battre, c'est la déchirure des hommes. Parce que protéger les gens c'est mon boulot. Si je veux rejoindre ARES, c'est pour que les gens se rangent, pour éviter cette guerre qui gronde. On peut encore l'éviter, je sais qu'on peut. Et ARES est là pour ça, mais j'ai peur qu'ARES ne soit… trop. Venom, Tony. Sérieux ? Venom ? C'est n'importe quoi, ce gars devrait être en taule. Ce gars est violent et… Je te l'ai dit. Ca commence comment dans les années quarante. Et je veux pas que ça aille jusque là. Je veux aider à faire recruter des gens pour qu'on soit tous en harmonie sous une même loi. Mais aussi pour calmer les ardeurs et que les agents n'aillent pas trop loin. T'es pas un débile. Tu sais qu'il faut quelqu'un qui réussisse possiblement à les contenir.

   

— Attends. Je t’arrête tout de suite. Ce n’est pas moi qui ai choisi. Je ne décide pas à la place du Gouvernement… Mon argent n’a pas ce pouvoir illimité. 

Oui, il s'en doutait un peu. Le reproche n'était même pas vraiment adressé à lui, c'était plus une constatation général. Le gouvernement avait abusé en embauchant Venom. Ce n'est pas comme si les journaux ou la télé n'avaient jamais parlé de lui, il était quand même un minimum connu. Bien sûr les gens connaissaient moins son identité secrète, mais on ne trompait pas Stephen. C'était son boulot de savoir et il ne lui avait pas été difficile de faire le lien entre les deux. Il ne révélerai jamais l'identité secrète de quiconque, pas sans avoir eu leur accord au préalable. Mais il savait faire les liens entre les identités. Les noms sont puissants et il met un point d'honneur à les connaître.

— Si j’ai accepté de financer ARES, c’est justement pour avoir un poids dans la balance. Je n’ai aucune confiance en ce type de dégénérés. Mais le Gouvernement l’aurait choisi quoiqu’il arrive. Ils sont désemparés… Face à Captain ou aux autres. Si je suis là, c’est pour éviter que ça dégénère et que ce genre de détraqué, comme Venom, ne se mette pas à s’en prendre à tout le monde.

Désespéré, hein ? Bien sûr. Avec une loi pareil à quoi s'attendaient-ils ? A recevoir les honneurs, des médailles, la majorité aux prochaines élections ? Bien sûr que non, il était évident qu'il recevraient des critiques et que la population visée ne seraient pas tous d'accord. Une puce dans le coup ce n'était pas rien. C'était comme un bracelet électronique qu'on ne pouvait pas enlever et qu'on mettait aux gens avant qu'ils n'aient fait quoi que ce soit.

— Alors tu comprends mes motivations. On est dans le même camps sur ce coup-là. On ne veut pas que ça dégénère, on veut calmer le jeu autant que possible. On a pas besoin d'une équipe d'agités qui prendraient plaisir à faire ce qu'ils font. Les choses vont assez mal comme ça.

Il joua avec le verre d'eau que Tony lui avait donné avant d'en prendre une gorgée. Il sentait les choses, et il sentait que ce n'était pas bon. Comme une guerre qui grondait, deux camps qui devraient s'affrontaient. Et lui n'avait que les lois et sa conscience sur lesquels se reposer. Il n'avait pas vraiment de camps à choisir. Il avait un camps à soutenir.

— Le monde a besoin de cette loi, Stephen. Pour éviter à des gens comme moi de faire des erreurs. Chaque jour, on peut entendre des catastrophes aux informations… Les mutants incontrôlables sont dangereux… Et Captain est dangereux. Personne ne veut plus la paix que moi… Mais lui, il veut aller au bout de ses convictions, même s’il faut commencer une guerre.

Le marchand de mort, avait-on appelé Tony autrefois, lorsqu'il faisait encore des armes. Et le voilà qui voulait la paix. Ce n'était même pas ironique, juste une belle évolution. L'homme qui vendait la guerre avait changé de voie et faisait désormais ce qu'il pouvait pour tenter d'abolir ce en quoi il avait autrefois placé toute son économie. Tel Stephen se rendant enfin compte qu'il ne faisait que du mal à ses patients, qu'il tuait en faisant une sélection trop restreinte de sa clientèle. Oui, Stephen se retrouvait énormément en Tony. Est-ce que le Stephen de 38 ans aurait approuvé cette loi ? Oui. Il l'aurait approuvé parce que tout ce qu'il voyait, c'était la destruction autour de lui. Et aujourd'hui, à 86 ans, Stephen ne pouvait pas oublier.
Il regardant ses mains, ses tristes mains qui tremblaient encore parfois, balafrées sur les doigts, marqués d'une multitude de cicatrices. Il avait fait tant de choses avec ces mains. Et il y avait tant d'autres choses qu'il n'avait pas fait avec.

— Tu sais que je te comprends, mieux que quiconque. Quand j'étais chirurgien, j'ai aussi fait beaucoup de conneries, et ça a sûrement gâché la vie de pas mal de monde. Et je comprends ton chemin d'expiation Tony, mais il faut aussi que tu comprennes quelque chose. Tout n'est pas de ta faute. Tout n'est pas ta responsabilité. Oui, t'as merdé, on a tous merdé et on merdera tous. Mais c'est comme ça, c'est la vie. Les mutants, Cap, eux aussi l'apprendront à leurs dépends. Mais c'est pas à nous de tout régler. Et c'est pas non plus à cette loi. Les gens qui l'ont voté ? Ils ne nous comprennent pas. Ils ne nous connaissent pas. C'est pas à eux de décidé. Je suis d'accord, il faut faire quelque chose, il faut une régulation. Steve se berce d'illusion en pensant que de ne rien faire du tout sera le mieux. Mais je crois à l'entre-deux. Tout n'est pas comme tu le penses, et tout n'est pas comme il le pense ? Et si finalement, le mieux était tout simplement le meilleur des deux mondes ? Une régulation, un apprentissage, sans partir pourtant dans la chasse aux sorcières comme le fait le gouvernement ? Tu dis que tu n'as pas le pouvoir de décider, c'est vrai. Mais si on s'y met à plusieurs ? On a pas besoin d'une guerre. Il suffit de faire comprendre à Steve que le mieux est de travailler ensemble.
— Si tu veux calmer les ardeurs de Steve, je te souhaite bien du courage. Quoiqu’entre ancêtres, vous devriez vous entendre, non ? Moi, j’ai essayé… Visiblement, il n’aime pas mes arguments.

Stephen sourit en coin. Oui, il a entendu dire que Tony avait essayé et ça n'avait pas été très fructueux. La séparation des Avengers avait fait la une de tous les journaux et ça avait énormément attristé le sorcier. Pour lui, l'équipe était une preuve que le monde changeait, évoluait et que c'était accepté. Parce que tout le monde aimait les Avengers, n'est-ce pas ? C'est ce qu'il avait cru après New York. Puis il y avait eu Ultron et ses illusions étaient tombées. Les Avengers aussi avaient leurs réfractaires, on leur demandait juste moins leur avis. Jusqu'à la Sokovie.

— S'il y a bien un truc que vous avez en commun lui et toi, c'est votre tête de pioche. Seul je sais que je ne pourrais pas le convaincre. Mais à plusieurs peut-être qu'on pourrait ? Je suis sûr qu'il est encore temps de mettre fin à toutes ces tensions et d'avorter le conflit qui grossit.

   

— A plusieurs ? Parce que tu crois qu’il est seul ? Combien soutiennent Captain ? Non, en fait, je n’ai même pas envie de le savoir. Ça ne m’intéresse pas.

Il n'avait pas tort, Stephen en avait parfaitement conscience. Steve n'était que la partie visible de l'iceberg, il y aurait derrière lui d'autres personnes prêtes à le suivre jusqu'au bout, prêtes à se battre à ses côtés, prêtes à tout donner. Il était ce genre de type qui inspirait, l'avait toujours été. C'est ce que Stephen se souvenait d'avoir retenu de lui lorsqu'il avait vu son spectacle une éternité auparavant, avant même qu'il ne fasse tout ses plus grands faits d'arme. Captain America en imposait et de ce qu'il ne savait, l'homme sous le costume à la bannière n'était pas bien différent sur ce point. Il trouverait toujours des personnes pour se rallier à lui, pour être à ses côtés lors de cette guerre. Mais voulait-il vraiment cette guerre ? Stephen espérait que non mais le fait qu'il n'ai pas encore renoncé laissait finalement penser l'inverse. L'homme qui s'était battu pour la paix allait-il finalement être le déclencheur d'une nouvelle guerre ? Il peinait à y croire mais c'est ce qui semblait se faufiler.

— Je compte arrêter Steve, quoi qu’il arrive, en essayant de faire trop de dégâts… Mais c’est lui qui incite les personnes à s’opposer à cette loi de se rebeller. N’essaye pas de m’en empêcher. Il n’est pas prêt de changer d’avis, crois-moi. Je le connais assez pour savoir ça.

Il parlait toujours à je. Jamais nous. Toujours lui-même, seul, comme si tout le monde était derrière Rogers et personne derrière Stark. Mais Stephen ne pouvait pas le croire, il y avait forcément quelqu'un derrière, quelqu'un qui soutenait l'ingénieur. Pepper, Rhodes, quelqu'un. Ou s'était-il encore isolé comme il lui arrivait ? S'était-il encore renfermé en pensant qu'il blesserait ses proches ? Stephen ne pouvait pas le permettre, il connaissait l'ingénieur et savait qu'il ne pouvait pas être seul, ne le devait pas.

— Arrête de parler comme si tu étais seul. Toi aussi tu as des alliés, je le sais. Tiens regarde, ce Spider-kid ou je ne sais quoi. Aux dernières nouvelles il est avec toi, non ? Je sais que tu veux faire ça, et que tu ne veux pas forcément le faire seul, mais là on a l'impression que tu mets tout sur tes épaules. Relaxes ok ? Sinon je vais sérieusement commencer à m'inquiéter.

Enfin, comme s'il ne s'inquiétait pas déjà. Ultron ne sortait pas de nul part. Le sorcier était sûr au plus profond de lui-même qu'il était tout simplement le résultat des nombreuses angoisses de son ami, comme un concentré de peur et d'appréhension qui avait donné une machine qui voulait détruire toute peur et toute appréhension de la mauvaise façon.

— Je ne vais pas t'en empêcher, si j'étais là pour ça on aurait un tout autre genre de conversation. Tu as assez de détracteurs comme ça, je pense que tu as plus besoin de soutien. D'aide. Tu vois Pepper souvent ?

Il savait que la jeune femme pouvait être à la fois un pilier et un marteau-piqueur pour le milliardaire. Elle avait été là pour lui dans de nombreuses épreuves passées mais c'était aussi elle qui l'avait fait se séparer de ses armures, qui n'avait pas compris le support qu'elles étaient pour l'équilibre de son conjoint. Elle n'était qu'humaine, et même s'il n'y avait rien de mal à cela, qu'elle ne soit pas elle-même super-héroïne pouvait creuser un fossé. Elle ne pouvait pas réellement comprendre.

— Mais si tu veux jouer le rôle de… Je sais pas moi, médiateur, au sein d’ARES, n’hésite pas. J’imagine que tu seras bien meilleur que moi. Prépare du café, car ça risque de te faire de très longues journées. Enfin, tu as peut-être un sort qui te permet de te maintenir éveillé… Un genre de caféine magique sans doute.

Stephen ne retint pas un sourire amusé. Ouais, tout Tony ça. Blaguer pour cacher le rester, attirer l'attention sur son côté joyeux luron. Mais Stephen aimait bien l'humour du milliardaire, enfin parfois. Pas toujours mais en grande partie.

— J'étais médecin tu te souviens ? Je suis capable de bosser 24h, me taper une jolie infirmière, opérer pendant six heures et me taper une seconde jolie infirmière sans dormir entre deux. Et ça c'est seulement ma seconde année d'internat.

Stephen blague assez rarement finalement, mais il aime bien le faire quand il peut. Ca a l'avantage de détendre et vider un peu l'esprit. Même s'il ne perd pas de vue le sujet principal.

   

— Pepper ? Disons que c’est compliqué. Enfin, je ne t’apprends rien. Toi et moi, on a toujours eu du mal avec les femmes.

Ca n'allait pas très bien entre eux et il ne voulait pas en parler. Message reçu, Stephen connaissait ça. Il avait mis un moment avant de dire à Tony qu'il était marié mais que sa femme l'avait plus ou moins laissée tombée. Comme il disait, c'était compliqué. Ca l'était toujours avec eux deux, ils n'étaient pas foutus d'avoir une relation normale avec les femmes, il fallait toujours qu'ils merdent quelque part, comme si le destin s'acharnait sur eux pour leur dire que non, ils ne vivraient pas heureux en amour, ils n'étaient pas fais pour ça. Ce n'était pourtant pas faute d'avoir essayé, bien au contraire même. Ils faisaient leur possible pour rester avec la femme de leur vie, celle avec qui ils voulaient rester à jamais. Mais il y avait toujours quelque chose, un événement qui venait gâcher le beau tableau qu'ils venaient de construire. Voilà bien un point commun de plus entre les deux hommes, leurs vies sentimentales désastreuses.

— Je peux comprendre. La dernière fois, j'avais l'air tellement désespérée que je me suis fait harponner par deux filles qui voulaient plus me consoler que coucher avec moi. J'ai l'air autant au fond du trou ? Je pensais être un gars en pleine forme, moi.

Il sourit un peu, il plaisante. Les filles avaient en effet voulu le consoler mais elles avaient surtout voulu finir dans son lit. C'est juste une façon de faire sourire Tony, le faire aller mieux. Il en avait clairement besoin, la tête fatiguée qu'il avait fait à la mention de Pepper parlait pour lui. Si les rôles avaient été inversés, Tony aurait tenté de faire sourire et rire Stephen. Il y serait sûrement mieux parvenu d'ailleurs, Stephen n'avait jamais été trop doué pour ça, rendu sérieux par les années et le boulot. On lui disait d'ailleurs souvent qu'il n'était pas un rigolo. Il n'y avait eu que lors de son mariage, mais il ne voulait pas y penser.

— C’est vrai. Mais bon, tu n’es plus tout jeune… Mais, j’imagine que c’est la meilleure place pour toi. Tu as toujours été meilleur diplomate que moi.
— Mon cher Tony, le jour où je trouverai moins diplomate que toi, je prendrais peur et fuirait sûrement dans une autre dimension.

Des plaisanteries, encore. A croire qu'une fois à deux ils ne savent plus faire que cela, mais cela concerne un peu Stephen. Il ne faut pas oublier d'être un peu sérieux, c'est pour cela qu'il était là en premier lieu, pour parler de sujets grave. Le Registraction Act et ARES. Des sujets qui n'étaient pas vraiment des plaisanteries, mais Tony avait réussi à détourner son attention vers autre chose, vers une discussion plus conviviale. Il était doué, il fallait l'avouer, dès qu'il s'agissait de détourner l'attention d'un sujet à un autre. Mais Stephen voulait parler et il comptait le faire.

— Ecoute, Tony… Je ne sais pas ce que tu as vécu, personne ne le peut. Mais je comprends. Comme je comprends ce qui te rend si protecteur du RA. Et si tu veux le défendre en faisant la guerre… C'est loin d'être dans mes habitudes et tu le sais, mais je t'aiderai. Je peux faire ce que je veux tant que je suis du on côté de la loi. Et je veux aider mon ami. Alors si tu souhaites mon aide, même en dehors de ARES, pour parler avec Steve ou aider tes Avengers… Tu as mon numéro. Appelle-moi et je viendrais. D'accord ? On ne sera pas tous toujours là pour toi, mais tu es parmi mes amis les plus chers et moi je serais là.

   

— Ce n’est pas moi qui ai voulu la guerre, Stephen. Je pensais que cette loi arrêterait tout ceci… Que ça arrêterait les dingues qui sont capables de créer une intelligence artificielle mégalomane par exemple.

Toujours cette culpabilité vis à vis d'Ultron. Stephen doutait que Tony pourrait un jour s'en défaire de cette culpabilité là, elle s'accrocherait probablement à lui telle une sangsue pour le restant de sa vie, le nourrissant de ressenti pour sa propre personne. Nul ne pourrait rien y faire, il s'en doutait. Lui-même n'avait jamais pu se pardonner les morts qu'il avait pu provoquer en refusant des patients alors il ne s'attendait pas à ce que Tony fasse de même. Non, il vivrait avec pour le restant de ses jours, tout simplement. Heureusement pour Tony, cela voulait dire moins longtemps que pour Stephen. Lui porterait son fardeau pendant encore des décennies, des siècles peut-être même. C'est dans ces moment-là qu'il enviait la mortalité de son ami.

— Mais promis, je t’appellerai autre que pour une partie de cartes. Parce que c’est ce que vous faites, vous. Les vieux.

Stephen retient un rire, ce qui lui fait faire un étrange bruit de nez. Juste quand il enviait la mortalité de Tony voilà qu'il plaisantait sur ça. Le sorcier ne pouvait rien dire, il devait avouer qu'il appréciait les jeux de carte. Une petite partie de poker de temps en temps avaient le don de le distraire, mais trouver quelqu'un qui sache se mesurer à un sorcier était une autre paire de manche. Il avait bien tenté de l'apprendre à sa femme mais… Il soupira, voilà qu'il repensait à Clea quand il ne fallait pas. Il avait autre chose à penser et pourtant elle revenait. Il se concentra sur le sujet actuel, finissant le verre d'eau servi par son ami.

— Je te l'ai dit, toujours là pour toi. Enfin, si j'arrive te répondre, tu sais les vieux et la technologie...

Comme s'il n'avait pas un téléphone dernier cri avec lequel il arrivait parfaitement à envoyer des messages, seulement ralenti par les tremblements de ses mains. Mais il est vrai qu'à part envoyer des messages, il serait bien impossible de faire quoi que ce soit d'autre. Il avait tenté de suivre l'avancée de la technologie mais elle avait fait de tels bonds ces derniers temps que même en faisant des efforts…

— Écoute, Steve ne voudra pas reculer. C’est un soldat et il est très dangereux. Il ne reculera devant rien pour faire valoir ses idéaux, tout comme moi. Si je dois trouver une qualité à Steve, c’est qu’il me ressemble sur ce point. 

Stephen ne peut qu'acquiescer face à ces paroles. C'est bien quelque chose qu'il a remarqué chez les deux hommes, alors même qu'il ne connaît pas Captain America personnellement. A vrai dire, il ne sait même pas réellement comment est l'autre homme, il ne le connaît qu'au travers des bande dessinées de son enfance, des reportages et de ce que d'autres ont dit sur lui. Mais l'homme en soit ? Jamais. Il faudrait qu'il s'y intéresse un jour, mais il n'avait pas forcément le temps. Et puis ce ne serait ses affaires que s'il appelait pour qu'il l'aide. Et à ce moment il aurait tout le temps de jauger… l'adversaire.

Stephen se leva à son tour, s'approchant de Stark pour regarder, comme il l'avait fait, par la bais vitrée. Fut un temps, c'était de son appartement qu'on aurait pu avoir une aussi belle vue sur New York. Certes de moins haut, mais le sentiment était le même.

— Tu sais Tony… Fut un temps c'était moi qui avait un joli appartement comme celui-là, et qui regardait la ville. Et puis je suis devenu l'homme que je suis. Je suis devenu le Sorcier Suprême, j'ai mis fin à l'histoire de mon maître pour commencer la mienne. Un héros en a remplacé un autre et l'histoire continue.

Il ne se considérait pas réellement comme un héros mais c'était pour l'image. Il n'était pas le moment de s’apitoyer sur son propre sort, à se plaindre qu'il n'était pas le quart de ce qu'avait été son maître. Il s'agissait d'encourager Tony, ici.

— Steve a eut des comics à son nom, des histoires, des légendes… Il a eut son heure de gloire et il est devenu une figure marquante de l'histoire de l'Amérique. Mais c'était les années 40. Tout le monde s'arracher Captain América à l'époque, tout le monde voulait être comme lui. Aujourd'hui ? Va voir les gens dans la rue et ils s'en foutent d'être Captain America. Il n'est plus l'idéal que tout le monde suit face à un ennemi certain. Mais toi tu n'as encore fait que des petits pas dans ce monde. Tu es beau, un génie, riche et en plus tu assures la sécurité du monde. Peut-être que c'en est fini de Cap et des idées des années 40. Peut-être qu'il est temps de t'écouter toi. De se détourner du héros qui avait raison dans le temps pour le héros qui a raison maintenant. (Il lui tapota l'épaule amicalement. Non il n'était pas tout à fait d'accord avec la loi, mais lui aussi savait avoir tort. Il avait même souvent tort. Et Tony aussi, mais parfois la personne qui avait raison était celle qui avait tort dès le début.) Qui sait. Seul le temps nous dira qui était celui qui avait raison. Et t'as quand même ta chance.
   

Peut-être a-t-il tort d’encourager Tony dans cette voie. Peut-être que ce n’était pas Steve la personne à convaincre d’arrêter mais bien Tony. Après tout, lui aussi s’obstinait dans son point de vue et le fait qu’il soit la figure publique du Registraction Act… Le voir changer d’avis ou refuser de se battre enverrait un grand message. Mais étrangement, Stephen n’essaya pas. Ce n’était pas réellement Tony seul, ni Steve seul, qu’il fallait convaincre de ne pas faire dévier les choses de la mauvaise façon, mais bien les deux ensemble. L’un pourrait toujours vouloir arrêter, l’autre continuerai et alimenterait ainsi son feu. Il faudrait qu’il leur parle à tous les deux, ensemble. Mais ce ne serait pas chose aisée, entêtés qu’ils étaient, et sûrement pris dans le feu de l’action.

— Et je compte bien tenter ma chance. Je pense qu’Iron Man dégage un bon message et je compte bien continuer sur cette voie-là.

Stephen hocha la tête. Il était du même avis, Iron Man avait lancé quelque chose lorsqu’il était apparu au grand jour. Il y avait d’abord eu des doutes lorsqu’il avait refusé de donner ses armures au Sénat mais lorsqu’il avait été révélé que l’un d’eux, celui qui avait le plus désiré les armures, avait tout ce temps été un membre d’Hydra. Le public l’avait bien sûr appris, cela avait été un véritable scandale qui avait fait écho à celui qu’avait provoqué le vice-président lorsqu’il s’était avéré être un allié du Mandarin. Stephen s’interrogeait tout de même, comment Tony pouvait-il encore faire confiance au gouvernement après tout ce qu’il avait vécu, tout ce qui avait été révélé ?

— Et je suis content de t’avoir à mes côtés. Tu dégages à la fois une touche de nostalgie avec ta tenue et de modernité avec ta coupe de cheveux ! Deux styles en un, il n’y a que le Sorcier Suprême pour faire ça.
— Oh tu trouves ça bien ? Dommage j’allais te demander un super nouveau costume trop classe de la mort, moi. Je suis déçu.

Non pas qu’il n’aimerait pas avoir un nouveau costume pour de vrai, mais ce n’était pas exactement à Tony qu’il aurait été demander ça. Son ami avait un peu trop tendance à bourrer ses trucs de technologie dans les costumes qu’il faisait pour les autres et honnêtement ce n’était pas vraiment le délire de Stephen. La technologie avait tendance à interférer avec la magie, en tout cas il n’avait jamais vu quelqu’un réussir à parfaitement marier la sorcellerie et la technologie. Ok, il l’avait déjà vu mais tout le monde n’était pas le Docteur Doom. Aussi génie que fut Tony, il ne pourrait pas saisir les subtilités de la magie s’il ne la pratiquait pas.

— Mais comme tu le dis, l’avenir nous le dira.

Le sorcier hocha la tête en direction de son ami qui le regardait désormais. L’avenir n’attendrait pas à jamais, Stephen le savait. Il avait attendu l’avenir et l’avait vu arriver plus vite qu’il n’aurait pu le penser. C’était le problème avec le temps, il n’écoutait jamais nos envies lorsqu’il s’agissait de le voir se dérouler. Il n’en faisait qu’à sa tête, allait vite lorsqu’on le voulait lent et aller lentement lorsqu’on le voulait rapide. Stephen avait peur que le moment de crise ne soit plus proche qu’il ne pouvait l’espérer. Au moins aurait-il une vue de l’intérieur avec ARES, une vue qui lui permettrait de jauger la situation pour réussir à trouver un moyen de désamorcer le conflit. Du moins espérait-il qu’il trouverait un moyen de désamorcer le conflit.

Il n’était pas censé intervenir. Il ne le devrait pas. Mais il ne pouvait pas s’en empêcher, il ne voulait pas voir le monde se déchirer, ses amis s’entre-tuer peut-être même, sans réagir et tenter de l’en empêcher. Peut-être qu’il ne serait plus digne de son rôle après cela. Peut-être. Il ne savait pas et il ne l’espérait pas, mais il prenait le risque. Il se devait de protéger les hommes et il ne pensait pas le pouvoir en restant enfermé chez lui, voire en s’exilant.

— Je vais te laisser. J’ai recueilli un chien et le temps de lui trouver un nouveau maître je dois m’en occuper, il doit m’attendre impatiemment pour la balade. Et qui sait, peut-être que je vais réellement passer quelque part me trouver un nouveau costume. C’est un rien fatiguant d’être visible de loin, tu ne trouves pas ?

Le sorcier alla tapoter l’épaule de son ami de façon amicale. Il serait bien resté plus longtemps, il fallait l’avouer. Mais il n’avait même pas encore fait part de son idée de rejoindre ARES à Wong, et il savait que la pilule aurait du mal à passer et qu’il lui faudrait du temps pour comprendre. Autant tout faire dans la même journée. Il avait le sentiment que le lendemain ne serait pas le bon jour.

— Te torture pas trop avec tout ça en attendant, ok ?